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Présidence CDP : Eddie rafle la mise

Après avoir été blanchi dans le cadre du dossier du putsch manqué de septembre 2015, le président du  Congrès pour la démocratie et le progrès (CDP), Eddie Komboïgo, avait tout de suite entamé un périple à l’intérieur du pays qui préfigurait une campagne pour conserver son poste. Ses efforts, si on peut le dire ainsi, auront finalement payé : à l’issue d’une élection au bout de la nuit, il a été élu président du parti  face à Boureima Badini par 39 voix contre 33. Les VIIes assises du CDP, qui ont eu lieu les 5 et 6 mai, ont également consacré la nomination de Blaise Compaoré en qualité de président d’honneur doté de pouvoirs importants.

 

Pour son VIIe congrès, l’ex-parti au pouvoir a réussi le pari de la mobilisation mais pas celui de l’unité.

Ni la ferveur festive des plus de 3 200 congressistes  qui se sont rendus maîtres du palais des sports de Ouaga 2000 à cette occasion, ni l’hystérie qui confine à la dévotion d’Ambroise Tapsoba, le harangueur maison, n’ont réussi à effacer d’un trait les divisions internes qui ont alimenté les débats dans les gargotes et faisaient les choux gras de la presse depuis quelques mois : 19 hommes et femmes s’étaient alignés en effet au départ pour conquérir le sceptre du parti. Un record qui a valu une lettre du fondateur du parti, Blaise Compaoré, lequel a, depuis son exil abidjanais, appelé à l’unité et à la cohésion de sa famille politique. Ce congrès était donc celui de tous les dangers.

En attendant de remettre son mandat en jeu, c’est en véritable rockstar que le titulaire actuel du fauteuil, Eddie Komboïgo, a fait son entrée dans l’enceinte sportive pour l’ouverture des travaux. Comme a son habitude, il a affiché un V de la victoire devenu aussi le signe de ralliement de ses partisans dont beaucoup arboraient des tee-shirts à son effigie. Mais la victoire n’est pas gagnée d’avance : à ce instant, il dispute son poste à 18 autres prétendants, et pas des moindres : Achille Tapsoba, Juliette Boukoungou, Boureima Badini, Mahamadi Kouanda, pour ne citer que ces pontes du parti de l’épi et de la daba.

17 candidats jetteront l’éponge avant le début du scrutin à bulletin secret qui s’est tenu dans la nuit du 5 au 6 mai. Après ces désistements au nom du consensus, il n’en restait plus que deux décidés à en découdre aux urnes : Eddie Komboïgo et Boureima Badini. Le corps électoral, composé des membres du Bureau exécutif national (BEN), a finalement décidé à l’aube du 6 mai de refaire confiance, pour encore trois  ans, au président sortant par 39 voix contre 33 à son concurrent. Les autres membres du BEN ont également été renouvelés. Le poste de secrétaire général est ainsi revenu à Blaise Sawadogo et celui de premier vice-président à Achille Tapsoba. Quelques autres caciques comme Alpha Yago, Salif Kaboré, Salifou Sawadogo, Zembendé Théodore Sawadogo, Mahamadi Kouanda, Jean Couldiaty et Marin Casimir Ilboudo occupent aussi des postes. (Lire encadré)

En raison du résultat serré, le vainqueur a eu le triomphe modeste et a sonné le rassemblement des troupes en vue des prochaines batailles, notamment la présidentielle de 2020. « Nous devons oublier nos divergences passées et nous tenir main dans la main pour reconquérir le pouvoir », a exhorté Eddie Komboïgo.

 

Blaise Compaoré, tout-puissant président d’honneur

 

Même si l’intéressé se trouvait à mille lieues de là, son ombre a plané sur le congrès. L’évocation du seul nom de Blaise Compaoré suffisait en effet à lever la foule. Alors que la cérémonie d’ouverture venait à peine de débuter, un portrait de l’exilé, brandi comme la relique d’un saint, a été acclamé par le public en délire, obligeant l’orateur à interrompre son discours. On apprendra plus tard que l’auteur de ce coup d’éclat n’est autre que Nana Tibo. Ce dernier affirme s’être indigné de voir qu’aucune image du « beau Blaise » n’a été placardée dans la salle. Il a donc pris le soin d’en apporter de sa voiture pour réparer ce crime de lèse-majesté. L’ancien président, sur recommandation des congressistes, sera nommé président d’honneur du parti, un titre « hors hiérarchie et irrévocable ». En cette qualité, le président « honoris causa » fixe les grandes orientations du parti, valide le nom du candidat du parti à l’élection présidentielle, le choix du président du parti, les propositions de collaboration ou de fusion du CDP avec d’autres partis ou formations politiques  et peut être saisi de toute question d’intérêt majeur pour le parti. Il peut également convoquer à Abidjan les cadres du parti pour toutes questions qu’il juge d’intérêt majeur.

