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10 000e numéro: L’Observateur d’hier à aujourd’hui

Sur le chemin de ses 10 000 éditions, votre journal s’est constamment réadapté pour être en phase avec l’évolution technique et technologique en matière d’information et de communication. Aujourd’hui, outre le print (l’imprimé), L’Observateur se décline également sur Internet et digitalise ses éditions pour être accessible partout.

Coup d’œil dans le rétroviseur de cette odyssée médiatique.

 

 

“On a travaillé jusque tard dans la nuit, et c’est vers 2 heures du matin que le premier journal a été imprimé. Cette nuit-là, on a tiré 1 000 exemplaires”. Ces propos qui sont de Tito Christophe Ouédraogo, ex-chef du service Laboratoire et actuellement à la retraite, témoignent que l’accouchement du premier numéro de L’Observateur n’a pas été chose aisée dans cette nuit du 27 au 28 mai 1973. Les choses n’étaient pas aisées d’autant plus que la section Imprimerie ne comptait que deux petites machines de la famille des Lithotype offset. Mais avec la détermination des fondateurs du journal et des travailleurs, L’Observateur a poussé son premier cri. Et ce numéro 00, daté du lundi 28 mai 1973, marque le début de l’aventure médiatique de ce quotidien vendu alors au prix facial de 25 FCFA.

Le personnel de la rédaction a été recruté par les soins de l’Office national de l’emploi et de la main-d’œuvre. Aujourd’hui à la retraite, Maurice Bamouni, qui a longtemps signé sous le pseudonyme Bali Kéïta, se rappelle avoir pris part en mars 73 à un concours de recrutement de journalistes : “Martial Ouédraogo, le créateur du journal, était passé par l’Office national de l’emploi et de la main-d’œuvre pour lancer ce concours ouvert à tout bachelier ou à toute personne ayant le niveau Bac”. Trois journalistes ont été recrutés : Hector Désiré Bationo, Léopold Sawadogo et Maurice Bamouni. Edmond Nana a vite rallié cette équipe et avec le directeur de publication, Edouard Ouédraogo, le nombre de rédacteurs a été ainsi porté à cinq. Et c’est sur le tas, dans la pratique quotidienne, qu’ils se forment au journalisme.

Cette équipe était épaulée par un maquettiste, Jean Lazare Bambara, et un dactylographe, Boua Narcisse Tanga, qui sera remplacé par Salam Zampaligré.

C’est à pied ou à moto que les journalistes se rendaient aux reportages et lorsqu’ils avaient besoin de faire des enregistrements, ils utilisaient une radiocassettes. Maurice Bamouni s’en souvient encore comme si c’était hier : “Il s’agissait de radiocassettes à six piles qu’on transportait sur l’épaule pour aller aux meetings, aux conférences de presse ou pour aller faire des interviews”.

C’est dire que si vous croisiez à l’époque quelqu’un tenant un calepin dans une main et ayant un poste radiocassettes sur une épaule, il s’agissait bien d’un journaliste allant ou revenant à un reportage ou en revenant. Ce n’est qu’en 1980 que L’Observateur aura son premier dictaphone. Cet appareil miniature a été offert au journal par Ernest Botzung du journal français “Les Dernières nouvelles d’Alsace”. “Ce joyau faisait l’objet de curiosité. Naturellement, un tel bien précieux était gardé dans un tiroir dans le bureau du directeur, et on ne le sortait que pour certains reportages comme à la présidence de la République ou à l’occasion de solennités”, se rappelle Maurice Bamouni.

Quand les moyens sont limités, le génie entre en jeu. Ainsi, ceux qui croient que le journaliste reporter d’images est une invention nouvelle, ils doivent déchanter. En effet, avec une équipe aussi réduite, difficile de faire les reportages en équipe. Du coup, le reporter était lui-même le photographe. C’est la raison pour laquelle les journalistes de L’Observateur avaient tous reçu une formation au studio AGFA-Photo. C’est ainsi qu’après le reportage, le journaliste retournait à la rédaction rédiger son article, remettait le manuscrit au dactylographe. Pendant que ce dernier était en train de taper l’article à la machine, notre reporter s’engouffrait dans le laboratoire photo du journal pour développer la pellicule et tirer les photos dont il avait besoin.

