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15e anniversaire mort Jean Hélène : Pour que son martyre ne soit pas vain

 Le 20 octobre de chaque année, le Burkina célèbre, et ce depuis 1998, la journée nationale de la liberté de la presse. Malheureuse coïncidence, depuis 2004, cette célébration se fait la veille d’un triste anniversaire pour la presse : celui de l’assassinat à Abidjan, le 21 octobre 2003, de Jean Hélène, correspondant de RFI et du journal Le Monde.

 

 

Jean Hélène, de son vrai nom Christian Baldensperger, est tombé sous les balles assassines d’un policier ivoirien, victime de la diabolisation de la presse, notamment française, dans une Côte d’Ivoire en proie à la guerre civile. Le 15e anniversaire de cet odieux meurtre fait remonter à la mémoire des hommes des médias les risques encourus dans l’exercice de leur métier, surtout en période de crise. Le refus de la vérité,  de la critique ; l’acrimonie, la passion partisane ; la stigmatisation du journaliste comme l’empêcheur de gouverner en rond sont autant de tares de la Côte d’Ivoire de l’époque et qui ont poussé le sergent Théodore Séri Dago à presser la détente. Il n’aura été que le bras armé de toutes ces meutes de croquants, pompeusement appelés  « les patriotes », pour qui la rébellion au nord du pays était le fruit de l’impérialisme français, soutenu par des sous-fifres de journalistes dont  ceux de RFI. Etaient au-devant de cette entreprise de sape de la légitimité des journalistes à informer sur la crise ivoirienne le FPI au pouvoir, les autorités étatiques d’alors et une certaine presse de la lagune Ebrié, plus militante qu’informative.

Pourtant, Jean Hélène, dans cette Côte d’Ivoire en crise, était resté professionnel dans son travail, à équidistance des forces belligérantes. Pour ce faire, il avait l’expérience du terrain acquise dans le conflit somalien, la guerre civile soudanaise ou encore le génocide rwandais. Son assassin avait un esprit  trop étroit pour pouvoir comprendre que la rigueur journalistique exige de ne pas toujours aller chercher l’information dans le sérail du pouvoir mais aussi et surtout auprès de petites gens, dans une neutralité objective. Jean Hélène aura payé au prix le plus fort cette recherche de l’objectivité professionnelle.

15 ans après le martyr de cet amoureux de l’Afrique, qui y aura exercé presque 15 ans de sa carrière, c’est comme si c’était hier que son bourreau lui avait tiré la balle fatale. Sa mémoire reste vive chez  tous les professionnels des médias, comme pour dire que la modestie de Jean Hélène dût-elle en souffrir, les grandes plumes ne meurent jamais. Le Burkina, patrie de Norbert Zongo, est bien placé pour le savoir.

 Au demeurant, la 20e édition de la journée nationale de la liberté de la presse qui y a été célébrée cette année avec en arrière fond les leçons du ministre de la Communication sur le traitement journalistique des problèmes sécuritaires, est une piqûre de rappel de cette nécessité pour les journalistes d’être, à l’exemple de Jean Hélène, objectifs, rigoureux, ouverts, perspicaces, modestes… Ces qualités ont fait le lit de la quintessence du style du célèbre disparu. En tout temps et particulièrement en temps de crise, les animateurs du 4e pouvoir gagneraient à s’en imprégner. C’est à ce prix que le martyr de Jean Hélène ne sera pas vain.

Zéphirin Kpoda

Dernière modification lelundi, 22 octobre 2018 23:57

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