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Conclusions dialogue politique : La carte consulaire, seule fausse note de la symphonie de Kosyam

La révision a minima du Code électoral avant les élections de 2020  et intégrale après l’adoption de la nouvelle Constitution ; l’installation des bureaux de vote dans l’enceinte des Ambassades et Consulats généraux et en tout autre lieu en accord avec le pays hôte ; la réception des candidatures à l’élection présidentielle par la CENI ; voilà entre autres, les grandes décisions du dialogue politique qui a refermé hier ses travaux en présence du chef de l’Etat.  Après une semaine d’échanges, opposition et majorité sont parvenues à accorder leurs violons sur la quasi-totalité des points inscrits à l’ordre du jour. Une  seule fausse note dans la musique du consensus : l’utilisation de la carte consulaire biométrique comme document électoral.

 

Les deux coprésidents, Simon Compaoré et Zéphirin Diabré, animant conjointement un point de presse et échangeant des propos laudateurs devant les journalistes à la fin de la cérémonie officielle, s’il fallait retenir une seule image de ces sept jours de conclave entre les ténors de la vie politique burkinabè, c’est bien cet instant de camaraderie entre le chef de la majorité et celui de l’opposition. On est bien loin des séances de jet de flèches par conférences de presse interposées auxquelles les deux nous avaient habitués jusque-là. Une plainte du second contre le premier est aussi pendante en justice. Mais sous l’impressionnant lustre de la salle polyvalente du palais de Kosyam, qui a servi d’arbre à palabre depuis le 15 juillet dernier, il n’y avait pas de place pour les vieilles querelles « Tout s’est bien passé, très bien passé même», a dit tout sourire Zeph, se moquant de ceux qui ne vendaient pas cher la réussite de ce duo de choc qu’il forme avec Simon. On l’a même vu compléter un proverbe en anglais que l’ancien maire de la capitale, comme à son habitude, n’a pas manqué de déclamer. Et au-delà de leurs personnes, ce sont les deux camps qui  ont fumé, le temps de ce dialogue, le calumet de la paix face à la situation nationale assombrie par la menace sécuritaire. En rappel, deux grands points étaient inscrits à l’ordre du jour, à savoir  la relecture du code électoral et les élections de 2020 ainsi que la situation nationale. Chaque thématique étant achalandée de sous-points. A ce menu, qui avait été concocté par un comité préparatoire, les participants ont convenu avant le début des travaux d’adjoindre des questions relatives au financement des partis politiques et à la charte des partis et formations politiques.

A l’heure du bilan, tout le monde est satisfait. Seul un point n’a pas fait l’objet d’accord : l’utilisation de la carte consulaire biométrique comme document électoral. Sur les autres aspects, les 20 représentants de l’opposition et les 20 de la majorité ont fait de grands pas l’un vers l’autre. (Ndlr : Lire en encadré les conclusions).

Les participants ont aussi fait plusieurs recommandations, portant notamment sur le retour volontaire des exilés politiques et l’indemnisation des victimes des violences politiques. La santé du général Djibrill Bassolet a fait l’objet d’un plaidoyer de l’opposition. Le Président du Faso,  selon qui « la classe politique a fait honneur à notre peuple », s’est félicité de l’issue des travaux. « C’est avec beaucoup de satisfaction que nous accueillons les conclusions de ce dialogue, expression de notre commune volonté de bâtir une nation unie, démocratique et prospère », a affirmé Roch Marc  Christian Kaboré. Pour veiller à la mise en œuvre des conclusions, résolutions et recommandation, le chef de l’Etat a procédé à l’installation des membres du comité de suivi. Ce comité est composé des deux coprésidents, du rapporteur général  et de trois représentants de chaque composante dont un rapporteur.

 

Hugues Richard Sama

 

Légendes

1 : L’unité nationale en image, le chef de l’Etat entouré par tous les participants au dialogue politique

2 : Zéphirin Diabré et Simon Compaoré côte-à-côte pour un point de presse inédit

3 : Les membres du comité de suivi, chargés de s’assurer que les conclusions ne dormiront pas dans les tiroirs

 

 

Encadré

Les conclusions du dialogue politique

 

I-                 Au titre du Code électoral et des élections de 2020

 

1)   Positions consensuelles :

Relativement à la relecture du Code électoral :

-         la révision a minima du Code électoral avant les élections de 2020 ;

-          la relecture intégrale du Code électoral après l’adoption de la nouvelle Constitution.

