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Débat : « Pourquoi on peut construire l’hôpital à Kua » (1)

Plus que jamais, la polémique sur le projet de construction, par les Chinois, de l’hôpital de référence de Bobo dans la forêt classée de Kua fait rage. Dans l’écrit qui suit, Emmanuel Traoré, environnementaliste, explique pourquoi, selon lui, on peut ériger l’infrastructure sur ce site à problème.

 

Depuis un certain temps, le problème de site pour  la construction de l’hôpital de référence de Bobo-Dioulasso ne cesse de défrayer la chronique. Nous venons à travers  une démarche pacifique, scientifique, cartésienne et professionnelle, contribuer au  débat en exposant explicitement notre point de vue sur le sujet. Personnellement, nous avons fréquenté l’école Kua de 1975 à 1981, années qui correspondent à nos six (06) années scolaires normales  de l’école primaire, c’est-à-dire du CP1 jusqu’au CM2 ; à dire de manière humble et modeste  que nous connaissons ne serait-ce qu’un peu ce quartier périphérique  de la ville de Sya. En plus de cela, et sans considération ethnique, notre maman est  Bobo et nous pensons connaître en toute humilité et en toute modestie un peu des us et coutumes de la majeure partie des habitants de cette banlieue bobolaise.

Tout d’abord permettez-nous de paraphraser le défunt président Thomas Sankara qui disait en substance ceci dans certains de ses discours : « …Tout le monde est malade…, à tout moment, tout un chacun de nous peut tomber malade et se retrouver sur un lit d’hôpital sans le savoir…, nous avons l’obligation d’assurer la santé des masses populaires…, l’on ne peut travailler que  lorsqu’on est en bonne santé… seul le travail crée le développement…, seul le travail libère… ».

Nous pensons sincèrement  que c’est  parce que nous sommes en bonne santé que nous parlons de la préservation de l’environnement qui en retour, nous donne la vie saine. En effet sans l’environnement, la vie n’existe pas. En nous faisant comprendre, nous voulons simplement insinuer le caractère inhérent de l’environnement sain et de la santé, gage de la vie et du bien-être  de tout un chacun de nous.

 

Le cadre juridique national

 

Sans pour autant offenser la sensibilité des partisans de la préservation de l’environnement et sans pour autant donner systématiquement raison aux partisans de la construction de l’hôpital de référence de la cité de Guimbi Ouattara  dans une forêt classée au regard de l’analyse et du résultat de l’AMCD, nous proposons de trouver le juste milieu, c’est-à-dire ,ce  qui sera bénéfique à tous  pour la réalisation de ce projet et cela sans incidence majeure sur l’environnement et à travers une approche participative.

Lorsqu’on se réfère au cadre juridique national, en se basant sur le Code de l’environnement et ses textes d’application, nous pouvons retenir ceci :

Le Code de l'environnement dans ses fondements actuels, date de 1994. La loi a été révisée en 1997 (005/97/ADP). Il a subi une relecture en 2013 par la loi n°006-2013/AN du 2 avril 2013. Le Code de l’environnement définit l’environnement comme « l’ensemble des éléments physiques, chimiques et biologiques naturels ou artificiels et des facteurs économiques, sociaux, politiques et culturels qui ont un effet sur le processus de maintien de la vie, la transformation et le développement du milieu, les ressources naturelles ou non et les activités humaines ».Cette loi vise spécifiquement à protéger les êtres vivants contre les atteintes nuisibles ou incommodantes et les risques qui gênent ou qui mettent en péril leur existence du fait de la dégradation de leur environnement et à améliorer leurs conditions de vie. Il fixe les règles fondamentales qui régissent l’environnement au Burkina Faso et instruit les pouvoirs publics de veiller à :

-                     la gestion durable des ressources naturelles ;

-                     l’amélioration continue des conditions de vie des êtres vivants ;

-                     la prévention et à la gestion satisfaisante des risques technologiques et des catastrophes ;

-                     la restauration de l’environnement.

Aux termes de l’article 25 du Code de l’environnement au Burkina Faso, «les activités susceptibles d'avoir des incidences significatives sur l'environnement sont soumises à l'avis préalable du ministre chargé de l'environnement»,sur la base d’une évaluation environnementale stratégique (EES), d’une étude d'impact sur l'environnement (EIE) ou d'une notice d'impact sur l'environnement (NIE). L’EIE est considérée comme « une étude à caractère analytique et prospectif aux fins de l'identification et de l'évaluation des incidences d'un projet sur l'environnement ».

A ce jour, plusieurs textes d’application du Code de l’environnement sont en cours d’élaboration ou de relecture. Parmi les plus importants en lien avec l’EIES, figure : le décret n°2015-1187/PRES-TRANS/PM/MERH/MATD/MME/MS/MARHASA/MRA/MICA/MHU/MIDT/MCT du 22 octobre 2015 portant conditions et procédures de réalisation et de validation de l’évaluation environnementale stratégique, de l’étude et de la notice d’impact environnemental et social. Il donne obligation au promoteur de tout projet ou programme de développement (personne physique ou morale, privée ou publique, auteur d’une demande d’autorisation pour ce projet ou programme) de produire une étude d’impact sur l’environnement qui permet aux autorités de disposer d’une appréciation globale des incidences environnementales de ce projet ou programme.

