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Sortie du président de la CENI : Des commissaires dénoncent « un show médiatique » pour dire des contrevérités »

« Un show médiatique solitaire et sans fondement », c’est ainsi que cinq des commissaires qui ont produit le mémorandum sur le fonctionnement de la Commission électorale nationale indépendante (CENI) ont qualifié la sortie du président de l’institution, Newton Ahmed Barry, le mardi 25 septembre 2018. Dans cette déclaration rendue publique le 2 octobre 2018, ces commissaires estiment que cette sortie est la preuve de « la chevauchée solitaire » dont le président fait montre depuis qu’il est à la tête de la Commission. Nous vous proposons in extenso cette déclaration.

 

 

“Monsieur le Président de la Commission électorale nationale indépendante (CENI), « la vérité est comme les rayons du soleil, on ne peut la cacher avec la main ! ». A travers les médias, nous avons pu suivre, le mardi 25 septembre 2018, une déclaration que vous avez livrée à l’opinion nationale (par l’utilisation de l’expression «chers compatriotes»), déclaration par laquelle, nous, commissaires soussignés, avons compris qu’il s’agissait de votre réaction suite au mémorandum portant sur le fonctionnement de la CENI, mémorandum que nous vous avons adressé le 17 août 2018.

C’est le propre de toute structure de se bonifier dans la domination, par mobilisation des capacités endogènes, des difficultés inhérentes à toute organisation humaine. La CENI n’échappe pas à cette observation élémentaire. C’est rendus à cette école de management que nous avons humblement cru qu’il était possible, sinon qu’il était du devoir des commissaires de toujours faire montre d’une capacité à harmoniser leurs vues, en référence à l’intérêt supérieur de la Nation, pour une réussite de la mission à eux confiée. Et le cadre approprié pour de tels challenges est la plénière des commissaires.

Les solutions trouvées aux difficultés qui y sont débattues servent ainsi de matériaux à l’élaboration des outils de pilotage de la structure en vue de rendre son fonctionnement plus dynamique et efficient, d’une part, et de prévenir les écueils futurs, d’autre part. Ce n’est ni moins ni plus ce que nous avons souhaité par l’adresse de notre mémorandum.

Monsieur le Président, il n’en a pas fallu plus pour déclencher une fébrilité rendue par des propos acerbes et injurieux qui n’honorent pas la fonction que vous occupez. Nous tenons alors pour acquis que l’art de la plongée boueuse fait partie du tableau de vos valeurs mais nous refusons délibérément de vous y suivre ; tant nous cultivons d’autres jardins !

Outre la singularité de votre démarche (I), qui a consisté en une adresse publique et solennelle à l’opinion publique, pour réagir à un mémorandum qui vous est adressé sur des problèmes internes à une structure, la prolixité verbale et captieuse de cette déclaration (II) nous prescrit l’obligation, par respect pour cette même opinion, de la délivrer de l’opium sophiste avec lequel vous tentez de l’ensevelir.

 

I.           De la singularité de votre démarche

 

Monsieur le Président, de mémoire national, c’est une première que le Président de la CENI, interpellé sur des questions de fonctionnement interne, s’emploie à faire dans une chevauchée lyrique à travers une déclaration pour laquelle la presse, invitée à coups de publicité, n’a pu que juste vous « admirer » dans votre déclaration solitaire derrière le pupitre.

La gestion solitaire que nous avons dénoncée dans le mémorandum est également illustrée de la plus parfaite et achevée manière par le fait qu’ayant reçu le mémorandum, vous n’avez pas daigné en informer les commissaires, ne serait-ce que par voie téléphonique ; pas plus que vous ne les ayez considérés en leur soufflant mot sur votre décision d’orchestrer votre show médiatique. L’évidence qui pourrait se dégager de cette chevauchée solitaire est que le contenu du mémorandum traduit la réalité des faits et est partagé au-delà des frontières que vous tracez juste dans la limite des signataires.

En cultivant la paranoïa du complot politique contre vous, au lieu de vous en ouvrir à des citoyens de haute teneur en impartialité politique, ne serait-ce que supposée, vous n’avez pas manqué de consulter et d’appeler à votre secours des personnes dont les bords partisans sont de notoriété publique ; mieux, apparaît dans votre déclaration un flagrant délit de partialité, traduit par votre invective contre une personnalité politique dont il n’a été aucunement question dans notre mémorandum ! Mais enfin, là n’est pas notre sujet.

