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La chancelière allemande à l’UO : Merkel en toute décontraction avec les étudiants

 

Dans la matinée d’hier 2 mai 2019, Angela Merkel était l’invitée des étudiants de l’université de Ouagadougou. Pendant une heure d’horloge, il s’est agi d’un dialogue direct et sans langue de bois qui a permis aux accueillants de poser les questions qui leur tenaient à cœur et, pourquoi pas, de faire oublier à l’opinion la bérézina de la rencontre du même genre avec le président français, Emmanuel Macron, en  novembre 2017.

 

 

 

 

«Je suis venue pour échanger avec vous. La formation est la clé de la réussite, et c’est vous qui serez la relève de demain. Je suis très curieuse de connaître vos questions». C’est en ces termes que la chancelière allemande, Angela Merkel, s’est adressée aux  étudiants qui la recevaient dans la salle des Actes de l’université de Ouagadougou. Et après ces propos d’encouragement, c’est aussitôt parti pour les échanges, bien sûr après les salamalecs d’usage du président de l’institution, le Pr Rabiou Cissé. Et le premier intervenant n’a pas fait dans la dentelle : «Les terroristes nous assassinent avec des armes produites chez vous, en Allemagne, en France ou en Russie. Comment est-ce possible ?», a-t-il dit tout de go. De prime abord, la destinataire de la question fera remarquer que la situation est assez préoccupante, il est vrai, mais que, malheureusement, il se trouve que la plupart des armes utilisées par les assaillants proviennent de la Libye. Elle reconnaîtra certes que l’Allemagne produit aussi des armes, mais qu’elle ne les vend pas à beaucoup de pays. «Nous vous soutenons dans la formations de vos militaires. Donc, de l’autre côté, vos armées doivent être aussi équipées. Et c’est devant ce dilemme que nous nous trouvons».

 

Du reste, la Chancelière a reconnu sa part de responsabilité dans ce qu’est devenue la Libye après la mort de Kadhafi, même si son pays s’était à l’époque abstenu de voter favorablement à l’intervention de la coalition européenne. A été également évoqué ce qu’il est convenu d’appeler le miracle allemand, surtout après la débâcle pendant la seconde guerre mondiale et la perception par l’opinion de la gestion du pouvoir par Hitler. Quel état d’esprit a soutenu la renaissance allemande ?, a demandé un étudiant. «Nous étions il est vrai dans une situation complexe à la fin de la guerre, mais des pays comme la France, la Grande-Bretagne ou la Russie nous ont tendu la main. Et puis il nous a fallu faire un travail de mémoire. Il fallait discuter ouvertement de ce qui s’est passé, ne pas se voiler la face et avoir en perspective de se relever. Il faut en discuter, et même aujourd’hui, nous avons une certaine difficulté à assumer notre passé. Je pense que c’est par l’éducation, le dialogue franc  et les commémorations que l’on peut se développer. Pour ce faire, Dame Merkel a prêché la tolérance, le respect mutuel et  invité les uns et les autres à «ne pas penser que telle tribu est au-dessus de l’autre».

 

Les questions académiques n’ont pas non plus été occultées, et les germanophones ne sont pas passés par quatre chemins pour évoquer certaines difficultés, notamment la reconnaissance du baccalauréat burkinabè en Allemagne. Angela Merkel atténuera leur douleur en leur faisant savoir que même le bac français a des difficultés à se faire reconnaître chez eux. A l’issue des échanges, c’est une chancelière visiblement séduite par la qualité des questions qui a dit au revoir aux étudiants, non sans écrire son témoignage et sa précieuse signature dans le livre d’or de l’université.

 

Issa K. Barry

 

 

 

Encadré

 

Cette fois-ci, les étudiants ont assuré

 

 

 

C’est comme s’ils tenaient à avoir leur revanche, ces étudiants de l’université de Ouagadougou, qui voulaient faire oublier la débâcle née de leurs interventions pendant la visite de Macron au temple du savoir le 28 novembre 2017. Et le moins que l’on puisse dire est que l’exercice fut réussi. Leur mérite était d’autant plus grand que les intervenants n’ont pas été présélectionnés, à moins qu’Angela Merkel a court-circuité la procédure. Contre toute attente, c’est en effet elle qui, dans le lot des doigts levés, indexait qui elle voulait écouter, tout en respectant scrupuleusement la question du genre. Aussi bien en français qu’en allemand, les intervenants se sont bien exprimés et l’hôte du jour s’est même extasiée de la qualité de l’usage de la langue de Goethe par eux. Etaient tout également comblées les autorités de l’université,  qui ont apprécié le côté franc et direct de l’intervention d’Angela Merkel, et les étudiants, notamment Lianhoué Bayala en master II Littérature et Culture africaine, qui fustige encore le passage du président français. «Il s’agissait d’une catastrophe générale. C’est que, contrairement à cette dame (Angela Merkel), Macron est venu en seigneur et donneur de leçons avec un discours de deux heures. Aujourd’hui ça n’a pas été le cas. Je pense que le président du Faso devrait même de temps en temps se prêter à ce genre d’exercice».  

 

Dernière modification ledimanche, 05 mai 2019 15:52

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