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Fête nationale : Indépendance ! Quelle indépendance ?

Le Burkina a soufflé ce 5 août les 59 bougies d’anniversaire de son indépendance. N’eût été le fait que ce jour est chômé et payé dans le pays, il passerait bien inaperçu dans le train-train des Burkinabè pour la bonne raison que les cérémonies de commémoration de la fête de l’indépendance, pour des raisons de commodités climatiques, ont été renvoyées depuis belle lurette au 11 décembre de chaque année.

 

 

Le 11-Décembre marque la proclamation, en 1958, de la République de Haute-Volta au sein de la Communauté française, évènement prélude à l’accès à la souveraineté internationale du pays. Si l’on remonte plus loin dans l’histoire, il importe de signaler que la colonie de Haute-Volta a été créée en 1919 et que cela fait donc cent ans que le colonisateur français a tracé les premiers sillons d’une communauté de destin entre les peuples du Burkina Faso actuel.

 

Une communauté de destin qui, à l’épreuve des avatars de l’histoire, connaît des  périodes de flux et de reflux. On retient ainsi parmi les périodes de reflux les 15 bonnes années de la période coloniale durant lesquelles cette colonie a été supprimée. En effet, pour des raisons économiques, notamment le besoin de main d’œuvre pour ses grands chantiers dans les territoires de l’AOF, la colonie de Haute-Volta fut disloquée en 1932, et son territoire partagé entre celles de la Côte d’Ivoire, du Dahomey, du Niger et du Soudan français. Mais par l’entregent de ses élus territoriaux au Parlement français comme Philippe Zinda Kaboré, Nazi Boni, Henri Guissou, des chefferies mossi et de l’Eglise catholique, la colonie de Haute-Volta sera reconstituée en 1947. Elle accède à l’indépendance, le 5 août 1960, dans les limites de son territoire de 1932.

 

59 ans après, qu’avons-nous fait de cette indépendance ? Comme bien de jeunes Etats africains, celui du Burkina est confronté à la gageure de construire des institutions fortes à même de favoriser le développement socio-économique du pays et la cohésion nationale, dans une dynamique de construction d’une nation avec la mosaïque de peuples que constitue sa population. Dans ce processus, les 30 premières années d’indépendance auront été marquées par une instabilité institutionnelle criarde : trois Républiques et 6 coups d’Etat ont donné toute la mesure des difficultés sociopolitiques que vit le pays, caractérisées par des antagonismes politiques parfois aigus, un puissant corporatisme syndical, la pauvreté et l’analphabétisme.

 

Si depuis 1991, on note une relative stabilité politique, la quatrième République battant le record de longévité des trois précédentes, les problèmes de développement restent entiers : 40% des Burkinabè continuent de vivre en dessous du seuil de pauvreté, c’est-à-dire avec moins d’un dollar US par jour ; 14% des enfants restent non scolarisés tandis que l’accès aux services sociaux de base tels que les soins de santé, l’eau potable, l’assainissement demeure une préoccupation pour la grande majorité de la population.

 

En clair, la stabilité institutionnelle, les progrès en matière de libertés démocratiques ne sont pas soutenus par une croissance économique porteuse de prospérité partagée, qui relèverait le niveau de vie du plus grand nombre. Pire, depuis bientôt cinq années, de graves problèmes sécuritaires, liés au terrorisme, menacent dangereusement et la coexistence pacifique des populations et l’intégrité du territoire national. Ce sont là des fondamentaux de la nation en construction qui sont fragilisés. On croise alors les doigts pour que ces difficultés, qui affectent actuellement les régions du Sahel, du Nord, du Centre-Nord et de l’Est ne s’aggravent pas davantage au risque d’hypothéquer l’avenir du pays tout entier.

 

En attendant, si aux grands défis du développement économique se greffent de graves problèmes sécuritaires, le Pays des hommes intègres, comme tant d’autres pays africains, donnerait raison à René Dumont qui a écrit au lendemain des indépendances, « l’Afrique noire est mal partie ». Sans verser dans cet afro pessimisme, nous nous demandons, en ce jour anniversaire de l’indépendance de notre pays, quel Burkina nous allons laisser aux générations futures.

 

Zéphirin Kpoda

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