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Justice pour Norbert Zongo: Que sont devenus les grands défenseurs de la cause ?

La mort tragique de Norbert Zongo et de ses trois compagnons d’infortune a révélé de grands combattants de la justice et de la liberté au Burkina Faso : des hommes et des femmes mobilisés pour faire triompher la vérité sur le quadruple meurtre. Issus de différents milieux, ils ont immédiatement repris le flambeau que Norbert Zongo avait allumé, œuvrant à faire jaillir la lumière sur l’autodafé de Sapouy.

Aujourd’hui, 20 ans après, que sont ces braves « avocats » devenus ? Sans être exhaustifs, nous nous arrêtons sur le cas de certains d’entre eux. Flashback donc sur le rôle que ces hommes et femmes ont pu jouer pendant la crise consécutive à ces meurtres de décembre 1998, leur parcours et leur statut actuel dans la vie sociopolitique de notre pays.

 

 

·        Me Halidou Ouédraogo :

Figure emblématique de la justice au Burkina Faso, acteur incontournable de la lutte pour les droits de l’Homme…, Me Halidou Ouédraogo reste une personnalité aux multiples casquettes. Celui qui fut, entre autres, président du MBDHP, de l’UIDH, a son nom intimement lié aux mouvements sociaux nés au temps fort de la crise consécutive à la mort du journaliste Norbert Zongo et de ses compagnons d’infortune en rade de Sapouy. Le rôle qu’il a joué dans le Collectif des organisations démocratiques de masse et de partis politiques est déterminant. Son engagement l’a d’ailleurs poussé à se consacrer à plein temps au monde des OSC après avoir servi à la fonction publique 29 ans durant comme magistrat.

Libre de toute obligation comme fonctionnaire de l’Etat burkinabè, Me Halidou Ouédraogo s’est inscrit au tableau de l’Ordre des avocats le 15 avril 2005, après avoir prêté serment comme avocat titulaire.

Très actif dans le monde des OSC, il est le président de la Convention pour l’observation domestique des élections (CODEL).

Et ce n’est pas tout ! L’homme est aussi le président de la Commission constitutionnelle. Une instance officiellement installée courant septembre 2016 avec pour mission de rédiger l’avant-projet de la nouvelle Constitution pour le passage à la Ve  République au Burkina.

Avec une santé aujourd’hui relativement fragile, et très touché par le décès de sa fille dans l’accident du vol AH5017 d’Air Algérie le 24 juillet 2014, l’ancien patron des TPR est aujourd’hui en retrait de l’activisme militant. Il dirige néanmoins l’association des familles des victimes burkinabè de ce drame.

 

·        Pr Joseph Ki-Zerbo :

Natif de Toma dans la province du Nayala, région de la Boucle du Mouhoun, le Pr Joseph Ki-Zerbo est un illustre historien qui a aussi consacré une grande partie de sa vie à la lutte politique. Son ultime combat est celui mené contre l’impunité au sein du Collectif créé au lendemain de la mort du directeur de publication de L’Indépendant, le 13 décembre 1998.

Grand orateur aux formules et proverbes africains chocs, il est l’auteur du fameux aphorisme en dioula : « Nan lara, an sara (Si on se couche, on est mort). Prononcé lors des meetings dans l’affaire Norbert Zongo, ce slogan continue encore de rythmer aujourd’hui les messages de mobilisation des syndicats burkinabè, pendant leurs différents meetings de revendication et de protestation.

Intellectuel africain, agrégé d’Histoire, opposant burkinabè… Ki-Zerbo, décédé le 4 décembre 2006 à 84 ans, repose dans sa ville natale auprès des siens.

 

·        Newton Ahmed Barry :

Au bimensuel « L’Evènement », Newton Ahmed Barry (NAB), avec Germain Bittiou Naba, se montre un fervent acteur de la lutte pour la manifestation de la vérité et de la justice sur l’assassinat de leur confrère et la poursuite de son combat.

Au moment des faits, NAB était directeur de la communication de la Chambre des Représentants. Sa prise de position sur ces meurtres fut sans équivoque. Son engagement contre l’injustice, pour les droits humains et la démocratie, avait-il confessé, était trop fort, trop pressant. Il signe alors des articles l’un après l’autre sur le drame de Sapouy. L’un d’eux, paru dans L’Observateur Paalga, et intitulé : « Assassinat de Norbert Zongo : Si le pouvoir n’est pas coupable, il est responsable », lui coûte la suspension de son salaire. NAB ne se fait pas prier. Il démissionne de la fonction publique et s’affiche ouvertement dans le combat pour la liberté, la justice et la démocratie au Burkina.

