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Sanmatenga : Jour de l’an sanglant à Yirgou

 

Le nouvel an n’a pas été festif dans la commune de Barsalogho, province du Sanmatenga au Centre-Nord. En effet, dans la matinée du mardi 1er janvier 2019, des individus armés non encore identifiés ont perpétré une attaque à Yirgou, un village situé à environ 70  kilomètres du chef-lieu de cette bourgade. Bilan : 6 morts dont le chef coutumier du village par ailleurs doyen des conseillers municipaux de la commune, Kouka Sawadogo. Soupçonnés d’avoir hébergé les assaillants, la communauté  peuhle de plusieurs villages de la commune a fait l’objet de représailles de la part des habitants de Yirgou, les 1er et 2 janvier. Le bilan provisoire de ces deux journées noires à Barsalogho, selon une source gouvernementale, fait état de 14 morts, de nombreux blessés et d’importants dégâts matériels.

 

 

 

 

Plusieurs localités de Barsalogho sont depuis quelques jours le théâtre de conflits communautaires. Tout serait parti d’une attaque terroriste perpétrée dans la matinée du 1er janvier peu après 7h à Yirgou, un des villages de ladite commune. Les assaillants auraient fait irruption dans le village en tirant des coups de feu en l’air. Ils se seraient ensuite dirigés vers le domaine du chef-guérisseur situé à proximité de son palais, où ils l’ont trouvé entouré de patients venus en consultation. Les agresseurs auraient tenté de ligoter le maître des lieux pour l’enlever. Finalement ils l’abattront froidement, après avoir neutralisé un de ses enfants qui aurait tenté de s’opposer à l’enlèvement de son père. Quatre (4) autres personnes dont un membre des groupes d’auto-défense couramment appelés «koglweogo» sont aussi assassinés dans le village par les présumés terroristes qui, après leur forfait, se seraient enfuis vers la commune de Tongomayel (province du Soum).

 

 Indignés par l’assassinat des 6 personnes et l’intervention tardive des forces de défense et de sécurité (Ndlr : selon nos sources, les FDS sont arrivées à Yirgou dans l’après-midi pour le constat d’usage), des villageois de Yirgou et d’autres localités environnantes s’organisent pour traquer les assaillants et venger les victimes. Dans leur opération, ils s’attaquent à la communauté des éleveurs qu’ils accusent d’être de connivence avec les présumés terroristes. Les représailles se sont poursuivies dans la matinée du mercredi 2 janvier à Foulbé et dans d’autres villages du nord de Barsalogho, frontaliers avec le Soum (région du Sahel). Le bilan encore provisoire fait état de 8 Peulhs tués, de nombreux blessés et d’importants dégâts matériels (des campements et huttes incendiés, des animaux tués…). Le calme serait revenu dans la zone grâce au déploiement des forces de défense et de sécurité. Joint au téléphone dans l’après-midi du mercredi, le maire de Barsalogho, el hadj Abdoulaye Pafadnam, a confié qu’une cellule de crise avait été mise en place afin de mettre à contribution les autorités coutumières et religieuses dans la recherche de la paix et de la cohabitation pacifique entre les différentes communautés et aussi pour aider à prendre en charge des victimes. Le gouverneur de la région du Centre-Nord, Nandy Somé/Diallo, a invité les populations au calme et à la retenue en attendant que l’enquête ouverte par les FDS situe les responsabilités. Selon des sources concordantes, un calme précaire règne dans la zone nord de Barsalogho affectée par le conflit intercommunautaire avec un risque d’alourdissement du bilan des pertes en vie humaine. A noter qu’en raison des opérations de ratissage menées par les FDS et de l’insécurité dans la zone, des journalistes qui voulaient s’y rendre n’ont pu accéder au site, littéralement bouclé.

 

 

 

Gousyamba Ouédraogo

 

 

 

 

 

 

 

Encadré 1 :

 

«L’objectif des terroristes, c’est de diviser les populations…» (Le ministre de l’Administration territoriale et de la Décentralisation, Siméon Sawadogo)

 

 

 