Sur le vote des Burkinabè de l’extérieur :

-        l’installation des bureaux de vote dans l’enceinte des Ambassades et Consulats généraux et en tout autre lieu en accord avec le pays hôte ;

-        la gestion du contentieux des listes électorales des Burkinabè de l’extérieur par le Tribunal administratif de Ouagadougou, après dépôt des recours à l’Ambassade ou au Consulat général de rattachement ;

-        la prise en compte, dans le Code électoral, du fuseau horaire pour le vote des Burkinabè de l’extérieur.

Sur les opérations électorales :

-        le maintien des horaires d’ouverture et de clôture du scrutin respectivement à 06h et à 18h ;

-        la nécessité de la prise en compte, dans les processus électoraux, de la situation particulière des personnes déplacées ;

-        la réception des candidatures à l’élection présidentielle par la CENI, le Conseil Constitutionnel se chargeant de la gestion du contentieux et de la publication de la liste définitive des candidats ;

-        l’utilisation de la carte d’électeur  dans une période transitoire qui va jusqu’en décembre 2021 ; la suppression pure et simple du récépissé, et en conséquence la reformulation des articles 50, 53 et 265 septies du Code électoral ;

-        l’abandon définitif de l’acte de naissance comme document servant à l’inscription sur les listes électorales ;

-        la remise instantanée des copies de messages VSAT portant résultats des communes à chaque candidat ou à son représentant à l’élection présidentielle et, pour les élections législatives, à chaque représentant de composante et/ou regroupement d’indépendants ;

-        le maintien du mécanisme actuel de compilation des résultats des élections avec couplage des compilations manuelle et électronique ;

-        l’annonce par la CENI des résultats de l’élection présidentielle, commune par commune, dans la presse audiovisuelle, avant la proclamation des résultats globaux.

Sur le calendrier électoral :

-        le maintien du calendrier électoral conformément aux dispositions constitutionnelles, légales et aux textes supranationaux, c’est-à-dire la tenue effective des élections couplées présidentielle et législatives en 2020 et des municipales en 2021 ;

-        la détermination de la période de tenue du référendum laissée à la discrétion du Chef de l’Etat.

L’Opposition politique s’est toutefois opposée au couplage du référendum avec toute autre élection.

Sur la question du quota genre :

-        le positionnement alterné sur les listes de candidatures dans les 45 provinces et sur la liste nationale, pour les élections législatives ;

-        le quota de 30% sur les candidatures en tête de l’ensemble des listes de candidature présentées par un parti politique, un regroupement de partis politiques ou un regroupement d’indépendants sur l’ensemble du territoire national ;

-        la suppression de la sanction de rejet des listes de candidatures non conformes au quota ;

-        l’instauration d’une sanction positive en faveur des listes respectant le quota et le positionnement alterné ;

-        la prise de mesures d’accompagnement des femmes engagées en politique.

Sur l’élection au suffrage universel direct des Présidents de conseil des collectivités territoriales :

Le report des réflexions sur l’introduction du suffrage universel direct pour l’élection des premiers responsables des collectivités territoriales, après les élections de 2020.

Sur la CENI :

-        le principe de l’échelonnement des renouvellements des membres de la CENI aux 2/5 de chaque composante ;

-        la prise des dispositions réglementaires et financières nécessaires par le Gouvernement pour rendre la CENI opérationnelle.

2)   Position non consensuelle

Le seul point qui n’a pas fait l’objet de consensus et l’utilisation de la carte consulaire biométrique comme document électoral.

3)   Recommandations 

Les participants au Dialogue politique ont recommandé :

-        la prise en compte du genre dans la désignation des commissaires de la CENI et dans la composition de ses démembrements ;

-        la poursuite des réflexions sur l’institution d’une liste réservée aux femmes aux élections législatives ;

-        le respect de l’engagement du Chef de l’Etat pour les postes nominatifs à hauteur de 30%.

 

II- Au titre de la situation nationale

 

Sur la question sécuritaire

Les participants au Dialogue politique ont formulé des recommandations.

