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46e anniversaire de l’unité camerounaise : Violences et désunion assombrissent la commémoration

20 mai 1972- 20 mai 2018 : voilà 46 ans que, sur les cendres du fédéralisme, naissait la République unie du Cameroun. Disparaissait alors une forme d’administration locale dans la partie anglophone du pays.

Cette marche vers l’unité s’est accentuée en février 1984 quand le président Paul Biya décréta qu’en lieu et place de République unie du Cameroun, on dirait désormais République du Cameroun avec une célébration de la Journée de l’unité nationale le 20 mai de chaque année.

Mais de 1972 à 2018, beaucoup d’eau a coulé sous les ponts de la construction d’un Etat unifié entre les parties francophone et anglophone du pays. Les velléités de cultiver des singularités anglophones contre une francophonisation tous azimuts marquée, entre autres, par la concentration de plus en plus poussée des leviers du pouvoir à Yaoundé se sont cristallisées, d’abord en revendications syndicales, ensuite en volonté sécessionniste en effet, depuis octobre 2017, il ne se passe plus un mois sans que forces de l’ordre et séparatistes, s’affrontent dans des combats  de plus en plus violents entraînant des déplacés à l’intérieur du pays et des réfugiés au Nigeria voisin. Les combattants séparatistes qui revendiquent la création d’un Etat virtuel, l’Ambazonie, s’en prennent particulièrement aux autorités locales des régions du nord-ouest et du sud-ouest du pays.

Dans ce contexte de ni paix ni guerre, le gouvernement du président Paul Biya a voulu donner un signal fort  sur l’unité et l’indivisibilité du pays à l’occasion de la célébration du 46e anniversaire de la fête de l’Unité en multipliant les symboles d’intégration nationale. C’était  sans compter avec la détermination des séparatistes à se faire entendre. Ainsi la veille de la commémoration, ils ont enlevé un maire et ses deux adjoints dans un des départements de la région du Sud-Ouest  avant d’attaquer  le jour des festivités, des positions de l’armée régulière, encore dans le Sud-Ouest mais aussi au Nord-Ouest. Trois assaillants sécessionnistes ont été tués et sept militaires loyalistes blessés.

Ces nouvelles victimes épaississent l’ombre disgracieuse sur le tableau voulu harmonieux et fusionnel du vivre-ensemble camerounais affiché par le pouvoir de Yaoundé au fronton de cette commémoration festive. Cette détermination des sécessionnistes a débarrassé leur cause des préjugés qui la réduisaient à des lubies de marginaux. Aujourd’hui, pas moins que la conférence épiscopale du pays offre ses bons offices pour épargner au Cameroun « une guerre civile inutile », pendant que l’ambassadeur des Etats-Unis en poste à Yaoundé attire l’attention de Paul Biya sur « des exécutions ciblées » de militants séparatistes. Le diplomate américain est même allé plus loin en invitant Paul Biya à réfléchir sur son héritage politique et son rôle dans l’histoire du Cameroun. Une invite à l’occupant du palais d’Etoudi à passer la main qui n’est pas voilée. De là à dire que la communauté internationale observe de près ce qui se passe dans ce pays, notamment dans les régions frondeuses, c’est un euphémisme. Et si à défaut d’obtenir la partition du pays, les séparatistes obtenaient que Paul Biya ne soient pas candidat à un énième  mandat, ce serait un méga point de gagné dans l’enracinement  de la démocratie au Cameroun.

On n’en est pas encore là et il faut craindre que pour longtemps encore des milliers de Camerounais vivent des jours difficiles, coincés entre  sécessionnistes et forces loyalistes. Chose qui  fait  dire que la célébration festive de cette journée de l’Unité a frisé l’indécence, car des preuves de désunion se sont nichées au cœur de cette commémoration organisée par le pouvoir de Yaoundé.

 

Zéphirin Kpoda

Dernière modification lelundi, 21 mai 2018 21:33

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