 

II-           Du caractère captieux de votre déclaration, truffée de contrevérités

 

Monsieur le Président, dans votre « importante déclaration » annoncée à coups de publicités, au lieu d’apporter les réponses sur les points de dysfonctionnement relevés par des commissaires, vous avez préféré vous auréoler, à l’image de cet ancien soldat qui passe son temps à raconter ses hauts faits de guerre, dont lui seul était témoin.

Faut-il rappeler à votre bon souvenir que le peuple burkinabè a connu des citoyens dont la mémoire force la déférence, tels Thomas Sankara, Norbert Zongo et nous en oublions, qui ont professé, leur vie durant, les valeurs d’honneur, de dignité et d’intégrité sans jamais se vanter d’en être le concentré ici-bas, laissant le soin à leurs concitoyens de les juger ?

Etant à court d’arguments à opposer aux préoccupations soulevées et préoccupé cependant par votre égo, il ne vous restait que la solution de duper l’opinion publique par des contre-vérités auxquelles nous apportons des démentis.

 

De l’assurance-maladie du personnel de la CENI

 

Monsieur le Président, l’autobiographie altruiste et narcissique de votre déclaration indique, à souhait, à l’opinion, combien du haut de votre statut de Président d’institution, vous avez la latitude, ou de distribuer des subsides sous forme d’assurance-maladie à vos collaborateurs, ou de vous enrichir en vous appropriant ce que vous obtenez comme avantages de par votre position.

Dans vos révélations sur ce sujet, qui n’a d’ailleurs pas fait l’objet de notre mémorandum, vous avez avancé que le personnel bénéficie de ce service grâce à votre magnanimité de bon samaritain. Vos propos sont là pour le rappeler : « Depuis deux ans que je suis à la tête de la CENI, avec ces facilités que me procure ma position, j’ai dynamisé la mutuelle des travailleurs de la CENI, pour assurer à 329 personnes, les travailleurs, leurs conjoints et leurs enfants, une assurance-maladie à 100%. (…) Chaque année je réunis une cinquantaine de millions pour assurer cette assurance-maladie à tous ».

Au cas où vous ne le sauriez pas, le personnel et les commissaires contribuent au financement de cette assurance-maladie ; les commissaires, que nous sommes, y ont participé individuellement à hauteur de près de 200 000 FCFA l’année dernière et un peu plus pour l’année en cours. Les documents comptables qui l’attestent sont disponibles.

Monsieur le Président, rappelez-vous que la question du financement du complément de la cotisation pour l’assurance a même été posée par un commissaire, non signataire du mémorandum et non membre de l’Opposition. Par une réponse chargée de colère, vous avez lâché que «nous verrons avec certains partenaires de la CENI».

Des partenaires de la CENI sont-ils devenus des partenaires du citoyen Newton Ahmed Barry qui met gracieusement ce qu’il gagne à la disposition de 329 personnes ? Avez-vous une fortune personnelle qui vous autorise à développer un tel élan de générosité à l’endroit du personnel de la CENI ? Monsieur le Président, un peu de respect pour vos collaborateurs ! Rétablissez la dignité des travailleurs de la CENI qui seraient, à vous croire, d’heureux lauréats de votre mansuétude et des « facilités que vous procure votre position ».

 

De la supposée influence du politique sur les commissaires

 

C’est dans la revendication de l’homme vertueux de la République de Platon que vous estimez que les commissaires sont incapables de poser un problème à la suite d’un diagnostic fait par eux-mêmes et qu’ils sont « téléguidés » de l’extérieur. Suprême injure qui administre, s’il en était encore besoin, la preuve que vous n’avez pas d’égards pour vos collègues commissaires et qui justifie votre style de gestion.

Souvenez-vous, Monsieur le Président, que des commissaires, toutes composantes comprises, vous ont suggéré de changer votre style de gestion et que, excédé par la surdité que vous affichez par la poursuite de votre gestion solitaire, un commissaire, non signataire du mémorandum, a failli porter la main sur vous. Etait-il téléguidé de l’extérieur parce qu’il avait osé décrier ce que nous dénonçons aujourd’hui ? Dans notre mémorandum, nous avons dénoncé une gestion solitaire, autocratique et une gestion financière à questionnement.

Monsieur le Président, il est une habitude et une inconduite notoire de certaines personnes, qui se disent intellectuelles, de croire toujours à une main invisible chaque fois que des citoyens, de surcroît des collaborateurs, refusent le diktat d’un homme hissé au sommet de leur institution par une commune volonté, pour lui rappeler les règles de bienséance et d’intelligence institutionnelle. Vos collègues commissaires n’ont pas besoin d’avoir un répétiteur pour savoir quel mot prononcer ou comment le faire. Vous avez certainement eu l’occasion de vous en apercevoir à plusieurs reprises.