 

Hugues Richard Sama

 

ENCADRE 1

 

L’introuvable liste du bureau

 

Si on connaît déjà les noms de figures bien connues qui font partie de la centaine de membres du saint des saints du CDP, la liste définitive n’en était pas connue hier à la clôture du congrès. En réalité, un comité doit en principe se réunir aujourd’hui pour opérer des ajustements. C’est à l’issue de ces petits réglages techniques qu’on aura la liste complète du nouveau bureau exécutif national.

 

H.R.S.

 

 

ENCADRE 2

 

Les excuses au peuple

 

« La place et le rôle du CDP dans l’évolution sociopolitique récente du Burkina Faso », c’est sous ce thème général que s’est tenue cette grand-messe trisannuelle. Au-delà du renouvellement des instances, elle a été l’occasion pour l’ex-parti au pouvoir d’actualiser ses textes. Cette rencontre est la preuve, a proclamé son premier responsable, que « le CDP revient de très loin et ambitionne d’aller très loin ». Le parti a tiré leçon du passé, a assuré Eddie qui reconnaît que « tout n’a pas été parfait lorsqu’ils étaient aux affaires ». Occasion de présenter ses excuses : « Le CDP, par ma voix, demande pardon à notre peuple pour tous les actes posés et qui ont contrarié ses aspirations quotidiennes ».

 

H.R.S.

 

ENCADRE 3

La cour assidue de Zeph au CDP

 

S’il y a une intervention qui a enflammé les militants, c’est bien celle de l’enfant terrible de Gomboussougou, Zéphirin Diabré. Alors que le discours d’Eddie était parfois policé, le CFOP n’a pas hésité à sortir le lance-flamme contre le pouvoir en place. Il aura surtout tenu un discours de courtisan au CDP quitte à voler la vedette à son hôte du jour. « Je puis affirmer ici que l’opposition politique est très fière de compter le CDP dans ses rangs. Votre parti contribue énormément à la renforcer et à consolider le jeu de contre-pouvoir si nécessaire en démocratie. J’ajoute que votre connaissance intime de ceux qui nous gouvernent éclaire précieusement nos analyses et alimente à bonne dose nos stratégies ». C’est ainsi que commence l’opération de charme. A l’en croire, les combats épiques qui ont opposé le CDP et l’UPC relèvent désormais du passé. « Ce qui importe aujourd’hui, c’est de savoir ce que nous pouvons, ce que nous devons faire pour sortir notre cher Burkina du chaos dans lequel il se trouve », a-t-il lancé devant un public conquis. « Notre souhait est que le CDP se redresse vite et bien. Un CDP fort et uni renforce l’opposition », a-t-il proclamé tout en saluant la leçon d’endurance politique que donnent les militants du CDP qui, malgré la défaite, sont restés  fidèles à leur parti et à son fondateur, a-t-il également ajouté le président de l’UPC.

Pour seller définitivement le nouveau partenariat avec son adversaire d’hier, Zeph file la métaphore : « Il y a trois baobabs. Si deux se mettent ensemble, ils peuvent terrasser le troisième ».

A la fin de cette cour assidue, le président de l’UPC a eu droit à un standing-ovation. Eddie Komboïgo, lui, n’a pas résisté à l’envie de le prendre  par la main et le reconduire à son siège.

 

 

 

 

H.R.S.

 

Encadré 4

 

« Le nombre pléthorique de candidats est un bon signe »

Marcel Yaméogo, représentant du CDP Etats-Unis

 

Les 3200 congressistes sont venus  parfois de très loin comme Marcel Yaméogo, un expert en leadership qui représente le parti aux Etats-Unis. Il a financé son voyage sur fonds propres et avec le concours financier des membres de sa section. « C’était important pour moi d’être là », nous a-t-il confié. « Même si nous vivons à l’extérieur, nous voulons montrer notre attachement au parti et apporter notre part dans les travaux et insisté sur des points que nous pensons légitimes et nécessaires pour une victoire en 2020 ». Concernant le nombre pléthorique de candidats à la présidence au départ, il estime que c’est plutôt un bon signe. « Ça prouve qu’il y a beaucoup de camarades qui veulent diriger, ce qui est essentiel est qu’après les élections, le parti reste uni ».

Marcel Yaméogo, qui a fait son entrée au BEN en qualité de secrétaire adjoint chargé des structures du parti à l’extérieur, a tenu surtout à porter la voix de la diaspora par rapport à leurs votes de 2020. « Nous participons à tous les niveaux de développement, mais on est privé de la possibilité de choisir la personne qui va présider les destinées du pays. Ce n’est pas normal et nous attachons du prix à notre participation à l’élection de 2020 »

 

 

 

H.R.S.

 

Dernière modification lemardi, 08 mai 2018 19:34

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