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Cameroun anglophone : Un plan d’urgence aux visées électoralistes

 

12 milliards de FCFA pour éteindre l’incendie séparatiste allumé par les régions anglophones du pays : c’est ce qui ressort d’un plan qualifié d’urgent que le Premier ministre camerounais a exposé à ses compatriotes ce 20 juin.

 

 

Ce plan s’articule autour d’investissements importants en matière d’infrastructures routières, de santé, d’éducation, d’équipement de l’administration publique et de création d’emplois. Pour le mettre en œuvre, les autorités camerounaises comptent principalement sur le budget national et subsidiairement sur les habituels partenaires techniques et financiers du pays. On attendra de voir si dans un an, durée d’exécution du plan d’urgence, Paul Biya et son gouvernement tiendront parole et réuniront le pactole de 12 milliards pour recoller les morceaux des régions frondeuses du Nord-Ouest et du Sud-Ouest au reste du pays.

Quoi qu’il en soit, il y a incontestablement un changement de stratégie de Yaoundé dans la recherche de solutions au problème de sécession posé par les régions anglophones.

 

En effet, après le bâton des attaques frontales, des éliminations ciblées et des tortures contre les militants séparatistes, Paul Biya tend la carotte du développement solidaire avec ce plan d’urgence. Pour sûr, les autorités camerounaises ont compris que la fronde séparatiste ne saurait être réglée uniquement par le canon et la mitraillette.

Au mois de mars dernier, elles tendaient la main dans une offre de dialogue ; aujourd’hui, elles promettent des investissements structurants de l’économie en faveur des deux régions frondeuses. Mieux vaut tard que jamais, car il est de notoriété publique que la lame de fond des problèmes qui ont généré la révolte séparatiste des deux régions anglophones est socio-économique.

Le tout sécuritaire comme solution proposée par le gouvernement de Paul Biya ne sied donc pas pour résorber la crise. Ce plan d’urgence qui table sur la résolution des problèmes socio-économiques est plus en phase avec les aspirations des populations des deux régions rebelles et peut, mieux que la politique de la canonnière, faire échec au discours des militants séparatistes.

 

Mais à quelque quatre mois d’une élection présidentielle à laquelle Paul Biya pourrait être candidat à sa succession, l’annonce de ce plan, pour bien des observateurs, est un appât électoraliste. C’est connu, avec les 34 000 réfugiés, les 120 000 déplacés et les nombreux macchabées, dont 84 éléments des Forces de défense et de sécurité  causés par les affrontements avec les séparatistes, Paul Biya et son parti n’ont pas bonne presse dans le pays et, particulièrement, dans les régions du Nord-Ouest et du Sud-Ouest.

Quoi de plus normal alors que les autorités de Yaoundé travaillent à redorer leur blason auprès des Camerounais et de la communauté internationale, notamment l’administration Trump, dont l’ambassadeur en poste à Yaoundé avait critiqué les tortures et les éliminations ciblées de séparatistes !

 

Voilà donc Paul Biya et son gouvernement prévenus : ce plan d’urgence ne doit pas être qu’une simple carotte électoraliste tendue dans une savante opération de com. A bon entendeur…

 

 

Zéphirin Kpoda

Dernière modification ledimanche, 24 juin 2018 19:31

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