Présentement, Newton Ahmed Barry, représentant de la Communauté musulmane au sein de la Commission électorale nationale indépendante (CENI), en est le président. Avant cette promotion, l’ancien rédacteur en chef de L’Evènement a brigué sans succès le poste de président de la Transition, et celui de directeur général de la Radio-télévision du Burkina (RTB).

 

·        Germain Bittiou Nama :

L’important rôle joué pour la manifestation de la vérité dans l’assassinat de Norbert Zongo par le cofondateur du journal L’Evènement, Germain Bittiou Nama, ne souffre d’aucun débat.

Membre fondateur du MBDHP dont il a été le président de la commission arbitrale et membre de l’IUDH, l’enseignant de philosophie fut un collaborateur de longue date du célèbre trucidé du 13 décembre 1998. C’est donc sans étonnement qu’il prend fait et cause pour la survie de son canard, L’Indépendant. Pendant près de deux ans, avec son condisciple Newton Ahmed Barry, il met tout en œuvre pour que le journal survive. Mais c’était sans compter avec les difficultés de collaboration avec les autres travailleurs de L’Indépendant.

En 2000, avec le même Newton Ahmed Barry, il fonde L’Evènement (mensuel puis bimensuel),afin de « s’engager totalement dans le combat, pour se libérer des entraves à l’épanouissement d’une presse réellement libre ».

Le 21 mars 2018, avec huit autres personnalités, Germain Bittiou Nama a été nommé membre du Conseil d’orientation de l’ASCE-LC. Pour cette fonction, il a prêté serment devant le Conseil constitutionnel le 10 juillet dernier, en même temps que les autres personnalités nommées à la même fonction.

 

·        Les femmes en noir :

Mouvement d’un groupe de femmes né au lendemain du drame de Sapouy, il avait pour but de lutter contre l’impunité et l’oubli des différents crimes. Ces femmes avaient décidé de se recueillir chaque dimanche, vêtues d’une tenue ou d’un foulard de couleur noire, sur la tombe de Norbert Zongo.

Présidé par la sœur du célèbre disparu, Georgette Rouamba née Zongo, sage-femme de profession, le mouvement comptait à ses débuts une centaine d’adhérentes qui se rendaient régulièrement au cimetière de Gounghin pour leur rituel. Difficile de savoir ce que chacune d’elles est devenue aujourd’hui. On note cependant que 20 ans après, elles ne se rendent plus au cimetière pour « pleurer ».  

 

·        Chérif Sy :

Ancien ami de Norbert Zongo, Chérif Sy,  journaliste, fondateur de l’hebdomadaire Bendré, a été membre de la Commission d’enquête indépendante (CEI) en tant que représentant de la Société des éditeurs de la presse privée (SEP). C’est cette Commission qui était chargée d’enquêter sur la mort de Norbert Zongo et de ses trois compagnons. Chérif Sy, connu pour son activisme, a pris part aux travaux de la CEI du début jusqu’à la fin, et a continué, même après les conclusions de l’enquête, à revendiquer justice pour le patron de L’Indépendant.

Au lendemain de l’insurrection populaire, des 30 et 31 octobre 2014, qui a vu le départ en exil du président Blaise Compaoré, Chérif Sy est porté à la tête du Conseil national de transition (CNT) où il reste de novembre 2014 à décembre 2015.  

Lors du coup d’Etat du 16 septembre 2015, l’homme a multiplié les appels à la résistance face aux putschistes. On n’entendait plus parler de lui depuis l’avènement du pouvoir de Roch Marc Christian Kaboré, jusqu’à ce qu’il soit nommé le 9 mars 2017 Haut représentant du Président du Faso.

                  

·        Me Bénéwendé Stanislas Sankara :

 

Avocat de la famille de Norbert Zongo, Me Bénéwendé Sankara a été un membre actif du Collectif né en 1998 pour exercer la pression sur le pouvoir et lutter pour la lumière, la vérité dans l’affaire Norbert Zongo. Il fait d’ailleurs partie des leaders de ce Collectif qui ont été arrêtés et rasés à la sûreté de l’Etat suite à une marche.