Interrogé sur le conflit intercommunautaire dans le Centre-Nord suite à l’attaque terroriste de Yirgou par nos confrères de la télévision nationale dans la soirée du mercredi 2 janvier, le ministre de l’Administration territoriale et de la Décentralisation (MATD), Siméon Sawadogo, a déclaré : « Les vérifications sont toujours en cours. Il faut aller prudemment dans un contexte pareil. Les campements peulhs étant un peu éparpillés, il faut avoir toutes les nouvelles. A l’heure où nous vous parlons, le bilan est le suivant : 7 morts du côté du village de Yirgou et 7 du côté des communautés peuls, soit au total 14 morts officiellement reconnus par nos forces de défense et de sécurité qui ont eu l’occasion de vérifier. Mais il y a encore d’autres sites qu’on n’a pu vérifier. Malheureusement, il y a eu encore des représailles dans la commune de Dablo, notamment dans le village de Daké, où des campements peulhs ont encore été saccagés. Les informations font état de 2 morts de ce côté-là. C’est dire que c’est vraiment une journée noire dans cette zone-là que le gouvernement déplore. Le gouvernement voudrait donc présenter ses condoléances aux familles éplorées et souhaiter un prompt rétablissement aux blessés. Le gouvernement voudrait dire ici que nous devons faire très attention. C’est l’objectif qui est visé par les terroristes. Diviser les populations qui vivent paisiblement, créer donc un climat de méfiance entre les populations alors que celles-ci ont toujours vécu en symbiose depuis les indépendances, depuis même avant les indépendances. Nous avons ce devoir de dire aux gens de ne pas céder à cette provocation parce que c’est ce que ces terroristes-là recherchent. Nous avons donc instruit les gouverneurs concernés, à savoir des régions  du Sahel et du Centre-Nord, les chefs militaires et paramilitaires de part et d’autre, de travailler donc à aider les populations à ramener le calme. Nous avons aussi demandé aux chefs coutumiers et religieux (…) de travailler à la sensibilisation de la population pour ne pas céder à cette provocation-là. Nous avons également appelé les forces d’auto-défense des villages à faire en sorte qu’il n’y ait pas des représailles de part et d’autre. Il faut arrêter la destruction des campements peulh, il faut donc arrêter d’aller attaquer les autres dans d’autres villages. »

 

 

 

Propos retranscrits par

 

Gousyamba Ouédraogo

 

 

 

Encadré 2 :

 

A Dablo aussi

 

 

 

Le conflit intercommunautaire de Yirgou s’est propagé dans la soirée du mercredi 2 janvier à Dablo, une autre commune de la province du Sanmatenga frontalière de celle de Barsalogho. En effet, des campements de la communauté des éleveurs ont été saccagés dans le village de Daké. Contacté par téléphone dans la matinée d’hier jeudi, un élu local a déclaré que le bilan provisoire des affrontements faisait état de 3 morts, de  blessés et d’énormes dégâts matériels. La commune de Dablo, qui fait frontière avec celle de Kelbo dans le Soum, ne dispose d’aucun poste de police.

 

G.O.

 

 

Encadré 3 :

 

Bourzanga

 

L’école primaire de Bassé incendiée  

 

 

 

De sources concordantes, l’école primaire publique du village de Bassé situé à 12 kilomètres du centre-ville de Bourzanga a été incendiée dans la nuit du mercredi 2 janvier 2019 par des individus armés non encore identifiés. Fort heureusement, aucune perte en vie humaine n’a été enregistrée. En raison des congés du premier trimestre, les enseignants de cette école à 3 classes dont une sous paillotte étaient tous absents du village lors de cette attaque terroriste.

 

G.O.

 

                                                                                                                                       

 

 

 

 

 

Encadré

 

 

 

Dicko Issa, un rescapé des représailles contre la communauté peuh de Barsalogo, a été transféré au CHR de Kaya cet après-midi. Selon son témoignage, il a été pris dans la nuit du mardi pendant qu’il était en fuite avec sa famille afin d’échapper aux représailles.

 

«On n’a tenté de m’égorger et mon bourreau, me croyant mort, m’a abandonné dans le sang. Celui qui a tenté de m’ égorger, je le connais très bien parce que nous sommes tous des koglweogo. J’ai réussi à me relever avec l’aide de ma femme et de mes deux frères qui avaient réussi à se cacher dans  la brousse.

 

J’ai donc été conduit à Kaya. Interrogé sur les soupçons d’une éventuelle collaboration avec les terroristes, il a répondu : «Les djihadistes viennent du Soum et lorsqu’ils vous demandent de collaborer avec eux, si vous refusez on vous abat. C’est ce que les autres disent. Avant-hier quand ils sont venus tuer le chef et les membres de sa famille, les koglweogo ont dit que c’est nous qui sommes  avec les terroristes. C’est à partir de là qu’ils ont commencé à nous pourchasser. Nous sommes laissés à nous dans la brousse. Nous n’avons pas vu de forces de sécurité là-bas. On nous  a dit qu’elles arrivent. Mais je ne sais pas si elles sont arrivées là-bas». Pendant que nous quittions l’hôpital, on s’apprêtait à évacuer le blessé à Ouagadougou.

 

 

 

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