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Acquittement Gbagbo et Blé Goudé : Séisme judiciaire à La Haye, répliques politiques à Abidjan

 

Ce n’était pas tout à fait le bout du long tunnel judiciaire dans lequel il se débat depuis novembre 2011. Mais depuis hier, Laurent Gbagbo et Charles Blé Goudé, qui fut son ministre, sentent de nouveau l’air revigorant de la liberté. Après le précédent de Jean-Pierre Bemba en juin dernier, la Cour pénale internationale (CPI) a, en effet, acquitté ce mardi 15 janvier 2019 les deux personnalités qui, rappelons-le, étaient poursuivies pour crimes de guerre et crimes contre l’humanité, meurtres, viols, persécutions et autres actes inhumains commis lors des violences postélectorales de 2010-2011. Mais les trois juges ont estimé que l’accusation avait été incapable d’administrer les preuves tangibles et irréfutables que les deux personnes incriminées avaient conçu et exécuté un plan diabolique pour se maintenir au pouvoir en usant de la violence.

 

 

C’est donc en principe l’épilogue d’un marathon politico-judiciaire, même si la mise en liberté immédiate des deux accusés ordonnée par la Cour a été suspendue, le temps de voir si le parquet va faire appel. Une ultime audience devrait donc se tenir ce matin à La Haye pour sceller définitivement le sort de l’ancien chef d’Etat et de son ministre de la rue publique. La nuit supplémentaire que l’enfant terrible de Mama vient de passer dans sa cellule de Scheveningen sera peut-être  la dernière. Il sort ainsi vainqueur d’un long bras de fer contre la juridiction internationale et l’Etat ivoirien, notamment le président Alassane Ouattara et les ADOlâtres de tous poils qui ne voulaient pas le voir, même en peinture.

 

En pareilles circonstances, il faut bien reconnaître que les plus grands perdants sont avant tout les victimes, estimées à 3 000 personnes. Mais les Ouattara, Soro, leurs anciens com’zones et même l’armée française et les supplétifs burkinabè, pour ne citer que ceux-là, ne sont-ils pas coresponsables de ce lourd bilan humain ? Même si ce sont les vaincus, malheur à eux, qui se retrouvent invariablement dans le box des accusés.

 

Il faut dire que le verdict d’hier est d’abord une défaite personnelle de la procureure Bensouda dont les approximations et les tâtonnements ont émaillé le dossier de bout en bout. Les juges ne lui avaient-ils pas demandé, il y a quelques années, de retourner poursuivre ses enquêtes pour rendre son affaire un peu plus consistante ?

 

Gbagbo et Blé Goudé libres, c’est le Rassemblement des houphouëtistes pour la démocratie et la paix (RHDP) qui devrait avoir du souci à se faire, malgré l’apparente sérénité qu’affichent depuis hier certains de ses éléphants. Ce tsunami judiciaire, dont les répliques vont se faire sentir sur les rives de la lagune Ebrié, intervient au moment où la scène politique ivoirienne est en pleine recomposition : le 6 août 2018, soit quelques mois avant son mari, Simone Gbagbo a bénéficié, avec quelque 800 autres détenus pour des faits liés à la crise postélectorale de 2010-2011, d’une amnistie présidentielle ; et comme si cela ne suffisait pas, les alliés d’hier sont devenus des adversaires aujourd’hui, et ainsi, Guillaume Soro, que les partisans d’ADO veulent faire sauter du perchoir, s’est beaucoup rapproché de l’ex-président Henri Konan Bédié et du FPI.

 

Si donc, comme on le sent venir, le FPI, forcément ragaillardi par le retour de son gourou, devait pactiser lors de la présidentielle de 2020 avec le PDCI et Guillaume Soro ainsi que, pourquoi pas, Mamadou Coulibaly du LIDER, les joutes électorales promettent d’être épiques.

 

 

H. Marie Ouédraogo

Dernière modification lemercredi, 16 janvier 2019 20:57

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