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Bingo: Qu’est-ce qui freine le dépotage ?

Dans la matinée du 14 août 2018, la RN1 a été obstruée par une file interminable de camions à remorque à Tanghin-Dassouri. Ces nombreux véhicules, en partance pour le dépôt de la SONABHY situé à Bingo, avaient du mal à atteindre leur point de ralliement. A en croire certains conducteurs, cela fait bientôt 6 jours qu’ils avancent à pas de  tortue sur 7 km impraticables. De son côté, la direction du dépôt de Bingo apporte aussi des explications.

 

 

La queue de la longue file de camions-citernes transportant du gasoil, de l’essence ou du gaz  avait  fini par atteindre la commune de Tanghin-Dassouri, située à environ 28 Km de Ouagadougou, bloquant ainsi l’une des nationales les plus empruntées du pays.  Après la bifurcation  située  à la sortie de Tanghin-Dassouri, les véhicules ont 7 km à faire pour rejoindre le dépôt de la SONABHY. Un périple qui n’est pas simple à faire en saison sèche, a fortiori en période d’hivernage, le bitume ayant disparu à certains endroits. Afin de savoir  ce qui freine la progression de ces mastodontes chargés et dangereux, nous entamons une aventure sur 7 km au milieu de ces nombreux véhicules et de leurs conducteurs, qui ont élu domicile aux abords de la chaussée sous les arbres à proximité de leur chargement ou dans leur camion. Sur 4 km, impossible pour nous de trouver un interlocuteur pour savoir ce qui est à l’origine du blocage. Tous les apprentis que nous croisons nous indiquent la direction de Bingo. Quelques mètres plus loin nous parviendrons à échanger avec les membres d’un groupe de conducteurs qui refusent qu’on enregistre leurs voix. « Tout  ce qui nous arrive est imputable à la SONABHY. Il y a un manque de parking pour nos engins. Nous sommes capables de parcourir des milliers de kilomètres pour ramener la matière première. Quand arrive le moment de décharger, c’est un autre calvaire. On passe des jours ici, exposés aux intempéries, aux reptiles », a dit en vociférant notre interlocuteur avant d’ajouter que la situation est aussi due au fait que les camions de la SONABEL ne dépotent pas et encombrent la cour du dépôt. «  Ils restent stationnés là puisqu’ils n’ont pas de parking, prêt pour le ravitaillement à Ouaga ».

 A 11 h 27 mn après avoir slalomé entre  les nids-de-poule et les citernes, nous reprenons la route pour Bingo. Notre progression est stoppée à 1 km par un camion-citerne incliné sur le point de terminer sa course dans le ravin. Son jeune conducteur, Daouda Kaboré, que nous avons trouvé sur les lieux ne savait plus où donner de la tête. « J’ai essayé de faire un peu de place à une petite citerne, celle qui ravitaille les stations et voilà ce qui m’arrive. On attend un tracteur. On est  très exposé sur ce tronçon. Il y a quelques jours de cela, un camion a renversé  l’essence qu’il transportait et la voie était impraticable », a-t-il  dit tout remonté.  Quelques minutes plus tard, les pompiers arrivent sur les lieux et positionnent leur pick-up sur la route déjà encombrée. Pendant qu’ils s’imprègnent de la situation, un véhicule transportant du gaz rate son dépassement, le stationnement du véhicule des soldats du feu ne lui laissant que peu de marge de manœuvre, et frôle un autre, stationné sur le bas-côté de la route depuis 3 jours. Les nombreux chauffeurs qui encerclaient notre interlocuteur  se redirigent vers le véhicule accidenté où les discussions reprennent de plus belle.

Il est 12 h quand nous parvenons à atteindre Bingo, cette localité qui alimente la capitale en combustibles. L’entrée du dépôt est gardée par des gendarmes et les contrôles sont  stricts. L’accès nous sera refusé pour non-possession d’un laissez-passer. Un riverain dépassé par les évènements nous invite à discuter de la situation qui prévaut. «  Nous sommes fatigués de parler de nos problèmes. En cas de sinistre, comment les sapeurs-pompiers vont rallier Bingo avec tout cet encombrement ? Tous les villages environnants sont exposés. Les accidents sont légion. Sur les 7 km, imaginez que ces camions prennent feu  », dit Souleymane Zongo  avant d’ajouter tout furieux qu’une fois qu’un camion tombe en panne à l’intérieur du dépôt du fait de son mauvais état, les administrateurs l’écartent automatiquement.