L’article 4 du décret n°2015-1187/ PRES-TRANS/ PM/ MERH/ MATD/ MME/ MS/ MARHASA/ MRA/ MICA/ MHU/ MIDT/ MCT du 22 Octobre 2015 portant conditions et procédures de réalisation et de validation de l’évaluation environnementale stratégique, de l’étude et de la notice d’impact environnemental et social instaure un criblage préalable du projet ou programme de développement sur la base de l'intensité, de l'étendue et de la durée des effets positifs et des impacts négatifs appréhendés sur l’environnement. Le criblage (article 4) aboutit au classement des activités susceptibles d’avoir des impacts significatifs directs ou indirects sur l’environnement en trois catégories :

-                     Catégorie A : Activités soumises à une étude d’impact environnemental et social (EIES) ;

-                     Catégorie B : Activités soumises à une notice d’impact environnemental et social (NIES);

-                     Catégorie C : Activités faisant l’objet de prescriptions environnementales et sociales.

 

De prime abord, j’étais consterné

 

Il va sans dire qu’en nous basant sur le cadre juridique national, le projet de construction de l’hôpital de référence de Bobo s’inscrit logiquement dans la catégorie A et doit être soumis à une EIES. C’est le résultat de cette étude, dotée d’une pertinente et soutenable synthèse opérationnelle qu’est le PGES, qui pourra nous orienter sur la faisabilité du projet.

En dehors de cet état de fait, tout  avis avancé  jusque –là sur la non réalisation de ce projet n’est que supputation et inquiétude, sans support matériel solide de fondement justificatif.

 Tout comme de nombreux concitoyens, à l’annonce de la « déclassification » éventuelle  de la forêt de Kua pour y  ériger un centre de santé, nous avons de prime abord subi  un sentiment de consternation, car  nous voyons en cela un mépris des autorités actuelles du pays envers la préservation de l’environnement voire un manque de respect aux biologistes,  forestiers, environnementalistes et autres qui ne cessent d’œuvrer pour la  protection de  notre milieu naturel pour notre survie et souvent au péril de leur vie. Cependant, au fil du temps, nous avons vu en ce projet une idée géniale, un engouement et une convoitise car nous avons à notre portée tous les moyens pour minimiser les impacts négatifs et optimiser les impacts  positifs de  la réalisation  de ce projet tant attendu par toute la population burkinabè. Nos partenaires de l’empire du Milieu qui seront la première puissance du monde à partir de 2050, ont toute la technologie nécessaire pour dessoucher les arbres qui seront impactés et les replanter sur un autre site répondant aux conditions morpho-pédo-bioclimatiques initiales et identiques  et y  ajouter d’autres pieds d’arbres, tout cela avec un taux de survie très élevé. Avec beaucoup de précautions, il n’y aura aucune perte d’espèces végétales, nous disons bien aucune perte d’espèces végétales et cela en connaissance de cause. Seule la régénérescence naturelle pourrait prendre un coup, mais avec la technologie convaincante de nos partenaires de la Chine populaire, une situation palliative sera vite trouvée. Nous proposons que cela se fasse sous le regard de nos vaillants biologistes et de nos braves forestiers et environnementalistes  avec un devoir de compte rendu hebdomadaire de cette « opération de replantation » à la population. Les marchés chinois étant toujours exécutés  par les Chinois, nous proposons la formation d’une équipe mixte sino-burkinabè et pluri-disciplinaire pour le suivi de la suite de l’opération de replantation pendant au moins une décennie. Ce faisant, la nature pourra engranger beaucoup plus d’arbres qu’elle n’en aurait perdus. Tout est une question de volonté, de méthode et de suivi méticuleux des mesures de compensation mentionnées dans le PGES de l’EIES.

 

Les Chinois savent y faire

 

Pour ce qui est de la protection de la nappe phréatique, des mesures adéquates  seront prises et les effluents générés  par les différents services hospitaliers seront canalisés et traités dans des endroits indiqués et contrôlés par les services techniques assermentés de notre pays. 

Nous croyons en nos partenaires de l’Empire du Milieu et nous sommes convaincus de leur technologie sans cesse croissante,  pertinente et convaincante.

Ne pas réaliser ce projet serait pour nous,  une démarche assassine et suicidaire truffée d’obscurantisme car, nous avons à notre portée assez de moyens pour optimiser les impacts positifs dudit projet.

Pour la réalisation ou non de ce projet, seuls les avis de trois principaux acteurs sont déterminants : il  s’agit du BUNEE, qui doit trancher sans réserve et de manière impartiale et professionnelle, sur la faisabilité de ce projet,  la décision du Conseil des ministres sur le projet de DUP, puis la partition de l’Assemblée nationale qui doit légiférer et acter ce déclassement.

Nous en appelons les uns et les autres au calme et à la retenue car la démarche belliqueuse n’a jamais résolu un problème…

Tout en étant convaincu que nul n’a le monopole de la vérité et que la contradiction est une essence de dynamisation de la vie dans une nation, nous attendons vos critiques et suggestions de manière citoyenne et constructive, pour améliorer  cet écrit. Nous vous remercions d’avoir consacré un peu de votre temps à nous lire et à nous comprendre à travers ces lignes.

 

Un environnementaliste, consultant indépendant

Emmanuel Traoré

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Sigle et Abréviation

AMCD : Aide multicritère à la décision

BUNEE : Bureau national des évaluations environnementales

DUP : Déclaration d’utilité publique

EIES : Etude d’impact environnemental et social

PGES  : Plan de gestion environnementale et sociale

 

(1) Les intertitres sont du journal

 

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