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Candidature de Katumbi : La charité bien tardive de Kengo

Il n’est pas du genre à se répandre quotidiennement dans les médias. Autant dire que quand il parle, sa parole est précieuse, comme c’est le cas depuis hier avec l’interview exclusive que Léon Kengo Wa Dondo a accordée à Radio France internationale (RFI).

 

Celui qui est sorti de son silence n’est pas n’importe qui. Aujourd’hui âgé de 83 ans, Léon Kengo Wa Dondo est une importante figure de la scène politique de son pays depuis maintenant un demi-siècle. Trois fois Premier ministre sous le règne de Mobutu, il est depuis 2007 le président du Sénat. Autant dire qu’il est le pont entre les dinosaures et les jeunes loups de la politique en République démocratique du Congo.

« Que pensez-vous de la situation de Moïse Katumbi qui, sous la menace d’une arrestation, n’a pas pu présenter sa candidature à la prochaine élection présidentielle ? », l’interroge Florence Morice.

Réponse de l’interviewé : « On doit faire en sorte que tous ceux qui veulent se présenter se présentent. Je suis pour que Moïse Katumbi rentre et se présente. Et il n’est pas dit, parce qu’il se présente, qu’il sera élu. On doit donner à tout le monde les mêmes cartes de manière à ce qu’on ne critique pas qu’on a exclu l’un ou l’autre. L’exclure, c’est avoir peur qu’il se présente et qu’il puisse être élu. Il vaut mieux qu’il se présente. S’il n’est pas élu, il baissera ses prétentions. Et s’il est élu, c’est très bien, il est un fils du pays. »

Surprenante, cette sortie l’est à un double titre : d’abord parce que le vénérable Kengo n’est autre que la deuxième personnalité de l’Etat, dauphin constitutionnel du président Joseph Kabila et ensuite parce qu’il est membre du Front commun pour le Congo (FCC), la coalition formée pour soutenir celui qui est désormais le candidat officiel de la majorité pour la présidentielle, Emmanuel Ramazani Shadary.

C’est dire que « le vieux » a ramé à contre-courant de l’évangile selon « saint Joseph ». C’est certes charitable pour lui de plaider la cause de l’ancien gouverneur du Katanga, en rupture de ban depuis quelques années avec son ancien mentor Kabila, mais à l’évidence sa prise de position vient un peu tard. Comme on le sait, le délai de dépôt des candidatures pour les élections générales du 23 décembre prochain, ouvert le 25 juillet, a expiré le 8 août dernier sans que Moïse Katumbi, exilé en Afrique du Sud depuis ses ennuis judiciaires, ait pu venir faire acte de candidature. A deux reprises, il a certes essayé de faire des incursions à partir de la Zambie, mais s’est toujours heurté à la police des frontières.

Pour tout dire, il eût été beaucoup plus utile et courageux pour l’octogénaire de prêcher la cause du porte-drapeau du mouvement « Ensemble pour le changement »  avant le dead line et de jouer de son influence auprès du chef de l’Etat pour parvenir à cette fin. Le docteur en droit maritime et aérien joue donc le médecin après la mort car on ne voit pas trop ce qui est faisable actuellement. On imagine mal en effet la commission électorale rouvrir le dépôt des candidatures juste pour permettre à l’indésirable Katumbi de se lancer dans la course.

Plus que le sort du président du tout-puissant Mazembe, pour lequel on ne peut plus grand-chose, ce qui préoccupe l’opposition aujourd’hui ce sont les conditions dans lesquelles les élections de décembre vont se tenir. Car une chose est d’avoir obtenu le renoncement de « Mobutu light » à un 3e mandat, une autre est de veiller à ce que le scrutin soit libre, équitable et transparent. Et ce n’est pas gagné d’avance, d’autant plus que Kinshasa, toujours sourcilleux sur sa souveraineté,  vient d’adresser une cinglante fin de non-recevoir à la nomination de l’ancien président sud-africain Thabo Mbeki  comme émissaire spécial de la première puissance du continent dans les Grands Lacs. Sa désignation semblait pourtant avoir été actée lors du dernier sommet de la SADC, qui s’est achevé le 18 août à  Windhoek en Namibie.

 

Hugues Richard Sama

Dernière modification lemercredi, 22 août 2018 21:10

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