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Prestation de serment IBK : Attention aux lendemains de fête !

C’est comme si les deux principaux protagonistes de la dernière présidentielle malienne, Ibrahim Boubacar Keïta (IBK) et Soumaïla Cissé, avaient décidé de jouer les prolongations après le coup de sifflet final.

 

En effet, après que la commission électorale et les observateurs internationaux ont reconnu la victoire du premier, malgré des « dysfonctionnements » sans incidence majeure sur l’issue du scrutin, pour reprendre l’expression consacrée, et même après la proclamation officielle des résultats  par la Cour constitutionnelle, le second n’en a cure et ne reconnaît toujours pas la victoire du président sortant.

Mieux, le chef de file de l’opposition malienne a tout simplement appelé ses militants à la résistance à ce qu’il considère comme un hold-up électoral. C’est ainsi que chaque week-end, ses partisans ont décidé de descendre dans la rue aussi bien à Bamako que dans différentes localités du pays pour crier haro sur le « baudet » IBK, lequel n’entend pas se laisser faire dans ce troisième tour de la présidentielle qui ne s’effectue pas dans l’isoloir mais dans la rue.

Comme du berger à la bergère, IBK, en réponse à la grande marche samedi des soutiens de « Soumi », a lâché ses troupes dimanche où selon les organisateurs il y aurait eu plusieurs dizaine de milliers de participants dans les rues de la capitale. Jusqu’où ira ce bras de fer ? Personne ne le sait vraiment. Mais à l’allure où vont les choses, il faut craindre que ces marches et contre-marches jusque-là pacifiques tournent au vinaigre avec tout ce que cela pourrait coûter comme dégâts et même pertes de vies humaines.

C’est dans ce contexte, marqué par la peur du lendemain, que le vainqueur de l’ascension de la Colline du pouvoir prendra officiellement  fonction aujourd’hui 4 septembre 2018. Pour ses militants, ce sera une « grande fête », pour ne pas dire un « grand djandjoba ». En tout cas, nul ne doute de cela, et n’eût été le 7e sommet Afrique/Chine, qui se tient les 3 et 4 septembre 2018 à Pékin, pour sûr, on aurait assisté à un ballet d’avions présidentiels à l’aéroport de Bamako-Senou. Entendez par là que le syndicat des chefs d’Etat africains, comme on appelle par raillerie souvent l’UA, sera fortement représenté pour sabler le champagne avec IBK puisque, dit-on, ce sera une grande fête.

Mais attention, une fête passe. Les jours d’après sont souvent comme des lendemains de cuite : l’inévitable retour à la dure réalité. Et celui qui s’apprête à rempiler pour cinq ans à la tête du Mali est bien placé pour le savoir. En réalité, le vainqueur du scrutin du 12 août est passé malgré un bilan peu flatteur : la restauration de l’autorité de l’Etat, la solution au problème sécuritaire, la lutte contre la pauvreté et la corruption, en un mot le projet de société qu’il avait jadis promis à ses compatriotes n’a pas tenu la promesse des fleurs.

Pourra-t-il relever ces défis, grands comme le Mali, au cours de son ultime mandat ? Rien n’est moins sûr. Sur le plan sécuritaire, l’espèce d’embellie qu’on avait constatée avec l’accord d’Alger s’est vite dissipée, les groupuscules terroristes, sécessionnistes ainsi que les trafiquants de drogue et d’êtres humains semblent avoir repris du poil de la bête. Le Nord n’est toujours pas entièrement contrôlé par le pouvoir de Bamako, et les conflits communautaires qui explosent au centre font toujours des dizaines de victimes. L’amélioration du panier de la ménagère reste jusque-là un véritable serpent de mer, et l’indispensable réforme de l’armée n’est toujours pas opérationnelle.

Avec tous ces fardeaux qui pèsent sur les épaules du président IBK, il ne faut surtout pas compter sur une opposition républicaine pour le soutenir. Bien au contraire, Soumaïla Cissé et ses hommes ne manqueront pas d’arguments ni d’occasions pour marcher sur …les larges  et longs boubous empesés de celui qu’ils considèrent comme un « usurpateur ».

Mais l’opposition aurait tort de faire de l’anti-IBK son principal cheval de bataille pour conquérir le pouvoir. Elle doit d’ores et déjà remobiliser ses troupes pour les prochaines législatives qui se tiennent les 28 octobre et 18 novembre 2018, et qui sait si elle ne pourra pas se constituer une majorité à l’Assemblée nationale et forcer le locataire du palais de Koulouba à la cohabitation. 

 

Hugues Richard Sama

Dernière modification lemardi, 04 septembre 2018 18:43

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