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Présidentielle malienne : Le défi sécuritaire comme première victoire

Cinq ans après la phase éruptive d’une crise où s’entremêlent djihadisme, séparatisme et conflits communautaires, le Mali cherche encore l’introuvable paix intérieure. Les 24 candidats au poste de premier magistrat du pays avaient donc un thème de campagne tout trouvé : le retour de la sécurité pour tous les Maliens.

 

Le président sortant, Ibrahim Boubacar Keïta (IBK), passait pour l’homme de la situation, qui, avec la poigne qu’on lui attribuait, devait juguler la crise. Cinq ans après, le bilan d’IBK est des plus mitigés, notamment en matière de sécurité et de bonne gouvernance. Du reste, la sécurité des opérations de vote passait pour être le grand défit à relever lors de ce scrutin organisé sous tension et haute surveillance.

En effet, bien qu’environ 25000 hommes des Forces de défense et de sécurité aient été mobilisés pour surveiller les opérations de vote, on a noté au centre et au nord du pays des incidents qui ont perturbé le scrutin au point d’empêcher le vote dans une quarantaine de bureaux. Des urnes saccagées, des bulletins de vote brûlés, du personnel électoral intimidé, attaqué, voire blessé comme à Gandiama, Fatoma, Manako Kounari  ont confirmé que le centre du Mali, particulièrement la région de Mopti, reste à surveiller comme du lait sur le feu. Au nord, c’est à Nyafunké et à Lafia que des urnes ont été également brûlées et un agent de sécurité blessé la veille du scrutin. Quatre jours auparavant, des hommes armés avaient donné le la de la tension perceptible autour de cette présidentielle en encerclant une réunion électorale du candidat chef de file de l’opposition, Soumaïla Cissé, à Fifo dans la région de Gourma Rharous. On pouvait donc craindre le pire le jour du scrutin. Mais à l’évidence, il y aura eu plus de peur que de mal. De fait, le vote perturbé dans seulement une quarantaine de bureaux de votes sur les 23041 officiellement déclarés confine cette perturbation au rang d’incidents mineurs. La CENI et toute la chaîne des organisateurs, y compris les Forces de défense et de sécurité, peuvent  alors pousser un grand ouf de soulagement. Le fait d’avoir relativement bien relevé le défit sécuritaire est une première victoire pour ce premier tour de scrutin.

Il faut néanmoins faire remarquer que  les Maliens se sont moyennement déplacés aux urnes ? La sérénité n’existait pas chez beaucoup d’électeurs qui, craignant  pour leur sécurité, sont restés à la maison. Il fallait en effet avoir du cran et une bonne détermination de résistant aux  groupes armés qui veulent saboter le processus électoral pour aller voter ce dimanche au nord  et au centre du Mali. Mais la crainte de l’insécurité n’est pas pour tout dans cette affluence, à la limite du passable, des électeurs maliens aux urnes. On y sent aussi un parfum de défiance, voire de désaffection des populations vis-à-vis d’une classe politique vieillotte et ankylosée dans des querelles improductives.

On en voudrait une preuve que la polémique sur le fichier électoral serait là pour l’illustrer : si 12 des candidats à cette présidentielle, proches du président sortant, le trouvent nickel, 12 autres, des affiliés à la plateforme « restaurons l’espoir » de l’opposition, y voient des doubles inscriptions, des électeurs fictifs, des erreurs sur les noms, bref un fichier parallèle, un cheval de Troie d’une grande tricherie électorale en préparation. Jusqu’à la veille du scrutin, le Premier ministre, Soumeylou Boubèye Maïga,  a donc joué au pompier de service pour éteindre l’incendie du manque de confiance de l’opposition à la transparence du scrutin. Pas sûr qu’il ait réussi, et il faut craindre des lendemains de scrutin houleux. On croise les doigts pour le Mali afin qu’à la chienlit sécuritaire ne s’ajoute  pas la bouillabaisse politique.

Zéphirin Kpoda

Dernière modification lemardi, 31 juillet 2018 20:55

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