 

De la plateforme multicanal de révision du fichier électoral

 

Monsieur le Président, la vérité a pour caractère la transparence.

Sur la défense de la plateforme, l’amour filial et l’ardeur du labeur vous ont conduit à confirmer et aggraver les contre-vérités qu’il nous plaît de relever.

Sur les coûts comparatifs des deux méthodes d’enrôlement, vous avez avancé dans votre déclaration que l’enrôlement suivant la formule ancienne coûterait aux contribuables 9 milliards pour les électeurs de l’intérieur seulement et 15 milliards si on prend en compte la nécessité de constituer le fichier électoral des Burkinabè résidant à l’extérieur. A ces montants vous opposez celui de 1,5 milliard pour l’enrôlement par la plateforme multicanal.

Mais il vous souviendra que lors des concertations entre le Président du Faso et la classe politique, vous aviez fait une présentation d’un tableau qui faisait ressortir un coût de 21 milliards pour l’enrôlement suivant la formule ancienne contre plus de 5 milliards pour la plateforme.

Ensuite, à notre connaissance, les prévisions budgétaires, sur la base des chiffres communiqués en plénière (par vous, suivant quelle étude ?), pour la simulation du scénario d’enrôlement par la plateforme étaient de 5,6 milliards. A ce montant il faut ajouter une omission de 1,8 milliard, car, selon vous, il faut acquérir impérativement une technologie ABIS et un équipement y relatif qui n’avaient pas été prévus.

Puis, il faut prendre en compte le budget de 1,2 milliard que vous avez présenté au Gouvernement pour l’établissement et la délivrance des récépissés prévus par l’article 50 du Code électoral modifié. Au total, cela fait déjà 8,6 milliards comme coût de l’enrôlement par la plateforme, et ce montant pourrait évoluer vers la dizaine de milliards si l’on considère d’autres frais comme ceux relatifs à l’étude et aux appels téléphoniques par exemple.

Monsieur le Président, nous constatons que, face à trois tribunes, vous donnez différents chiffres pour la même activité. Alors, à qui n’avez-vous pas dit la vérité ?

En outre, dans votre déclaration, vous évoquez le budget de 9 milliards nécessaires pour l’enrôlement suivant la formule classique. En 2015, l’opération a été conduite par la CENI avec un budget de 7,2 milliards. A l’évidence, vous avez gonflé les chiffres de l’opération d’enrôlement par la formule ancienne et vous en avez réduit pour la plateforme, avec pour dessein d’amener les décideurs à accueillir sans réserve votre joujou.

Avez-vous le droit d’induire en erreur le chef de l’Etat, la représentation nationale, la classe politique, les organisations de la société civile, bref le peuple, en les amenant à prendre des décisions sur la base d’informations sciemment manipulées ? Sous d’autres cieux et après pareille forfaiture, même « s’étaler dans la poussière devant le chef de l’Etat » constituerait un honneur auquel vous ne pourriez plus prétendre.

Monsieur le Président, le surplus de votre mémoire en défense de la nouvelle plateforme appelle également des commentaires que nous estimons, pas plus que la défense d’ailleurs, ne pas être de notre ressort. Dans votre déclaration, vous écriviez ceci : « Pourquoi malgré les opérations successives d’enrôlement de 2012, 2014 et 2015, le fichier électoral reste toujours squelettique, loin de réunir le maximum des électeurs qui devraient y figurer » ?

Comme réponse, vous appuyant sur un diagnostic personnel que vous dites « confirmé par des avis avisés », vous estimez qu’il faut changer de mode d’enrôlement, notamment le dispositif technique. Comment, sur la base de simples avis qui ne se réfèrent à aucune recherche scientifique sérieuse connue, peut-on s’orienter avec empressement vers une telle option d’enrôlement ? Même l’étudiant le moins doué en sciences politiques interrogerait les facteurs sociologiques, psychologiques, culturels, politiques, historiques et anthropologiques avant d’explorer votre proposition dont les risques ne sont pas appréhendés, même par ses concepteurs.

Monsieur le Président, à propos de l’adoption formelle de la plateforme par les commissaires, vous écriviez dans votre déclaration : «Les procès-verbaux de ces différentes délibérations sont là, produits du reste par les commissaires de l’opposition. Ils attestent les différentes discussions autour des réformes que nous mettons en œuvre (…) Ces textes sont-là, j’invite tous les journalistes d’investigation à venir les éplucher et à témoigner pour l’avenir ».

