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Algérie : Bensalha, l’indésirable intérimaire

 

C’est maintenant acté. La page Bouteflika est définitivement  tournée. Sept jours après la démission du zaïm, poussé à la sortie sous une clameur publique accentuée par le lâchage de l’armée, le Parlement algérien a officiellement constaté, ce mardi 9 avril 2019, la vacance du pouvoir à la tête de l’Etat en désignant Abdelkader Bensalah, président du Conseil de la nation, président par intérim pour une durée de quatre-vingt-dix jours au cours desquels une élection présidentielle devrait être organisée.

 

 

Avec cette application de l’article 102 de la Constitution prônée par l’armée à travers son chef d’état-major, le général Ahmed Gaïd Salah, pour ouvrir la voie à une transition légale, ce devrait être l’épilogue de la grave crise qui secoue l’Algérie depuis le 22 février dernier.

 

Mais en réalité, cet intérim ne règle rien, le problème restant entier.

 

Bensalah prend en effet les rênes du pouvoir contre l’avis de la rue qui veut faire table rase de tout le système Bouteflika et n’entend pas que le démissionnaire soit remplacé par un de ses clones, quand bien même les prérogatives de ce dernier seraient particulièrement limitées.

 

Ancien combattant de la guerre d’Algérie, comme tant d’hommes politiques de sa génération, à l’image de Bouteflika, l’indésirable intérimaire, 77 ans, est en effet un des fidèles parmi les fidèles du grabataire de la Zéralda. C’est ce dernier qui l’a hissé au Sénat depuis 2002 où il a été élu sept fois président du Conseil de la nation.  Président du Conseil national de transition dans les années 90, puis président de l'Assemblée nationale populaire de 1997 à 2002, il fut un de ces caciques qui ont soutenu l’idée d’un cinquième mandat de Boutef au début de la crise.

 

Avec un tel pedigree, difficile d’incarner le changement et le renouveau réclamés par les manifestants.

 

Si cette solution constitutionnelle a l’avantage de la légalité, pour ce qui est de la légitimité, c’est une autre affaire.

 

De grandes interrogations se posent désormais : si ce n’est pas Bensalah, qui alors ? Qui sera donc cet homme ou cette femme immaculé (e) et surtout comment le ou la choisir ?  

 

La chose eût été sans doute simple si le mouvement de contestation avait des représentants attitrés avec lesquels discuter. Or, aucune tête ne dépasse l’autre ; pas plus qu’une voix ne porte plus que l’autre dans cette marée humaine qui veut faire sauter les digues de l’ancien système et emporter ses gardiens. On est donc embarqué dans une logique de bras de fer à l’issue incertaine.

 

A l’évidence, la nouvelle figure repoussoir ne pourra pas gouverner face à la désapprobation généralisée et aux manifestations quotidiennes. Faut-il qu’il abdique lui aussi à son tour ? S’il venait à s’y résoudre, quel mécanisme activer pour combler ce nouveau vide du pouvoir ?

 

Au cas où la chienlit, comme on le craint, devrait s’installer, le risque est grand que la « Grande Muette », qui avait déjà pesé de tout son poids pour expulser le locataire du palais d’El-Mouradia, mette carrément les deux pieds dans le plat et renvoie les protagonistes dos à dos.

 

Un scénario que Gaïde Salah aurait pu écrire s’il ne constituait pas lui aussi un symbole de ce régime honni que les Algériens ne veulent plus voir, même en peinture.

 

 

Alain Saint Robespierre

Dernière modification lemercredi, 10 avril 2019 21:17

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