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Décret portant révocation des 10 GSP : Une suspension au goût de victoire

La juridiction du premier président du Conseil d’Etat a suspendu le décret portant révocation des 10 gardes de sécurité pénitentiaire (GSP) le 8 février 2019 au tribunal administratif. En d’autres termes, l’exécution du décret du 19 décembre 2018, pris en Conseil des ministres, a été stoppée en attendant que le juge du fond se prononce. Une décision qui sonne comme une victoire d’étape pour ces agents qui se sont livrés à une véritable scène de liesse après le délibéré. En effet, ils pourront, de ce fait, reprendre le  travail en attendant d’être définitivement situés.

 

 

 

«Seule la lutte libère » ; «C’est Dieu qui est fort» ; «C’est Dieu qui a fait notre palabre », des propos entrecoupés d’ovations nourries et de cris de joie : c’est cette scène qu’ont donné à voir les dix gardes de sécurité pénitentiaire (GSP) jusqu’alors révoqués pour «commission d’une faute d’extrême gravité» et leurs camarades, après qu’ils ont pris connaissance de la décision de justice les concernant. «Statuant contradictoirement, en matière administrative en la forme des référés en premier et en dernier ressort : déclarons la requête aux fins des référés suspensions du 21 janvier 2019 contre le décret recevable et la déclarons bien fondée.

 

En conséquence, ordonnons la suspension du décret du 19 décembre 2018 portant révocation d’agents de la fonction publique, de révocation en ce qui concerne chacun des requérants ; condamnons l’Etat burkinabè à payer aux requérants la somme de 1,5 million de francs CFA au titre des frais engagés non compris dans les dépens», a déclaré en substance le juge des référés du Conseil d’Etat.

 

 

«Le juge a suspendu une décision qui a été prise par une autorité administrative. Cela ne veut pas dire que l’Etat a perdu ou que ce sont les agents qui ont gagné. Il dit clairement de suspendre l’application du décret, en attendant que le juge du fond se prononce sur l’affaire en vérifiant si le décret est bon ou mauvais », a expliqué en ‘’français facile’’ Me Issa Diallo, avocat des 10 GSP, qui se dit serein quant à la suite de l’affaire.

 

Une suite dont il ne saurait donner un calendrier exact. «Je sais qu’en matière de référé (ndlr : recours au juge qui, dans les cas d’urgence, prend une décision provisoire), la loi fait obligation au juge de rendre sa décision dans le mois de sa saisine mais au fond, elle n’a pas prévu de délai. Ça peut être dans 1, 2, 3, et pourquoi pas 10 ans », a indiqué le conseil des demandeurs, relevant au passage que c’est le président du Conseil d’Etat qui décidera du moment où le dossier sera en état d’être jugé.

 

 

Joint au téléphone, dans la foulée, le secrétaire général du Syndicat national de la garde de sécurité pénitentiaire (SYNAGSP), Abdou Dramane Thiombiano, a remercié d’emblée la justice d’avoir «dit le droit». Etant lui-même concerné par la décision de révocation, il a  dit espérer que le décret sera complètement annulé.

 

 

Du côté de l’avocat défendant les intérêts de l’Etat burkinabè dans cette affaire, «il s’agira de rendre compte de la décision qui a été prise et c’est à l’Etat de tirer les conséquences qui s’imposent ». Me Séraphin Somé de la SCPA Kam et Somé, puisque c’est de lui qu’il s’agit, n’a pas voulu confirmer si les agents révoqués réintégreraient les rangs.

 

 

En rappel, le 1er novembre 2018, des éléments de la brigade d’intervention rapide de la GSP ont fait irruption au domicile du ministre de la Justice, où ils ont désarmé les agents chargés de sa sécurité dans le but de faire respecter un mot d’ordre de grève bien que le SG du syndicat, lui, parle de mouvement d’humeur. Une pilule qui n’est pas passée du côté du gouvernement, qui a décidé de la révocation de 10 agents et de l’interdiction des activités de l’actuel bureau dudit syndicat pour «manquement à la législation encadrant les activités syndicales». 

 

Aboubacar Dermé

 

Encadré :

Le Syndicat suspend son mouvement d’humeur pour 1 mois

 

Réuni à Ouagadougou le 9 février 2019, le personnel du corps de la GSP a produit une déclaration que nous vous proposons in extenso :

Faisant suite à la résolution prise par l’ensemble des participants à l’occasion du congrès extraordinaire du 13 octobre 2018, il est observé depuis le 22 octobre 2018 une prise d’acte d’impossibilité d’exécution de certaines missions. L’attention du gouvernement a été attirée sur cette impossibilité que pourraient corriger l’application effective des décrets et arrêtés de nomination ainsi que le traitement des avancements du personnel et la dotation en matériel spécifique. Depuis lors, plutôt que de se résoudre à trouver une solution sérieuse  et pertinente à cette crise, le gouvernement s’est enfermé dans une regrettable logique répressive tant sur le plan administratif que financier.

Réuni ce jour,

Vu le contexte, la situation des détenus gardés à vue et les contraintes propres aux acteurs judiciaires de la chaîne pénale ;

Ouï des personnalités respectables ;

Entendu les points de vue de la base et les derniers développements qui laissent penser à une prise en compte de la résolution des revendications ;

Vu les différents cadres de dialogue initiés ;

L’ensemble du personnel du corps de la GSP décide de la suspension pour un mois de son mot d’ordre, allant du dimanche 10 février au samedi 09 mars 2019. Le personnel GSP, à travers cette suspension, tient à prendre l’opinion publique nationale et internationale à témoin afin que le gouvernement se penche sérieusement sur ses préoccupations. En cas de persistance du mépris qui caractérise le traitement de ses préoccupations, le gouvernement sera tenu pour responsable des éventuels désagréments qui pourraient être issus d’une reprise ultérieure du mouvement de prise d’acte d’impossibilité d’exécution des missions de la GSP.

Le SYNAGSP appelle l’ensemble du personnel à rester mobilisé et déterminé pour une meilleure considération du corps. Il remercie tous les partenaires sociaux et professionnels qui ont apporté leur soutien aux personnels et aux agents révoqués par un décret dont le caractère illicite a été établi par la juridiction du président du Conseil d’Etat.

 

Ouagadougou, le 09 février 2019      

 

 Pour le SYNAGSP

Le Secrétaire général

Abdou Dramane Thiombiano   

Dernière modification lelundi, 11 février 2019 23:04

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