Ici aussi, nous pouvons relever deux contrevérités : les procès-verbaux de nos discussions en réunion ne sont pas produits que par les rapporteurs de l’opposition. Avez-vous oublié la composition du bureau telle que précisée par le Code électoral ? Il y est dit qu’il y a, dans le bureau de la CENI, deux commissaires rapporteurs dont l’un issu de l’Opposition politique et l’autre de la Majorité. Vous demandez à la presse de passer consulter les P-V qui consignent les délibérations des plénières sur les réformes à opérer et notamment sur l’adoption de la plateforme.

Nous rapportons ici un commentaire que vous avez écrit en réaction à celui d’un internaute sur Facebook : « A la CENI, nous ne votons pas. Nos rencontres sont sanctionnées par des P-V consultables. De la même façon, la carte consulaire dont ils disent que nous avions retenue (sic) n’a jamais fait l’objet de délibérations spécifiques, de la même façon sur la plateforme technique nous n’avons pas fait de délibérations spécifiques». Ce commentaire, qui contredit votre déclaration peut être vérifié à notre niveau, si accidentellement quelqu’un venait à le supprimer.

Un point que nous vous concédons, dans votre déclaration, c’est qu’effectivement, « verba volant scripta manent » traduit en ces termes : « Le verbal s’envole et l’écrit demeure ». C’est pourquoi il vous a été demandé à plusieurs reprises de sortir ces procès-verbaux portant adoption de la plateforme, requêtes qui n’ont jamais eu de suite.

Par contre, il est vérifiable que la CENI a adressé une requête au MINEFID pour une rallonge budgétaire de 70 millions pour l’entretien du matériel ayant servi à l’enrôlement suivant la formule connue, matériel toujours stocké dans les magasins de l’institution. L’avons-nous fait juste pour créer une dépense injustifiée à la charge du contribuable, sachant que le matériel, acquis à plusieurs milliards, ne sera plus utilisé ?

Mieux, Monsieur le Président, ce que vous avez omis de dire sur la plateforme, c’est son fonctionnement. Il consiste d’abord à prendre des données avec l’Office national d’identification (ONI) et d’en extraire les personnes qui auraient l’âge de voter, donc la majorité électorale ; ensuite, ces nouveaux majeurs seront contactés par SMS ou appel téléphonique en français ou en trois langues nationales, à savoir le mooré, le dioula et le fulfuldé ;

or, au Burkina Faso, le taux d’analphabétisme est très élevé et plus d’une soixantaine de langues y sont parlées. Procéder ainsi serait donc une manière de dire à ceux qui ne savent ni lire ni écrire, qui n’ont pas de téléphone et à ceux qui ne parlent aucune des langues citées qu’ils ne peuvent pas être enrôlés parce qu’on ne peut pas communiquer avec eux ou qu’ils sont injoignables du fait de la qualité des réseaux téléphoniques.

En outre, la CENI devrait dépêcher des équipes sur le terrain à la recherche des nouveaux électeurs enrôlés pour leur remettre leur récépissé qui n’est ni plus ni moins qu’une carte d’électeur. En effet, l’échantillon du récépissé présenté a les mêmes informations et le même format que la carte d’électeur à l’exception de la photo, qu’il ne comporte pas. C’est cela la plateforme, votre trouvaille dont vous vantez les mérites. Comme on le dit « juge unique, juge inique ». Contrairement à ce que vous écrivez dans votre déclaration, tous ces points ont justifié des objections émises par des commissaires.

Monsieur le Président, dans votre autobiographie, vous vous présentez comme un patriote soucieux de la saine gestion des deniers publics. Et, à ce titre, il est légitime de vous interroger sur le coût de nos élections comme vous le faites en ces termes : « Dans un pays où les hôpitaux ne peuvent pas s’équiper de simples appareils de dialyse à moins d’un milliard, perpétrer ce gaspillage est un crime monstrueux contre le peuple ». Nous sommes en phase avec votre questionnement d’où la pertinence que vous devez admettre de l’interrogation sur les intérêts en jeu pour la location du VSAT qui coûterait près du milliard comme nous l’avions relevé dans notre mémorandum ?

 

De la gestion financière à questionnement

 

Monsieur le Président, nous avons, de bonne foi, émis des interrogations sur votre gestion financière. Nous n’aurions pas dû, selon vous, puisque cela nous a valu d’être qualifiés de « calomniateurs », de commissaires « téléguidés » de l’extérieur, de producteurs de « ragots et d’immondices ». Heureusement que les enfants ne lisent pas ce genre de littérature.