Recommandations

-        renforcer les capacités matérielles, financières et humaines des forces de défense et de sécurité ;

-        instaurer une contribution financière patriotique de toutes les composantes de la nation pour soutenir les efforts des forces de défense et de sécurité ;

-        susciter une mobilisation de tous les acteurs politiques autour d’une politique nationale de sécurité élaborée de façon consensuelle et fondée sur la réconciliation nationale qui induit le renforcement de la cohésion sociale ;

-        organiser un panel intra-muros sur les fondements du terrorisme en impliquant les forces de défense et de sécurité et certains érudits en question ;

-        élaborer et adopter de façon participative et solennelle un pacte patriotique national ;

-        impliquer les sociologues, historiens, anthropologues, ethnologues, hommes de culture, personnes expérimentées, etc., dans la réflexion sur le problème sécuritaire et dans la recherche des solutions ;

-        instaurer un dialogue permanent entre les acteurs politiques sur les questions sécuritaires ;

-        définir une stratégie pour canaliser l’intervention des partenaires techniques et financiers dans les secteurs de la défense et de la sécurité ;

-        renforcer le climat de confiance entre les forces de défense et de sécurité et les populations ;

-        adopter en Conseil des ministres un plan national pour la mise en œuvre des résolutions 1325, 1820 et 2242 du Conseil de sécurité des Nations unies qui impliquent les femmes dans toutes les questions de sécurité et de paix, gage d’un développement sécuritaire et humain durable ;

-        restaurer les normes et valeurs positives en impliquant les autorités morales (traditionnelles, coutumières et religieuses) dans la prévention et la résolution des problèmes liés à la sécurité ;

-        renforcer la communication avec les populations sur la sécurité ;

-        faire usage des moyens diplomatiques en faisant recours à des personnes expérimentées en complément des autres moyens de lutte ;

-        observer la discrétion lors de l’acquisition et de la réception du matériel militaire ;

-        appliquer les textes réglementaires sur l’utilisation des moyens de déplacement à deux roues ;

-        impliquer les médias dans la sensibilisation et l’éducation citoyenne des populations ;

-        mettre en place un fichier d’état civil fiable et numérisé ;

-        inclure la dimension sécurité dans le Service National de Développement ;

-        assurer un traitement diligent des dossiers judiciaires des  détenus pour faits de terrorisme.

Sur la réconciliation nationale

Les participants au Dialogue politique ont lancé un appel, pris des résolutions et formulé deux recommandations. 

Les participants au Dialogue politique recommandent :

-         la poursuite de la démarche de réconciliation nationale fondée sur le triptyque Vérité – Justice – Réconciliation ;

-         l’élargissement des concertations sur la réconciliation nationale   aux couches sociales du pays afin de prendre en compte le plus grand nombre d’opinions sur la question.

Résolution :

L’accompagnement de la classe politique au HCRUN pour l’atteinte de ses objectifs.

Sur l’unité nationale, l’autorité de l’Etat, la cohésion sociale et le civisme

Les participants au Dialogue politique recommandent de :

-         identifier les difficultés qui entravent l’unité nationale, la cohésion sociale et le civisme;

-         analyser les causes de l’incivisme en vue d’aboutir à des recommandations pertinentes à l’intention des autres composantes de la société qui ne sont pas parties au présent Dialogue politique ;

-        mettre fin à toutes les formes de favoritisme et de clientélisme dans l’attribution des marchés publics et à la promotion des cadres selon leur appartenance politique ;

-        redistribuer de manière équitable les richesses nationales et les investissements entre toutes les régions du Burkina Faso afin que tous les fils et filles du pays se sentent appartenir à une même nation ;

-        mettre fin à  l’impunité et à l’injustice, sources de tensions sociales pouvant conduire à de graves crises ;

-        impliquer l’ensemble des acteurs de la classe politique dans les réflexions sur les  questions importantes comme la sécurité, la défense de l’intégrité territoriale, le développement, etc. ;

-        indemniser toutes les victimes de l’insurrection populaire des 30 et 31 octobre 2014, du coup d’Etat manqué de septembre 2015 et les victimes non indemnisées des crimes politiques et économiques depuis l’indépendance  ;

-        lutter contre la stigmatisation des ethnies en l’érigeant en délit et rechercher les solutions aux conflits communautaires ;

-        instaurer une vigilance permanente pour le lancement de signaux forts conformes à la légalité en lien avec tous les manquements de portée nationale ;

-        respecter les engagements publics pris par les plus hautes autorités ;

-        accentuer la promotion des valeurs nationales avec un accent prononcé sur la frange enfants et jeunes ;

-        diligenter le traitement des cas avérés de violation des droits des communautés par la justice avec mise à disposition des moyens nécessaires ;

-        opérationnaliser les observatoires chargés de la prévention et de la résolution des conflits communautaires pour prévenir et désamorcer certains conflits communautaires latents ;

-        renforcer les moyens d’action des chefs des circonscriptions administratives afin qu’ils soient en mesure d’accomplir leurs missions de représentants de l’Etat dans leurs localités respectives ;

-        sécuriser les zones attaquées en vue de redéployer l’administration ;

-        réinstaller les déplacés forcés ;

-        impliquer toute la communauté nationale dans la lutte contre le terrorisme ; 

-        traquer et punir la corruption, les abus, les détournements à tous les niveaux de l’Etat ;

-        utiliser l’éducation morale et civique comme principal levier d’action pour l’unité nationale, l’autorité de l’Etat, la cohésion sociale et le civisme.