L’équipe a ainsi fonctionné jusqu’en 75-76 où L’Observateur a commencé à engager des photographes attitrés, déchargeant du même coup les journalistes de cette “corvée”.

Ben Idriss Zoungrana, dit “Kolo kolo”, photographe très connu aujourd’hui au Burkina, est d’ailleurs arrivé au journal à cette époque comme rédacteur. Mais par la suite, il s’est vite intéressé à la photographie, devenant l’un des tout premiers photographes de L’Observateur.

Si le travail n’était pas facile pour les journalistes, il l’était encore moins pour le dactylographe. Avec une machine mécanique à bande, il tapait tous les articles. Au clavier de cette machine inappropriée, Tanga Boua et, par la suite, Salam Zampaligré. Avec le temps, la machine mécanique sera remplacée par une machine électrique à boule. La section dactylo venait de connaître ainsi une petite évolution.

Quant au maquettiste, c’était un véritable travail manuel qu’il faisait. Il se servait d’un normographe pour écrire les titres des articles et composer la Une du journal.

L’Observateur a ainsi fonctionné avec très peu de moyens. C’est ce peu de moyens qui est parti en fumée lors de l’incendie le 10 juin 1984 de l’imprimerie du journal. Un incendie criminel qui est venu porter un coup de frein brutal à l’odyssée de ce canard. Ainsi, de 1984 à 1989, L’Observateur, cet espace d’expression démocratique, restera fermé. Il faut dire que depuis son lancement, outre les tenants du pouvoir, le journal a toujours ouvert ses colonnes aux syndicats, aux opposants et autres intellectuels qui n’avaient pas accès aux médias d’Etat.

En 1989, le journal, décidé à renaître de ses cendres, va acquérir des machines d’imprimerie pour relancer son odyssée intempestivement interrompue. Mais cette édition de la renaissance, datée du 27 janvier 1989, sera saisie par les forces de l’ordre, et les locaux du journal mis sous scellés trois jours plus tard. Pour empêcher le journal de paraître encore, les autorités sont allées jusqu’à faire ôter son compteur d’électricité. Privé de jus et vu que les imprimeries étaient rares à l’époque, c’est comme si on venait de lui porter un deuxième coup de poignard dans le dos.

C’est finalement le 15 février 1991, après 7 ans d’interdiction et d’incapacité de production, que le journal va reprendre définitivement ses parutions. Cette longue traversée du désert a porté un lourd préjudice au journal tout comme à son personnel.

Avec la reprise, à cause de certaines dispositions légales taillées sur mesure pour embêter le journal, L’Observateur sera obligé de changer de nom pour devenir L’Observateur Paalga. Petit à petit, le canard a commencé à se structurer.

Avec l’arrivée du premier ordinateur peu de temps après la reprise, le service de la Publication assistée par ordinateur (PAO) sera érigé.

Incontestablement, l’outil informatique est venu révolutionner merveilleusement le travail dans le secteur de la presse. A L’Observateur, cet apport appréciable s’est d’abord fait ressentir dans la section PAO avec un parc de 5 Macintosh. Cette dotation n’était pas pour déplaire à Maurice Bali Bamouni, alors secrétaire de rédaction, qui nous avait confié : “Aujourd’hui il nous arrive de faire des journaux de plus de 40 pages. Si on était resté à l’ère de la dactylographie, on ne pourrait pas le faire ou alors on travaillerait toute une semaine pour sortir un journal de cette taille”.

Le service du laboratoire bénéficie aussi très largement de la révolution numérique. En effet, en amont, la PAO exécute une grande partie du travail autrefois dévolu au laboratoire, la plus importante étant le volet photographique. Avec l’ordinateur, les photos sont directement insérées dans le texte avant d’arriver au labo. Il est en de même de la titraille des articles. Et mieux, depuis que les pages du journal qui sortent de la PAO sont imprimées sur des calques, le travail du laboratoire s’est simplifié. Les laborantins se contentent de faire le montage des pages et de les filmer directement sur les plaques d’imprimerie à l’aide de la machine à insoler.

