Logo
Imprimer cette page

Présidentielle sénégalaise : Déplorable guerre des chiffres

Les 6,6 millions d’électeurs sénégalais se sont rendus dans les quelque 16 000 bureaux de vote dimanche 24 février 2019 pour élire leur président dans le calme et la sérénité, pour emprunter à la vulgate officielle.

 

Et cela, malgré les menaces de boycott  proférées par l’ancien président Abdoulaye Wade qui apparaît finalement comme l’un des grands perdants de ce scrutin, ses appels aux actes de vandalisme n’ayant pas été suivis par ses propres militants, outrés par ses propos inconsidérés.

Pour n’avoir pas voulu trouver de candidat de substitution à son fils  bien-aimé Karim, empêché de se présenter comme l’ancien maire de Dakar, Khalifa Sall,  Gorgui, au soir de sa vie politique et même de son parcours terrestre, a, pour ainsi dire, presque liquidé le Parti démocratique sénégalais (PDS). Tout juste peut-il se consoler du fait que trois des cinq prétendants à la magistrature suprême sont ses fils spirituels même s’ils sont en rupture de ban, qu’il s’agisse de Macky Sall, d’Idrissa Seck ou de Madické Niang. Ce dernier ayant été obligé de se présenter en indépendant faute de l’onction du PDS.

Si l’élection s’est globalement bien déroulée, avec un taux de participation jugé satisfaisant, les bureaux de vote avaient à peine fermé dimanche soir que la polémique naissait sur l’éventualité ou pas d’un second tour, les partisans de la coalition Benno Bokk Yakaar du président sortant étant convaincus que leur champion a réalisé le coup K.-O. alors que les autres, le duo Idrissa Seck-Ousmane Sonko notamment, ne voyaient pas comment Macky Sall pourrait échapper à un second round qui s’avérerait indécis pour lui.

Il faut dire qu’il y a beaucoup de légèreté et d’irresponsabilité  dans l’attitude de certains responsables politiques, en particulier le Premier ministre, Mahammed Boun Abdallah Dionne, par ailleurs coordonateur du pôle programme du candidat-président qui, dès 22h, a affirmé sans ambages que le natif de Fatick avait été réélu avec au moins 57% des suffrages exprimés. Soit à peine trois heures après la fermeture des bureaux de vote et alors que la compilation des résultats ne faisait que commencer.

A-t-il fait cette déclaration insensée de son propre chef ou sur instigation de son patron ? Quoi qu’il en soit, il n’appartient pas à un chef de gouvernement, soit-il membre du directoire de campagne, d’annoncer de tels résultats. Même s’il faut reconnaître que ce sont les opposants qui ont ouvert en premier le feu une heure plus tôt en évoquant un « inévitable second tour », ce qui a sans doute entraîné cette riposte mal à propos  d’Abdallah Dionne.

Que ce soient les opposants et assimilés, parfois pour conjurer un hold-up électoral, qui se rendent coupables de telles dérives, cela est presque habituel, mais si les caciques de la majorité s’aventurent eux aussi sur ce terrain glissant, on est tenté de croire qu’ils ne sont pas aussi sereins qu’ils veulent le laisser paraître.

Avec de telles sorties, il faut espérer en tout cas que les principaux protagonistes de cette guerre des chiffres ne préparent  pas le terrain à des contentieux électoraux dont le Sénégal, qui se targue de voter pratiquement depuis deux siècles et qui était réputé être l’un des phares de la démocratie en Afrique,  n’a vraiment pas besoin.

Tous les acteurs gagneraient donc à jouer balle à terre et à prendre leur mal en patience en attendant la publication des résultats provisoires qui devrait intervenir entre mercredi et vendredi.

 

Hugues Richard Sama

Dernière modification lemardi, 26 février 2019 22:19

Ajouter un Commentaire

Code de sécurité
Rafraîchir

© 2011-2014 - Observateur Paalga - Tous droits réservés I Conception: CVP Sarl.