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Sénégal : Peine corsée et salée pour Khalifa Sall

 

Ç’en est fini, ou presque, des ambitions présidentielles de Khalifa Sall : la Cour d’appel de Dakar vient en effet de confirmer sa condamnation en première instance. En rappel, emprisonné depuis mars 2017, il a été condamné en février dernier par le Tribunal de grande instance de Dakar à une peine de cinq ans de prison et à une amende de 5 millions de FCFA pour faux et escroquerie sur fonds publics.

 

 

Dénonçant une procédure expéditive pour le rendre inéligible à l’élection présidentielle de février 2018, les avocats de Khalifa Sall avaient alors fait appel et saisi la Cour de justice de la CEDEAO. En fin juin, cette dernière avait rendu un arrêt stipulant que l’illustre prisonnier de Dakar- Rebeuss n’avait pas eu droit à un procès équitable. Forts de cet arrêt de la Cour de justice de l’organisation sous-régionale, ses avocats avaient exigé sa libération et l’annulation de toute la procédure par la Cour d’appel de Dakar. A l’évidence, ils n’ont pas été suivis par le juge de la Cour d’appel. Celui-ci a non seulement confirmé les peines retenues par son homologue en première instance, mais corsé la peine du prévenu en acceptant la constitution de partie civile de l’Etat sénégalais. En conséquence de cela, Khalifa Sall et deux de ses coaccusés sont condamnés à rembourser solidairement 1,830 milliard de FCFA à l’Etat du Sénégal en dommages et intérêts.

 

Cette peine corsée et salée pour Khalifa Sall est un boulet qui vaut son pesant de handicap pour un politique qui n’a jamais fait mystère de son intention de concourir à l’élection présidentielle de février 2019 ; unhandicap lourd à porter pour l’ancien maire de Dakar qui, dans la gestion de la capitale sénégalaise, avait fait montre d’une grande capacité managériale au point d’impressionner les responsables du Parti socialiste sénégalais. C’est logiquement qu’ils entendaient en faire leur candidat pour défier Macky Sall à la prochaine présidentielle. Cela explique-t-il les tuiles judiciaires qui lui tombèrent sur la tête ? En tout cas, plus d’un observateur de l’échiquier politique sénégalais, à la suite de ses avocats, y voit la main cachée du président de la République, futur candidat à sa succession, qui instrumentaliserait la justice pour régler le compte à ses opposants les plus redoutables.

 

A ce jeu de « tu me gênes politiquement, je te casse judiciairement », le Sénégal n’a pas inventé la roue, et Khalifa Sall n’est pas seul sur la sellette. On y voit aussi Karim Wade victime de la fameuse Cour de répression de l’enrichissement illicite dont la création a été inspirée par Macky Sall. Aujourd’hui réfugié au Qatar, Karim Wade ne manque pas d’occasion pour brocarder le régime de Macky Sall et sa propension à embastiller ses opposants ou à trouver des artifices pour plomber leurs ambitions présidentielles. Ainsi après les ennuis judiciaires qui pourraient disqualifier Karim Wade et Khalifa Sall, le passage en force sur la nouvelle loi électorale, qui exige désormais le parrainage d’au moins 0,8% du corps électoral réparti dans 7 des 14 régions du pays, ce sont d’autres concurrents sérieux de Macky Sall qui pourraient ne pas prendre le départ de la course à la magistrature suprême. On pense à Idrissa Seck, à Tanor Dieng ou à Barthélémy Dias.

 

Dès lors, on se pose légitimement la question de savoir si Khalifa Sall a vraiment trempé les moustaches dans la soupe infecte de l’escroquerie sur fonds publics. Si oui, le timing de ses procès ne corrobore-t-il pas une cabale politique orchestrée par qui l’on sait dans l’espoir de faire invalider sa candidature à la présidentielle ? En tout cas Khalifa Sall s’y est déjà déclaré candidat le 26 juillet dernier, et on suppose que ses avocats tenteront un coup de poker en jouant leur dernier atout : le recours en cassation de la décision de la Cour d’appel.Pour quel résultat ? On attend de voir.

Zéphirin Kpoda

Dernière modification ledimanche, 02 septembre 2018 15:21

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