Le chef de ce service le reconnaît sans détours : “Avec cette évolution, le travail qu’on faisait en 4 ou 5 heures, on l’accomplit maintenant en moins de 2 heures. L’essentiel du travail, que ce soit la composition de la page, le tramage des photos ou diverses corrections, est fait à la PAO”.

Un autre service que l’informatique a contribué à révolutionner, c’est sans conteste la section Photos. Le scanner permettait déjà de numériser les photos analogiques. Mais lorsqu’en 2002 la maison a acheté des appareils photos numériques, cela a été la bouffée d’oxygène. Depuis, pour les photographes, c’en est fini du travail dans le noir et de la manipulation des produits chimiques, notamment le révélateur et le fixateur.

Ne tarissant pas d’éloges face à cette révolution, Emmanuel Ilboudo, le chef de la section Photos, déclare : “Avec le numérique, on peut prendre autant de photos que l’on veut lors d’un reportage. De plus, quand on fait une photo, sur place, on peut la visualiser pour s’assurer de sa qualité et reprendre une autre si nécessaire. Chose que l’analogique ne permettait pas. Et quand on transfère les photos dans un ordinateur, à l’aide de logiciels comme Photoshop et Illustrator, on peut les traiter pour produire les effets spéciaux voulus”.

Pour avoir les informations sur les plans africain et international, il y avait dans le temps la radio à écouter. Mais le journal avait aussi contracté un abonnement payant auprès de l’Agence France Presse (AFP). Les dépêches tombaient sur un télescripteur placé dans le bureau du directeur. Pour les photos qui accompagnaient ces informations, un colis arrivait chaque semaine à la poste au nom du journal.

Un mode de collection d’information à présent dépassé. En effet, depuis 1998, L’Observateur dispose d’une connexion Internet analogique qui sera remplacée en 2002 par une connexion ADSL haut débit. Cela a permis de raccorder au Net une vingtaine d’ordinateurs. Avec les possibilités qu’offre le réseau des réseaux, le journal a résilié son contrat avec l’AFP pour se tourner vers cette nouvelle mine inépuisable où on trouve pratiquement, au niveau mondial, toute l’information dont on a besoin et gratuitement en plus.

Comme tout le monde, Tito loue les bienfaits du numérique. Mais il trouve que quelque part, cette révolution a enlevé une certaine valeur à leur travail. “Aujourd’hui, tout notre travail est déjà mâché à la PAO avant de nous parvenir au labo. C’est moins intéressant car on ne se creuse plus la tête. Avant, on développait notre génie pour tracer, composer les titres, tramer les photos, etc. Le travail est devenu si facile que ça rend paresseux”.

Au cours de l’odyssée, la section Imprimerie s’est aussi renforcée, a noté avec satisfaction Victor Nassa, le responsable de ce service. «De deux machines en 73, on est passé aujourd’hui à 7, à savoir 4 Lithotype offset et 3 Heidelberg offset. Pour découper le papier, notre vieille machine a été remplacée par un Massicot Multitex plus performant». Victor Nassa se réjouit que chacune des 7 machines eût une capacité d’imprimerie de 6 000 cahiers (double pages) à l’heure. Incontestablement, pour le chef de l’Imprimerie, la puissance des machines et leur nombre ont permis de faciliter et d’améliorer un tant soit peu le travail des imprimeurs.

Au fil du temps, le journal a aussi renforcé et rajeuni ses ressources humaines. Moins de quinze en 1973, le nombre d’employés de L’Observateur a pratiquement été multiplié par 8. En effet,  en prenant en compte les permanents et les temporaires, le journal alloue  actuellement un revenu mensuel à plus de 120 personnes.

Avec l’avènement des technologies de l’information et de la communication, L’Observateur se décline également sur la toile mondiale en prenant le virage du digital. Le site web du journal (www.lobservateur.bf) a déjà remporté deux prix dans la catégorie Presse (le Gambré d’or en 2005 et d’argent en 2008) lors du concours des meilleurs sites Internet au Burkina Faso.

