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TICAD7: Le développement de l’Afrique entre deux coupes de saké

Au début était le sommet France/Afrique , lancé en 1973 sous Pompidou et où les mêmes chefs d’Etat,   qui boudaient et snobaient invariablement  les conférences de l’OUA,  accouraient pour voir le grand chef blanc tels des sous-préfets de la coloniale . Pour une bonne partie de l’opinion africaine et même hexagonale,   cette rencontre, d’abord annuelle, puis bisannuelle,  exhalait de forts relents néocolonialistes et  paternalistes  . L’Affaire  avait d’ailleurs fini par être rebaptisée Afrique-France pour donner l’illusion aux nègres, il est vrai numériquement supérieur  au  seul locataire de l’Elysée, qu’ils étaient les plus importants. Pour ce qui est du reste…

Depuis, ce genre de conférences des chefs d’Etat et de gouvernement a fait florès, chaque grande puissance voulant désormais son tête-à-tête avec ce continent noir qu’on dit être celui de l’avenir. Ainsi des sommets USA/Afrique, Europe/Afrique, Chine/Afrique, Inde/Afrique , Russie/Afrique (prévu en octobre prochain à Sotschi) ou encore Japon/Afrique. Le TICAD 7, entendez la septième conférence internationale de Tokyo sur le développement de  l’Afrique  , s’est ouvert hier 28 août 2019 à Yokohama où ont convergé des dizaines de nos dirigeants . Qu’est-ce qui fait donc courir tout ce beau monde ?

 Entre deux sakazuki ( coupes en laque pour boire le saké)   avec le premier ministre  Shinzo Abe, il sera  encore et encore question d’aide publique au développement mais aussi et peut-être surtout de commerce et d’investissements privés  , bref de partenariat gagnant/gagnant  pour reprendre cette formule maintenant galvaudée tant on la trempe dans toutes les sauces.

Mais aussi curieux que cela puisse paraître, ces rendez-vous périodiques  entre Le pays du Soleil-Levant et nous  ne soulèvent pas toujours les mêmes  vagues  que les  Chine/Afrique (l’Empire du Milieu étant accusé d’être un vampire suceur des richesses de notre sol et de notre sous-sol) ou les  Afrique/France par exemple, les brûlures de notre histoire commune expliquant, en partie dans ce dernier cas, les relations passionnelles qui nous  lient, on devrait dire qui nous déchirent.

Pour autant, on aurait tort de penser que  les autres sont désintéressés alors que l’Hexagone, c’est bien connu , n’a pas d’amis mais des intérêts ; et  que c’est juste par charité chrétienne, ou plutôt shintoïste ou bouddhiste que les sujets de sa Majesté Naruhito volent au secours de négrillons qui donnent parfois le sentiment de refuser le développement. Solidarité internationale pour solidarité internationale, si l’aigle américain, le coq gaulois, l’ours soviétique, le dragon  chinois ou le tanuki nippon font du berceau de l’humanité leur nouveau terrain de jeu ou de chasse, ce n’est pas seulement pour les beaux yeux des Africains, loin s’en faut.  C ’est   qu’ils y ont aussi le plus grand intérêt pour des raisons à la fois économiques et géostratégiques .

 Et comme la main qui donne est toujours au-dessus de celle qui reçoit, ces grandes puissances savent être impitoyables et iniques dans leurs relations commerciales avec le continent noir où ce n’est pas le vendeur de matières premières qui fixe son prix mais l’acheteur qui impose dans bien des cas le sien. A prendre ou à laisser .

  De toutes les façons, quelle que soit la contribution  que le TICAD ou des retrouvailles de la même veine peuvent apporter  à notre progrès économique et social, ce n’est que par nous-mêmes que nous pourrons sortir de la fange dans laquelle nous pataugeons depuis si longtemps. Comme les  Japonais l’ont fait après le désastre de la Seconde Guerre mondiale. Comme les Chinois l’ont réussi ainsi que de nombreux autres dragons asiatiques qui, il y a une cinquantaine d’années, étaient au même niveau que certains pays africains.

Tous ces monarques qui ont effectué le déplacement de Yokohama et qui n’ont parfois pour seul programme de gouvernement que de régner, en ont-ils seulement conscience ?

 

OUSSENI ILBOUDO

   

Dernière modification ledimanche, 01 septembre 2019 15:57

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