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Après 3 jours d’audition : Le lieutenant Limon n’abandonne pas la théorie du complot

 

Au troisième jour de l’audition du lieutenant K. Jacques Limon, il évoque toujours la théorie du complot contre sa personne. Pour le démontrer, il a brandi la facture du règlement de l’expert Sanfo, libellée en euros. Il fait noter que l’expert a perçu plus que ce qui lui revenait (334 euros de plus). Le 11 septembre, c’est le lieutenant A. Gislain Honoré Gorgo qui lui a succédé à la barre.

 

 

 

 

Sauf omission, il est le premier inculpé dans le dossier du putsch à passer durant trois jours à la barre. Sa ligne de défense n’a pas changé. A la troisième journée d’audition, le lieutenant Jacques Limon évoque toujours « la thèse du complot».

 

Me Paul Kéré est le premier à se prononcer en cette matinée du 11 septembre. Pour lui, il faut être collé le plus intimement possible aux règles du droit. « Il faut que vous ayez à l’esprit le temps. Le coup de force était parfait. On ne peut pas reprocher à un accusé des faits après que l’action est consommée. C’est avant le coup que les actes sont planifiés », relève Me Kéré. S’adressant au tribunal il a souhaité qu’en temps opportun le bon de commande de la passation de marché soit produit, car il est utile à la manifestation de la vérité. « Il faut que la décision colle aux faits », a-t-il conclu avant de céder la parole à Me Mamadou Sombié, l’avocat de l’accusé. « De la complicité, il n’en est rien. Celui qui a fait le coup de force était l’homme le plus renseigné, le plus informé », a poursuivi le conseil de l’accusé. Au passage, il a demandé au tribunal de formuler un mandat de dépôt contre l’expert.  Une requête à laquelle le parquet a indiqué ne pas avoir les attributions de poursuite des actes de corruption. «Le marché public n’est pas étroitement  lié au dossier du lieutenant Limon», a soutenu le procureur. Si pour la défense le coup de force était déjà fait et qu’il n’y a pas de logique dans les SMS, la position du parquet tranche nettement. «Nous n’avons pas la même lecture des faits. L’attentat à la sûreté de l’Etat est une infraction continue. Pendant que certains cherchaient à faire échouer le coup de force, d’autres tentaient de l’asseoir.  Les SMS y ont contribué de façon utile », a expliqué le ministère public. Puis, le procureur s’est évertué à démontrer la logique des SMS du lieutenant. « Fermez toutes les radios locales, surtout Oméga. Elle a effectivement reçu une visite du RSP. Aucune radio ne doit encore appeler les gens à sortir marcher. Effectivement tout cela s’est manifesté sur le terrain », a fait remarquer le ministère public.

 

« La fraude corrompt tout »

 

 

 

Brandissant toujours la théorie du complot, le lieutenant K. Jacques Limon a présenté au tribunal la facture de l’expert Sanfo Younnassa, libellée en euros.  Limon a expliqué aux juges qu’il y a une différence de 234  euros sur cette facture. « C’est un détournement de fonds », a-t-il affirmé avant de soutenir qu’un renseignement militaire se traduit en volume, nature, attitude et par la position géographique.

 

Son avocat a estimé que l’expert, qui a libellé sa facture en euros, doit être poursuivi pour fraude fiscale, car il n’a pas payé la TVA.  Toujours pour prouver la thèse du complot, il a attaqué la page 2 du rapport d’expertise : en effet, il a expliqué que l’expertise concerne le portable du capitaine Dao alors qu’on lui dit qu’il a échangé avec le capitaine Zoumbri. « Le général a été escorté ici par la gendarmerie. Mais je ne vois aucun gendarme à la barre ici », s’est-il offusqué.  Parlant du rapport d’expertise, il est formel que c’est un faux document et que les SMS sont fabriqués de toutes pièces. « N’insistez pas », a-t-il demandé au parquet qui voulait une fois de plus le questionner sur les SMS. Me Sombié a fait savoir au tribunal que l’expertise ne peut pas être opposée à leur partie. « Dans la facture, il y a un intérêt privé indu. Il a été payé au-delà de ce qui lui revenait.  Est-ce qu’il y a encore un intérêt à accorder un crédit à cette expertise ? La bonne logique voudrait qu’on renonce à ce document. Les Romains, qui ont fondé le droit, disent que la fraude corrompt tout. Ce travail ne peut plus avoir du crédit», a soutenu le conseil du lieutenant Limon en déclarant qu’il n’y a plus lieu de poursuivre le lieutenant K. Jacques Limon.

 

Après trois jours d’audition, le lieutenant a cédé la place au commandant adjoint du GUI (Groupement des unités d’intervention).  Le lieutenant Aliou Gislain Honoré Gorgo, né le 5 octobre 1985 à Bobo, au moment des faits, était le commandant adjoint du GUI du RSP. Il est reproché à ce célibataire et père d’un enfant des faits de complicité d’attentat à la sûreté, coups et blessures volontaires et meurtres de 13 personnes. Mais il a nié tous les faits et retracé son emploi du temps au moment du putsch et ce qu’il a posé comme actes. « Le 16 septembre, j’étais dans mon bureau quand le chef de corps par intérim m’a appelé pour savoir ce qui se passait au camp Naaba Koom II. Je suis sorti et j’ai vu le sergent-chef Adama Zerbo en tenue de sport avec un PA. J’ai voulu savoir ce qui se passait et il m’a dit de repartir dans mon bureau et que je saurais ce qui se passait », a introduit le commandant adjoint du GUI avant d’en venir à la rencontre avec le général Gilbert Diendéré. « Le général a dit qu’il était désolé de ne  pas avoir prévenu, car ce genre de chose, on ne peut pas le dire à tout le monde. Les hommes ont fait cas de leur frustration, de la manière dont on vilipendait leur corps », a rapporté le lieutenant.

 

Ensuite, il a dit avoir consacré la journée du 17 septembre à faire rentrer les éléments récalcitrants et à bloquer les moyens.  Selon son témoignage, un soir, une dizaine d’hommes (classe 2013) armés sont venus lui faire part de leur volonté d’aller attaquer la gendarmerie et il leur a enjoint d’aller déposer les armes. Ce qu’il a aussi fait sur instruction du chef de corps, c’est d’envoyer une patrouille à la place de la Nation pour l’occuper, car il était dit que des organisations de la société civile (OSC) étaient divisées, les unes voulant manifester et les autres contre-marcher.

 

Devant les juges, le lieutenant Gorgo a soutenu qu’il a été menacé.  « Au moment des faits, si tu tentais de faire quelque chose on allait t’abattre. » Pour lui, c’est un groupuscule de récalcitrants et le général qui ont perpétré le coup de force. Des déclarations qui sont conformes à sa déposition. Si le parquet a estimé que cette cohérence est liée au fait qu’il était assisté durant les interrogatoires en phase d’instruction, l’accusé, lui, a soutenu que c’est parce qu’il dit simplement la vérité.

 

L’audition du lieutenant A. Gislain Honoré Gorgo se poursuit ce matin à 9 heures.

 

 

 

San Evariste Barro

 

Lévi Constantin Konfé

 

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