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Massacre au centre du Mali : L’impunité, l’autre insécurité

Au-delà de la mine d’enterrement, des propos de circonstance  pour réconforter les rescapés ainsi que des vivres et des médicaments apportés pour parer au plus urgent, Ibrahim Boubacar Keïta a-t-il enfin pris la mesure, toute la mesure, de ce mal  qui est en train de ronger insidieusement le tissu social malien depuis maintenant de nombreuses années ?

 

Au lendemain du massacre, le samedi 23 mars, de quelque 135 Peuls dans les villages d’Ogossagou et de Welingara, au centre du mali,  le locataire du palais de Koulouba s’est en effet rendu dans le premier  village cité  pour constater de visu toute l’étendue du désastre.

Une tombe commune où gisent une quarantaine de personnes, dont des enfants et des vieillards, des corps jetés dans un puits,  des cases et des greniers incendiés, des animaux brûlés vifs, tel est le décor apocalyptique qui s’est offert au présidentiel regard dans ce qui est devenu une cité fantôme après le passage des hordes de barbares, qui ne semblent pas avoir une once d’humanité, tant l’horreur ferait même frémir le diable en personne.

Quel péché inexpiable ont pu bien commettre les suppliciés pour mériter pareil acharnement ? Rien, absolument rien ne saurait expliquer, à plus forte raison justifier, une telle cruauté indicible qui se nourrit en réalité non seulement de l’incapacité des Forces de défense et de sécurité à protéger tous les citoyens et leurs biens, mais aussi de l’impunité, un terreau particulièrement fertile sur lequel pousse ce genre de drame.

En effet, même si l’ampleur dépasse cette fois-ci l’entendement, ce n’est, hélas, pas la première fois que les violences intercommunautaires, devenues cycliques dans le centre du pays,  dégénèrent  en pogroms qui, si on n’y prend garde,  sonnent comme autant de répétitions macabres pour un génocide en règle. Et cela, sans que la justice suive, ce qui peut donner aux bourreaux le sentiment qu’ils sont intouchables, et aux victimes la détestable impression que l’Etat et ses bras séculiers sont  complices  de ces tueries.

Pour ne prendre que les exemples les plus récents, que ce soit aujourd’hui à Ogossagou au   Mali ou hier à Yirgou au Burkina (où entre 50 et plus de 200  Peuls, selon les sources, ont été  massacrés en début d’année), la première insécurité, pour ainsi dire,  est d’abord  judiciaire dans des Etats où , hélas, le déni de justice et la corruption, qui a fini par gangréner tous les maillons de la chaîne (de l’officier de police judiciaire au magistrat en passant par les auxiliaires de justice) semblent devenus les règles d’un droit bien souvent  tordu. Une situation qui  peut conduire les justiciables désabusés  à se faire justice eux-mêmes ou alors à se jeter dans les bras du premier marchand d’illusions venu et ce n’est pas ce qui manque dans ce Sahélistan où les prétendus djihadistes n’en demandaient pas tant.

IBK est donc venu et il a touché du doigt cet autre danger, autrement plus pernicieux que le terrorisme  qui sape  le vivre-ensemble, les deux se nourrissant d’ailleurs parfois l’un de l’autre. Au-delà des mesures cosmétiques prises pour donner l’illusion d’une véritable volonté politique, va-t-il maintenant prendre le diable par les cornes  pour ramener la paix et la sérénité dans cette communauté  martyre ?  Une chose est sûre, il faut plus que la dissolution de la milice d’autodéfense dogon tout de suite  pointée du doigt - même si elle s’en défend - et la valse des bérets dans la haute hiérarchie militaire, décidées  dès la commission du forfait, pour que la sécurité et la concorde perdues reviennent.

 

Ousseni Ilboudo

Dernière modification lemardi, 26 mars 2019 22:14

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