L’Observateur Paalga est engagé à aller de l’avant dans cette révolution numérique, car le journal dispose d’une grande marge de progression, vu que les technologies de l’information et de la communication sont en fait un vaste champ qu’on est loin d’avoir fini d’explorer et d’exploiter. Aujourd’hui, bêcher dans l’univers digital est devenu un devoir impérieux pour tout journal qui veut se réinventer et tirer partie du numérique qui est aujourd’hui un relais de croissance pour les médias. L’évolution du monde et les innovations technologiques le commandent. Un passage obligé donc pour tout journal qui veut se faire une place dans le vaste paysage médiatique mondial. Comme la termitière qui a besoin d’ajouter de la terre à la terre pour vivre, les journaux n’ont plus vraiment le choix, il leur faut s’allier les technologies de l’information et de la communication et les utiliser pour en tirer un meilleur profit pour continuer à exister. Et L’Observateur outre son site Internet (www.lobservateur.bf), a créé une page Facebook (https://www.facebook.com/lobservateurPaalgaBF/) qui est suivie par près de 100 000 internautes.

L’Observateur a également innové avec la mise à disposition de sa version digitale qui reprend l’intégralité du contenu du journal de chaque édition, et ce, de la première à la dernière page. Cette version numérique est accessible sur la plateforme de L’Obsdigital (www.lobsdigital.com). Ainsi, tous ceux qui n’ont pas accès au journal physique peuvent, à coup de clics, lire l’intégralité de l’édition de L’Observateur du jour, et cela où qu’ils se trouvent dans le monde entier.

Pour les alertes sur l’actualité, LobsSms a été créé. Pour y avoir accès, l’abonné au réseau de Telmob (Onatel) doit simplement composer *343# ok ou appel, pour choisir sa formule (durée) de souscription.

Mais L’Observateur n’entend pas s’arrêter en si bon chemin. Il continue d’étudier de nouvelles pistes pour proposer de nouveaux produits médiatiques sur Internet. Refonder et booster son print et développer sa présence sur la toile mondiale, voilà les défis majeurs que L’Observateur entend relever dans l’immédiat.

 

San Evariste Barro

 

 

Encadré n°1

Les grandes dates de L’Observateur

 

28 mai 1973 : date de lancement du journal ;

10 juin 1984 : incendie criminel de l’imprimerie ;

27 janvier 1989 : reprise manquée du journal. Ce jour-là l’édition a été saisie ;

30 janvier 1989 : les locaux du siège du journal sont mis sous scellés ;

15 février 1991 : le journal reprend sa parution.

 

 

Encadré n°2

La première saisie du journal

 

La censure est un vice aussi vieux que le monde. Un fléau qui sévit depuis dans le milieu des médias et qui n’a hélas pas manqué de frapper L’Observateur. En effet de 1973 à 1984, le journal sera saisi à de multiples reprises. Mais nous allons nous intéresser ici à la toute première censure qui nous a frappés. Elle est intervenue alors que L’Observateur n’avait même pas un an.

Cette épée de Damoclès qui pendait au-dessus de la tête du journal a fini par tomber le samedi 4 mai 1974 sous le régime du général Lamizana. Objet de cette fatwa, une longue tribune signée par le Pr Joseph Ki-Zerbo et intitulée : “L’armée voltaïque et notre avenir”. Cet article critiquait la prise du pouvoir par les militaires le 8 février 1974.

De mémoire du directeur de publication de L’Observateur, Edouard Ouédraogo, “c’est bien la première fois, à ma connaissance, qu’un journal a été saisi dans notre pays”.

Déjà, à l’époque, il y avait un Comité interministériel chargé du contrôle de la presse. L’organe de censure par excellence. C’est entre les mains des membres de ce comité qu’il fallait déposer un exemplaire du journal, dans un délai de six heures, avant sa mise en circulation pour ce qui est des quotidiens et 48 heures pour les autres périodiques.

C’est lorsque le Comité a pris connaissance de cet article qu’il a ordonné la saisie de l’édition de ce jour-là en dépêchant la police au siège du journal pour exécuter cet ordre liberticide.

Le directeur de L’Observateur se souvient que l’opération de saisie consistait à emporter tous les exemplaires du numéro incriminé ainsi que les plaques ayant servi à son impression.

 

San Evariste Barro

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