 

W. Harold Alex Kaboré

Encadré

Le son de cloche du directeur du dépôt, Hippolyte Bassolé 

 

Qu'est-ce qui explique les récurrents blocages sur l'axe Tanghin-Dassouri-Bingo?

Il n’est peut-être pas très exact de parler de récurrence. Chaque fois que nous avons été confrontés à une telle situation, c’est à la suite de dysfonctionnements dans notre cycle d’exploitation, et ces dysfonctionnements ne sont pas toujours les mêmes du reste.

Qu’en est-il du ralentissement actuel du 14 août ?

Cette situation est due à des problèmes que nos camionneurs ont connus aux ports du Bénin et du Ghana.  En plus de cela,  les différents chauffeurs refusent d’utiliser les nouveaux compteurs pour le dépotage. Ils veulent revenir au système de ‘’T’’ archaïque.  La méthode actuelle ralentit donc beaucoup le travail. Tout cela est également causé par une accumulation de dysfonctionnements alourdis par deux jours de  protestation (jeudi et vendredi de la semaine passée). Nous sommes aussi confrontés à un problème d’encombrement causé par le surplus de camions de la SONABEL et des mines. Ils sont présents pour les formalités de douanes alors qu’ils ne sont pas destinés aux dépôts. Concernant la SONABEL et les mines il y a un ralentissement de leur consommation du fait du lancement de l’interconnexion avec le Ghana.

 

Quelle solution pour pallier le ralentissement du dépotage ?

Avec l’aide de la Douane, les procédures vont être accélérées. Les camions vont démarrer pour les centrales de la SONABEL et les mines. Les véhicules résiduels vont se rendre du côté du parking de la douane situé à Tanghin-Dassouri. C’est à partir de là-bas qu’ils rempliront désormais leurs formalités.

 

Les chauffeurs se plaignent du mauvais état du parking dans le dépôt et de sa petitesse.

S’agissant de l’état du parking, c’est une situation déjà prise en charge, et les travaux nécessaires ont été confiés à une entreprise qui est en chantier depuis le mois de juin 2018. Il est prévu le bétonnage de toute la cour. Ça ne se voit peut-être pas bien à cette étape de travaux préparatoires. S’agissant de sa taille, l’objectif n’est pas de remplir tout le parc du dépôt de camions-citernes, mais plutôt de prendre en charge le nombre de camions-citernes nécessaire à notre exploitation. Peut-être que les chauffeurs ont d’autres éléments d’évaluation !

 

Pour certains chauffeurs, il y a des espaces non aménagés pour eux. Qu’est-ce qui traîne ?

 

Ne serait-il pas plus efficace que ces sujets soient traités dans des cadres plus appropriés et par les personnes qualifiées à cet effet ? Les règles d’aménagement d’établissement comme les dépôts pétroliers obéissent à des normes professionnelles et à des réglementations nationales et internationales. Le contrôle de la bonne application de ces règles est confié dans notre pays à des structures bien connues.

 

 

Etes-vous conscient du danger auquel sont exposés les convois chargés de produits inflammables qui traînent  des jours?

 

Peut-on poser cette question à un responsable d’un dépôt pétrolier en exploitation depuis plus de 30 ans?

 

Les capacités du dépôt ne sont-elles pas dépassées?

 

Les capacités du dépôt sont dépassées, et la SONABHY elle-même ne cesse de le dire. D’importants projets sont en cours et nous ne manquerons pas de vous convier à venir faire le constat par vous-mêmes, quand ils seront à la phase des travaux sur sites. Cependant, il ne faut pas une règle linéaire entre capacité de dépôt et cadence de dépotage. Qu’elle que soit la capacité d’un dépôt, une fois qu’il est plein, c’est ce qui en sort qui en conditionne les entrées.

 

 

Entretien réalisé par

 

W.H. A. K

 

 

 

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