En novembre 2000, Me Sankara crée son parti, l’Union pour la renaissance/Mouvement sankariste (UNIR/MS), devenue UNIR/PS. Entre 2007 et 2012, avec les 5 élus de son parti au Parlement, il est désigné chef de file de l’opposition. Il a pris une part active à l’insurrection de 2014. Candidat malheureux à l’élection présidentielle de 2015, sa formation politique a fait alliance avec le MPP qui n’a pas obtenu une majorité au Parlement pour gouverner seul. Me Sankara est aujourd’hui 1er vice-président de l’Assemblée nationale.

 

·        Me Hermann Yaméogo :

Au moment des évènements tragiques de Sapouy, Me Hermann Yaméogo était le président de l’ADF-RDA, parti membre du Groupe du 14-Février (G-14), un regroupement de partis politiques d’opposition. Après le fatidique 13 décembre 1998, lui et d’autres responsables du G-14, dans une déclaration, ont condamné l’assassinat  du journaliste Norbert Zongo. Ils ont par ailleurs demandé qu’une enquête internationale soit diligentée pour dire la « vérité sur ce lâche assassinat ». Cet engagement du président de l’ADF-RDA  et de ses camarades pour la justice et la vérité sur le quadruple meurtre de Sapouy va leur valoir une  interpellation  et un séjour dans les geôles de la gendarmerie nationale, les 16 et 17 décembre 1998.

Aujourd’hui, ce combattant de la première heure pour que justice soit rendue à Norbert Zongo et à ses compagnons, comparaît devant la Justice militaire pour son implication présumée dans le putsch manqué de septembre 2015.

 

·        Tolé Sagnon :

Affectueusement appelé « Général » dans l’univers syndical, Tolé Sagnon est élu secrétaire général de la CGT-B, à l’issue de son premier congrès en 1998. Il sera, au sein du Collectif, à l’avant-garde de la lutte contre l’impunité, après l’assassinat du journaliste Norbert Zongo. Le « Général » et ses camarades de lutte vont organiser à plusieurs reprises des marches suivies de meeting pour exiger que toute la lumière soit faite, dans les meilleurs délais, sur la mort du journaliste et de ses compagnons d’infortune.

En 2013, au temps fort de la fronde contre le projet de modification de l’article 37 et la mise en place d’un Sénat, admis à la retraite, il passe le témoin à son dauphin, Bassolma Bazié.

 

Sous le nom de règne de Maouran, Tolé Sagnon est actuellement chef de canton de Karaborala, localité située à quelques kilomètres de Banfora dans la région des Cascades.

 

·        Kassoum Kambou :

Il a été le président de la Commission d’enquête indépendante (CEI) mise en place par le gouvernement suite aux évènements du 13 décembre 1998, après les nombreuses manifestations des populations exigeant de trouver les coupables de la mort tragique de Norbert Zongo, Yembi Ernest Zongo, Blaise Ilboudo et d’Abdoulaye Nikièma dit Ablassé. La CEI avait été dotée de moyens conséquents et de pouvoirs pour faire un travail de «fourmi» afin de trouver les coupables de l’assassinat de Norbert Zongo et de ses compagnons de voyage. D’aucuns ont accusé cette commission d’avoir «fabriqué» des «suspects sérieux», sur la base de suppositions qui avaient conditionné l'opinion publique nationale et internationale.

Kassoum Kambou a ensuite été nommé conseiller à la Cour de cassation. Il a aussi à plusieurs reprises été membre du Conseil supérieur de la magistrature (CSM). Le 11 février 2015, le président de la Transition, Michel Kafando, l’a nommé président du Conseil constitutionnel. 

 

·        Issa Tiendrébéogo :

Le secrétaire général du Groupe des démocrates et patriotes (GDP), Issa Tiendrébéogo, a été un des membres civils du gouvernement du Conseil national de la révolution (CNR). Dans l’affaire Norbert Zongo, "Issa la Bagarre", comme on le surnommait, s’est beaucoup illustré comme acteur dans la lutte du Collectif contre l'impunité. Militant influent du G-14, ce professeur de Mathématiques a tiré sa révérence le 26 janvier 2012.

 

D. Evariste Ouédraogo

Alima Séogo/Koanda

Lévi Constantin Konfé

J. Benjamine Kaboré

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