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Intelligence africaine de la foi : La « noirceur » : malédiction divine ?

Historiquement, le préjugé raciste au sens strict, comme conscience de la supériorité biologiquement déterminée de sa propre race ou de son ethnie par rapport à celle des autres, s’est développé surtout à partir de la pratique de la colonisation et de l’esclavage au début de l’ère moderne.

 

L’histoire du racisme des temps modernes commence par le commerce des esclaves africains au XVIe et au XVIIe siècles. A un moment ou un autre, chaque nation européenne a bénéficié du trafic des esclaves africains et, en Amérique du Nord, l’esclavage est devenu une institution fondamentale d’une société chrétienne protestante puissante. Pour justifier la dépossession massive des Noirs, des Bruns et des Jaunes, les Européens ont eu recours au mythe de la supériorité de la race blanche. Selon ce mythe, les « races de couleur » du monde sont tenues pour sous-humaines ou naturellement inférieures à la race blanche. Elles sont destinées par Dieu à « couper le bois et à puiser l’eau » pour les nations chrétiennes d’Europe et d’Amérique. Partant de là, la peau blanche est devenue la norme reconnue de beauté humaine et tous les êtres humains ont été jugés dignes de respect, des droits civils et de la dignité dans la mesure de la conformité de leur appartenance à cette norme. Avec l’essor de la biologie, on a essayé de définir ce qu’est une race : la couleur de la peau, la forme de la tête, le groupe sanguin, etc. Mais dans toutes ces classifications, la norme était l’identité blanche. Autrement dit, c’est comme s’il était entendu, a priori, que la couleur naturelle de l’homme, c’était la blancheur avec la conséquence que tout ce qui n’est pas blanc est inférieur. Cette affaire, la science s’en est mêlée en confondant caractéristiques physiques et caractéristiques morales. On inscrit alors dans la nature une supériorité imaginaire de l’homme blanc et une infériorité imaginaire de l’homme noir. Le théologien Bruno Chenu ne se gêne pas de l’écrire : « ...pour toute la culture occidentale, le blanc évoque la pureté et la grâce, le noir est immédiatement synonyme de souillure et de péché. (…) La perspective biblique n'a pas peu contribué à cette symbolique (…) : le blanc et le noir s'opposent comme le Christ s'oppose à Satan, comme le spirituel s'oppose au charnel, comme le bien s'oppose au mal. Le salut pascal n'est-il pas de passer des ténèbres à la lumière ? Tout combat spirituel doit illuminer et 'blanchir' le croyant. (…) ». Disons-le : cette symbolique dominante a eu des conséquences psychologiques catastrophiques pour le Noir. Elle l'ancrait dans un complexe d'infériorité et dans un sentiment de culpabilité. Aussi, la théologie noire (mais on va le voir par la suite) va travailler à renverser les termes en faisant du « noir » le symbole du bien et du « blanc » le symbole du mal. Cette opération ne traduit pas simplement un désir de revanche mais veut exprimer les méfaits historiques de l'homme blanc que tout honnête homme peut aisément constater. Si la « blancheur » symbolise quelque chose au niveau de l'histoire réelle, c'est bien l'exploitation et le racisme. Il reste donc aux Blancs à se convertir à la « négritude », c'est-à-dire à la lutte pour la libération des opprimés et des déshérités.

P. Jean-Paul Sagadou

Assomptionniste

 

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