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Nigeria: « Baba go slow » va devoir se hâter

Il a beau avoir 76 ans, Muhammadu Buhari est encore véloce, lui qui, le premier, vient de franchir la ligne d’arrivée dans cette course à la présidence qui l’opposait à 71 autres candidats. C’est dans la nuit de mardi à mercredi que l’INEC a annoncé la victoire du président sortant avec 56% des suffrages exprimés contre 41% à son principal challenger, Atiku Abubakari.

Dans ce duel de nordistes, il y en a un qui visiblement est plus nordiste que l’autre puisque sa victoire, Buhari la doit d’abord aux Etats du nord très peuplés comme ceux de Katsina, Borno, Yobe, Zamfara ou Kaduna qui l’ont quasiment plébiscité. Un vote massif ethno-régionaliste qui a permis au locataire d’Aso Rock de mettre une bonne distance entre lui et son poursuivant immédiat. Pour autant, on aurait tort de réduire sa réélection à la seule donne géographique, puisqu’il a pu aussi s’imposer à Lagos, l’ancienne capitale, dans le sud du pays grâce, il est vrai, à son directeur de campagne, le richissime homme d’affaires, sénateur et ancien gouverneur de l’Etat de Lagos, Bola Tinubu.

Comme il fallait s’y attendre, le candidat malheureux, comme pour préparer sa probable défaite, avait dénoncé des fraudes massives dans l’organisation et le déroulement du scrutin, martelant dès les premières estimations : « Je rejette les résultats de l’élection de la honte du 23 février 2019 et contesterai ses résultats en cour de justice ».

Voici donc le général qui, depuis son coup d’Etat en 1983, avait dirigé le Nigeria d’une main de fer jusqu’à sa chute en 1985 reparti pour son ultime combat, lui qui a demandé à ses compatriotes quatre années supplémentaires pour achever son programme initial, affirmant que son administration avait déjà « jeté les bases d’un pays fort, stable et prospère ».

En fait, bien plus que son bilan mitigé, c’est peut-être, outre la fameuse prime au sortant, la personnalité de Muhammadu Buhari, faite d’austérité et d’intégrité, qui a pesé dans la balance électorale en faveur de celui qui, à l’époque de la junte, faisait fouetter les fonctionnaires en retard à leur poste.

Mais « Baba go slow » (Papa vas doucement), comme on l’a surnommé en raison de ses ennuis de santé qui l’obligeaient à effectuer de longs séjours médicaux à l’étranger, va devoir se hâter et mettre le turbo pour d’abord combler les lacunes de son premier mandat, notamment dans la lutte contre la secte islamiste Boko Haram et la corruption. Sur ce dernier sujet, le général reste droit dans ses bottes. Lors d’un de ses discours de campagne, citant un proverbe yuruba, le locataire d’Aso Rock a déclaré que « seul un esprit patient peut traire un lion. De la même manière, la lutte contre la corruption est difficile mais pas impossible ». Et des trésors de persévérance il lui en faudra pour tenir ses nouvelles promesses électorales. Et Dieu sait qu’elles sont ambitieuses : création de 15 millions de nouveaux emplois ; formation de 200 000 jeunes aux métiers des services, des loisirs et technologies ou encore la réhabilitation de 10 000 écoles ainsi que la formation des enseignants dans des matières comme les sciences, les arts plastiques ou les mathématiques. Des engagements électoralistes dont on se demande si le nouvel élu aura les moyens et surtout la force de les réaliser. Il est vrai que, comme par miracle, la santé déclinante du septuagénaire, dont on se demandait déjà s’il pourrait achever son premier mandat, semble s’être beaucoup améliorée. Mais de là à penser qu’il pourrait se prévaloir d’une forme olympique, il y a un pas que beaucoup n’oseront pas franchir.

 

H. Marie Ouédraogo

Dernière modification lejeudi, 28 février 2019 22:04

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