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RDC : Tshisekedi tâtonne à marquer son territoire, Fayulu à garder sa coalition

 

Jean-Yves Le Drian, le ministre des Affaires étrangères français, avait trouvé la stigmatisante formule d’« arrangement à l’africaine » pour expliquer la victoire suspecte de Félix Tshisekedi à la présidentielle congolaise. Un « arrangement » qui vaut à l’Union pour la démocratie et le progrès social (UDPS) de Félix Tshisekedi et au Parti du peuple pour la reconstruction et la démocratie (PPRD) de Joseph Kabila une cohabitation, au grand dam de Martin Fayulu, le candidat de la coalition Lamuka, arrivé officiellement deuxième à cette élection.

 

 

Plus de deux mois après son investiture, Félix Tshisekedi est un président bien esseulé au sommet de l’exécutif. Il n’a toujours pas de Premier ministre, pas de gouvernement et les militants de son parti récriminent contre les tâtonnements de leurs dirigeants et la corruption de leurs élus qui ont favorisé la nette victoire du PPRD aux élections sénatoriales. Une victoire qui confirme bien que dans cette cohabitation politique forcée, Joseph Kabila passe pour l’homme fort et Félix Tshisekedi, une marionnette de luxe, tout juste bon pour inaugurer des chrysanthèmes.

 

Mais il faut croire que Félix Tshisekedi ne veut pas de ce rôle de pantin. Ses dernières décisions sont des signes d’un président qui, même sans gouvernement, veut marquer son territoire et tenir ses promesses de campagne. Ainsi en est-il du limogeage du chef de l’Agence nationale de renseignement pour des besoins «d’humaniser les services» et les conformer au respect des droits de l’homme. Tshisekedi a aussi annoncé en début de semaine la suspension de l’installation des sénateurs, le report de l’élection des gouverneurs et enjoint au procureur d’enquêter sur les soupçons de corruption qui pèsent sur les élections sénatoriales. Des mesures qui traduisent des velléités de rupture avec la gouvernance Kabila pour combattre la corruption, l’impunité et pour l’Etat de droit et la moralisation de la vie politique congolaise. Pourvu qu’elles ne soient pas des annonces en feu de paille symptomatiques du tâtonnement d’un président sans marge de manœuvre dans la gestion du pouvoir d’Etat.

 

Pendant que Tshisekedi tâtonne pour marquer son territoire, Martin Fayulu, l’opposant le plus en vue, bégaie dans l’expression de son leadership sur la coalition Lamuka. En effet, ce front de l’opposition se fissure dans sa recherche d’une stratégie cohérente à opposer aux alliés qui gouvernent à Kinshasa. Entre Martin Fayulu qui prône la résistance pacifique pour le rétablissement  de la vérité des urnes en sa faveur et Moïse Katumbi qui voudrait ouvrir des négociations avec Félix Tshisekedi, Jean Pierre Bemba a du mal à rapprocher les points de vue. Ces opposants se concertent  donc depuis hier à Bruxelles pour donner un second souffle à leur coalition après le coup dur de la présidentielle et la divergence de leurs intérêts politiques du moment. En effet, en prônant la négociation, Moïse Katumbi espère que le nouveau président passe l’éponge sur ses ennuis judiciaires et Jean-Pierre Bemba, pour sa part, ne voudrait pas voir s’effriter ses assises politiques dans une rigidité oppositionnelle improductive. Mais comment convaincre Martin Fayulu d’abandonner ses illusions de candidat qui a gagné l’élection présidentielle pour conduire, en opposant ouvert au dialogue, des négociations avec le pouvoir de Kinshasa ? Dures, dures sont donc les concertations de la coalition Lamuka à Bruxelles. On attend impatiemment d’en lire les conclusions cet après-midi.

 

 

Zéphirin Kpoda

Dernière modification ledimanche, 24 mars 2019 21:09

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