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Projecteur: Ces écrivains qui annoncent le futur

L’incendie de Notre Dame de Paris a-t-il été prédit par Victor Hugo ? On a tôt fait de trouver des passages dans son roman éponyme qui décrivent l’incendie de l’édifice religieux. Longtemps, on a vu dans le récit de fiction la réminiscence sublimée ou non du passé de l’auteur. Pourtant, il est un critique, Pierre Bayard, qui  traque dans les œuvres des indices du futur. Panorama de ces écrivains prémonitoires qui ont décrit le futur dans leurs œuvres.

 

 

Le Nouvel Observateur a publié un passage de Notre-Dame de Paris, le roman de Victor Hugo paru en 1831 et qui annonce, selon le journal, l’incendie du 15 avril 2019, soit 188 ans plus tard. «Tous les yeux s’étaient levés vers le haut de l’église. Ce qu’ils voyaient était extraordinaire. Sur le sommet de la galerie la plus élevée, plus haut que la rosace centrale, il y avait une grande flamme qui montait entre les deux clochers avec des tourbillons d’étincelles, une grande flamme désordonnée et furieuse dont le vent emportait par moments un lambeau dans la fumée». Toutefois, le journal précise que cet incendie est un simulacre orchestré par Quasimodo pour repousser des truands. Il est cependant des œuvres dont le caractère prémonitoire paraît évident après coup

Dans Futility, un roman de Morgan Robertson paru en 1898, il est question du naufrage du plus grand navire jamais construit, le Titan, qui fait naufrage à son premier voyage sur l’Atlantique, après avoir percuté un iceberg. En 1913, soit 14 ans plus tard, le Titanic fait naufrage dans l’Atlantique à sa première sortie en mer, après avoir heurté un iceberg. L’étonnant au-delà de la proximité des noms des deux navires, Titan et Titanic, est qu’ils ont la même longueur, le même nombre de Hublots et des canaux de sauvetage en deçà du nombre de voyageurs !

Un autre écrivain à la prémonition sidérante est Jules Verne, et principalement avec son roman De la Terre à la Lune, paru en 1865 et qui contait l’expédition d’une fusée qui décollait de la Floride pour se poser sur la lune. En 1969, Apollo 11 avec à son bord Neil Armstrong décollait de la base de la NASA en Floride pour se poser sur la lune en 73 heures et 10 minutes de vol. La navette de Jules Verne mettait trois minutes de plus ! Prédire ce vol presque 100 ans en avance et avoir une marge d’erreur de seulement 180 secondes…

Dans la prédiction des naufrages, il faudra aussi convoquer Edgar Poe qui, dans Les Aventures d’Arthur Gordon Pym, évoque l’odyssée d’un navire qui coule et quatre naufragés qui s’embarquent dans un canoé pour rejoindre une île perdue. Tenaillés par la faim, ils tirent au sort pour désigner le compagnon qui sera mangé et ils le font à la courte paille. Le sort tombe sur Richard Parker.

Cinquante ans plus tard, un yacht, La Mignonnette, quitte l’Australie et fait naufrage en tentant de contourner l’Afrique. Quatre compagnons en réchappent mais tenaillés par la faim, ils tirent au sort celui qui sera dévoré par les autres et c’est un jeune homme du nom de Richard Parker qui tire la courte paille. Le romancier américain avait décrit le naufrage dans les moindres détails jusqu’aux nom et prénom de la victime, Richard Parker.

Mais toute la littérature de prédiction n’est pas aussi sombre, il est des faits heureux tel le Poème « Tournesol » d’André Breton qui annonçait en 1923 sa rencontre avec Jacqueline Lamba, qui sera son épouse. Le poème décrit le physique de la jeune dame, l’itinéraire emprunté par les deux tourtereaux qui les conduit à la Tour Saint-Jacques.

Dans La Nouvelle Héloïse de Jean-Jacques Rousseau, le précepteur Saint-Preux est amoureux de son élève Julie mais la différence de leur statut social empêche cet amour. Quelques années plus tard, elle est mariée par sa famille à Monsieur de Wolmar et elle invite son amant à emménager avec eux. S’y développe un triangle amoureux.  Quelques années après, Jean-Jacques Rousseau va expérimenter cet amour à trois qu’il avait imaginé avec la Comtesse Sophie d’Houdetot et son mari.

La plupart des exemples de cet article sont tirés de Demain est arrivé (2005) de Pierre Bayard, un ouvrage qui ne fait pas mention de la prédiction dans la littérature négro-africaine, exception faite du poème de Frankétienne qui évoquait deux mois avant le terrible tremblement de terre survenu en Haïti. Mais s’il est un exemple de prémonition qui a un écho particulier en Afrique, c’est celui du peintre Victor Brauner qui aimait s’autoportraiturer avec un œil ensanglanté et qui fut éborgné lors d’une rixe dans laquelle il n’était pas impliqué. Cette expérience du peintre Brauner participe, selon Pierre Bayard, de la prophétie autoréalisatrice. Ce concept rejoint l’idée partagée dans les cultures selon laquelle on appelle inévitablement  le malheur sur soi en imitant des situations malheureuses.

Pour finir, on peut se demander si c’est l’écrivain qui entrevoit le futur et le décrit ou si c’est la vie qui imite l’art, comme l’affirmait Oscar Wilde qui disait que c’est la vie qui imite l’art. Dans ce cas, on donnerait alors raison aux défenseurs de la littérature du bonheur qui pensent que les malheurs dans la littérature déteignent sur la vie…

 

Saïdou Alcény Barry

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