Sur la justice

 

Les participants au Dialogue politique recommandent de : 

-        renforcer les infrastructures et équipements, notamment informatiques, ainsi que les ressources humaines des Cours et Tribunaux ;

-        évaluer à mi-parcours la mise en œuvre du Pacte national pour le renouveau de la Justice pour un meilleur fonctionnement de la justice ;

-        accompagner l’institution judiciaire à travers toutes formes de sensibilisation des populations en vue de renforcer la crédibilité de ladite institution.

Par ailleurs, les participants au Dialogue politique invitent :

-        l’Exécutif à donner un signal fort à titre d’exemplarité en matière de bonne gouvernance ;

-        l’Exécutif et le Judiciaire à jouer pleinement leur rôle pour la célérité dans le traitement des dossiers de crimes de sang, de crimes économiques et politiques.

Sur le dialogue social

Les participants au Dialogue politique recommandent de :

-        renforcer les mesures en vue de la réduction du train de vie de l’Etat ;

-        prendre des mesures en vue du respect de la nature apolitique de la société civile ;

-        revoir le principe de nomination au sein de l’Administration, principe qui ne doit être basé que sur la compétence et le mérite ;

-        prendre toutes les mesures nécessaires en vue de la réduction considérable des inégalités sociales ;

-        renforcer l’employabilité et l’autonomisation des jeunes et des femmes ;

-        promouvoir l’accès des jeunes aux postes électifs et nominatifs ;

-        œuvrer à obtenir une trêve sociale, laquelle est nécessaire à un traitement équitable et à un dialogue social fécond sous l’égide du Haut Conseil du Dialogue social et des structures concernées ;

-        prendre des mesures pour établir l’équité dans le traitement des rémunérations des agents de la fonction publique et pour évaluer l’efficacité du service public rendu par le travailleur en fonction de sa rémunération.

Sur la relance et la gouvernance économiques

Les participants au Dialogue politique recommandent de :

-        mettre en place un fonds de soutien aux entreprises en difficulté ;

-        améliorer le climat des affaires de manière générale ;

-        engager des discussions avec les institutions bancaires et financières en général pour faciliter l’accès des entreprises au financement et au crédit ;

-        procéder au dédommagement des entreprises privées victimes des faits et pratiques préjudiciables de l’Etat ;

-        renforcer l’institution chargée de la répression en matière de corruption et de blanchiment d’argent.

Sur la gestion du foncier au Burkina Faso

Les participants au Dialogue politique recommandent :

-        la prise de mesures pour mieux encadrer les opérations immobilières ;

-        l’informatisation du fichier domanial et l’application des textes en vigueur ;

-        la relecture de la RAF et l’observation des textes relatifs au monde rural, pour respecter les droits des acteurs ;

-        l’apurement du passif foncier partout au Burkina Faso en apportant des solutions aux spoliations, en évitant les injustices lors des restructurations, grâce à la transparence et au dialogue avec les populations ;

-        la transparence, l’efficacité et la célérité dans la construction des logements sociaux ;

-        la prise en compte, dans les missions de l’Agence nationale des terres, du zonage clair des terres rurales pour parvenir à l’apurement du passif sur le foncier rural ;

-        l’application effective, par ladite Agence, des outils de planification de l’usage des terres.

Sur la législation des partis et formations politiques :

Les participants au Dialogue politique recommandent de :

-        harmoniser les textes législatifs sur les partis politiques ;

-        relire le texte sur le financement public des partis politiques dès la session parlementaire de septembre 2019 ;

-        prendre des dispositions pour le déblocage à temps du financement public ;

-        alléger les procédures de contrôle  de l’utilisation du financement public alloué aux partis politiques ;

-        soumettre les partis et formations politiques à un système de comptabilité différent de celui des entreprises.

Plaidoyer

Au terme des travaux, l’Opposition politique a fait un plaidoyer à l’endroit des plus Hautes Autorités pour un traitement diligent de la question de santé du Général Djibril BASSOLET.

 

 

Dernière modification lemardi, 23 juillet 2019 21:35

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