Après cela, vous avez bien voulu inviter les organes de contrôle de l’Etat à auditer la gestion des finances de la CENI, ce qu’ils allaient faire de toutes les façons, même sans votre invitation, au regard de leurs attributions. Mais on s’attend à ce que, en phase avec certains principes et surtout avec certaines valeurs que vous clamez en vous, vous ne soyez retenu par rien et offriez de vous retirer momentanément pour permettre un travail serein des auditeurs.

Au passage des auditeurs, ils noteront que les commissaires ont dû adopter, sans examiner (et cela ne doit plus se reproduire), le rapport financier des élections municipales partielles et complémentaires de mai 2017 et ce, parce que le document tel que présenté ne leur permettait pas de l’étudier.

Vous avez d’ailleurs organisé votre défense sur la question en assurant aux commissaires que la Cour des Comptes avait fait un contrôle préalable, sur votre invitation, et qu’elle avait déclaré que la gestion du budget de ces élections était irréprochable. Nous invitons les journalistes et les compatriotes à aller constater auprès de ladite Cour que la CENI ne figure pas dans la liste des institutions contrôlées par elle en 2017.

Monsieur le président, vous informez l’opinion qu’au cours de la plénière des commissaires du 24 août 2018, vous avez « exposé la feuille de route (…) pour que nous puissions procéder à la révision du fichier électoral ». Sur cette feuille de route, vous indiquez que la réception de la plateforme construite était prévue pour le 30 octobre et l’enrôlement pour le 15 novembre 2018. Les compatriotes ont dû noter que la CENI n’a pas publié un seul dossier d’appel d’offres relatif ni à la construction de cette plateforme, ni à l’acquisition du matériel et solutions informatiques nécessaires.

Et pourtant, des livraisons sont prévues avec une période de moins de trois mois entre votre annonce et la réception projetée (24 août, date de l’annonce, et 30 octobre, date probable de réception). Quelle procédure a-t-elle alors été utilisée ? Qui est attributaire, dans quelles conditions l’a-t-il été ? Quel a été le rôle de la plénière des commissaires et du ministère de l’Economie, des Finances et du Développement dans cette attribution ?

En somme, sur quelle base légale repose la passation de ces marchés ? Les autres commissaires le savent-ils ? Les signataires de la présente, en tout cas, n’ont pas souvenance d’une quelconque autorisation de la plénière à le faire, encore moins de l’effectivité de la prise de l’arrêté qui définit le dispositif opérationnel de révision du fichier électoral (prévu par l’article 50 bis du Code électoral) et subséquemment les équipements à commander.

Monsieur le Président, pouvons-nous continuer ainsi ?

Pour conclure,

Monsieur le Président, de déclaration importante, vous avez fait un show médiatique suivi d’émissions radio, où vous servez des contre-vérités à l’opinion publique et esquivez les vrais problèmes. La sagesse aurait voulu qu’un débat franc soit mené à l’interne, notamment sur la relecture du règlement intérieur de la CENI et la nécessité de doter l’institution d’un manuel de procédure, choses que vous avez toujours évitées. Le témoignage des commissaires non signataires peut attester nos propos.

C’est notre franc-parler qui vous a servi de sac à convictions pour nous qualifier de «commissaires qui ont violé leur serment». Mais entre ceux qui disent les délibérations telles qu’adoptées et celui qui en prend le contrepied publiquement, qui a violé son serment, si violation il y a ?

Mais ces propos ne nous étonnent pas, car, dans votre démarche machiavélique, vous avez même proposé aux commissaires la saisine du Conseil constitutionnel pour voir constater que vos cinq collègues commissaires signataires du premier écrit ont violé leur serment par leur sortie médiatique. Evidemment, nous vous avions donné quitus si vous pensiez avoir les moyens de votre action. Vous revenez à la charge, vous avez notre quitus pour agir.

Cela étant, comme nous l’avions déjà écrit dans le mémorandum, nous vous invitons, une fois de plus à :

- vous ressaisir ;

 - suspendre l’exécution des contrats passés en lien avec un mode opératoire d’enrôlement, mode non encore examiné en plénière ;

 - convoquer dans les délais les meilleurs une plénière des commissaires consacrée à la relecture de l’arrêté n°2016-012/CENI/CAB du 02 septembre 2016 portant organisation et fonctionnement de la CENI, d’une part, et à l’élaboration d’un manuel de procédures, d’autre part.

Respectueusement ».

 

Fait à Ouagadougou, le 1er octobre 2018

 

Ont signé :

 

    Adama Kéré, Commissaire, Vice-président ;

    Idrissa Darga, Commissaire, Rapporteur ;

    Tasséré Savadogo, Commissaire ;

    Boubakar Bouda, Commissaire ;

    Samuel Ibrahim Guitanga, Commissaire.

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