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Elucubreur philosophe… philosophe élucubreur…

J’ai beau avoir l’élucubration chevillée au corps, je me doutais bien que ça m’arriverait un de ces quatre mardis. Mais je ne pensais pas que ce serait si tôt, encore moins le premier mardi de l’année nouvelle. D’habitude, le premier mardi de l’année les élucus coulent à flots. Tandis qu’aujourd’hui je me suis levé le matin sans la moindre envie d’élucubrer.

 

Je devrais même dire que je me suis levé avec un sentiment de dégoût pour les élucubrations. Ça ne m’était jamais arrivé. Ils me le payeront ces terroristes de malheur !  14  morts, dont 7 élèves ! Il y a eu pire carnage, je sais mais cette fois j’ai comme l’impression que ces fils du diable ont pris le dessus sur moi en m’ôtant l’envie d’élucubrer. Je passe à autre chose. Tiens, et si je philosophais ? Et si je philosophais  comme le Professeur Mahamadi  Sawadogo de l’Université Joseph Ki-Zerbo…

J’ai déjà entendu dire qu’entre la philosophie et l’élucubration il n’y a qu’un pas. Sauf que le Professeur Mahamadi Sawadogo  est un philosophe de gauche opérant à la Maison Norbert Zongo et que moi je suis un élucubreur  n’opérant nulle part. J’en connais qui vont trouver que je suis en train d’élucubrer alors que j’ai dit à l’instant que je quittais les élucubrations pour autre chose. C’est vrai, mais qu’y puis-je ? Chassez le naturel, il revient au galop.

Mais laissez-moi soumettre une doléance au Général Miningou, notre Chef d’Etat-major Général bien aimé. Tous mes respects mon Général !  Je viens avec révérence vous soumettre une doléance. Mon Général, bannissez donc de votre vocabulaire ce mot ‘’Neutraliser’’ pour designer ce que nous savons. D’accord, c’est un mot qui vous vient des Gaulois qui l’ont utilisé à Dien- Bien-Phu et dans les Aurès lorsqu’ils traquaient le Vièt-Minh et aussi les Fellagas en Algérie. Vous employez ce mot pour dire que vous avez fait passer un terroriste de vie à trépas. Mais hélas, ce terme ‘’Neutraliser’’ prête à confusion par ce que pouvant signifier qu’un terroriste a été seulement mis hors d’état de nuire. Le Capitaine Thomas Sankara nous a appris qu’il faut appeler les choses par leur nom et qu’un chat est un     chat. Un terroriste qu’on fait passer de vie à trépas est un terroriste tué. Pas neutralisé. Il peut être un terroriste égorgé.  Pas neutralisé. Il peut être un terroriste  pendu. Pas neutralisé. J’ai dit pas d’élucubrations ce mardi. Place donc à la philosophie.

Comment s’est passé votre Jour de l’An ? Votre 1er Janvier je veux dire?

Moi,  des 1er Janvier j’en ai vus à la pelle. Gloire à Dieu ! Oui, les 1er Janvier j’en ai vus tellement qu’ils ont commencé à se rétrécir. Au point que les 1er Janvier qui sont derrière moi sont plus nombreux que les 1er Janvier qui sont devant moi. Bientôt je serai face au dernier 1er Janvier qui d’ailleurs a commencé à m’envoyer des signes. Des signes que je comprends aisément. J’en ai reçu un Vendredi et je vous assure que ce n’est pas de la blague.

 Je voulais lancer un appel avec mon portable. Pas de portable sur ma table d’élécus. Je regarde à côté du gros Dico. Pas de portable. Je vais au salon pour voir sur la table de Télé. Pas de portable. Je me rends dans ma chambre et cherche sur le lit. Pas de portable. Le tiroir du lit. Pas de portable. Je vais alors voir Madame Toégui qui était occupée à voir du Nollywood comme toujours et lui demande de m’appeler sur mon portable afin que je retrouve mon téléphone. Elle me regarde l’air surprise et me demande :

-Ton téléphone, tu dis ? Qu’est-ce que tu tiens en main là ?

C’est vraiment plus dur que je ne pensais. Le dernier massacre terroriste m’a fait quelque chose. Trop c’est trop !

 Il y a très longtemps, lorsque je voyais à la Télévision des images de guerre au Rwanda, au Sud Soudan ou même en Afghanistan, avec des hordes de populations  en débandade, dans un sauve- qui- peut général où des maris abandonnent leurs épouses et où des mamans courent pour se chercher sans se préoccuper de leurs enfants, quand je voyais des camps avec des tentes de  fortune et des distributions de nourriture, je disais à Madame Toégui : « Des situations de ce genre il faut prier Dieu qu’elles n’arrivent pas dans un pays voisin encore moins dans son propre pays ».

Mais voilà qu’on parle de ‘’Déplacés internes’’ dans mon Faso à moi. Mon Faso que j’aime tant puisque je n’en ai pas d’autre. Je ne l’aurais jamais cru. Seigneur Seigneur ! Mais ici aussi, comme pour le terme ‘’Neutraliser’’ je n’aime pas beaucoup, cette expression ‘’Déplacé interne’’. Un chat est toujours un chat. Nos parents qui quittent leur village chéri pour se réfugier dans une autre ville ou dans la capitale, ce ne sont pas des déplacés.  Ce sont des refugiés. Ils cherchent un refuge pour échapper à la mort, abandonnant troupeaux et réserves de céréales. C’est un refugié je dis. Dans son propre pays, en ayant laissé des cadavres de proches derrière lui. Un chat est un chat. Oh mon Dieu !

Allons à la philosophie. La philosophie au moins, ça ne fait pas couler des larmes.

De 1er Janvier en 1er Janvier il y aura bien un dernier 1erJanvier. Ce sera un matin. Si ce n’est pas un matin ce sera alors un soir. Forcément, et rien n’y fera. Et c’est bien ainsi. La maman de Johan n’aime pas que je parle ainsi. Johan, c’est ce petit commando qui a atterri chez moi il y a 3 ans et qui impose sa loi. Il défend à sa Mamie et à moi son Papy de voir une autre chaine de Télévision que  la sienne qui ne diffuse que des dessins animés. Gare à qui touchera à la télécommande ! Ses cris ameuteront tous les voisins alentour. Oui, ce bout de chou est venu ajouter de la dictature à la dictature. Moi qui avais déjà la dictature de Madame Toégui à subir avec ces navets de films Yorubas. J’ai dit films Yorubas ? Plutôt du Théatre-cinéma Yoruba, avec toujours les mêmes Rois et Reines, avec toujours les mêmes Princes et Princesses, avec toujours les mêmes Sorciers et Sorcières.

Le dernier 1er Janvier, la maman de Yohan ne veut pas qu’on en parle. Pourtant elle doit savoir, que le dernier 1er Janvier est indubutable. Heureusement qu’il y aura un dernier 1er Janvier. Heureusement qu’il y a un dernier 1er Janvier pour chacun. La vie serait invivable s’il n’y avait pas un dernier 1er Janvier pour tout le monde. A la maman de Johan je dis ceci :

-Tu sais pourquoi  tu viens nous voir tous les 1er Janvier et très souvent ensuite ? C’est parce que tu sais qu’il y aura un dernier 1er Janvier un jour. Et qu’après ce dernier 1er Janvier il n’y aura plus de 1er Janvier pour nous. Si Mamie et moi devions être là éternellement, éternellement, éternellement, tu ne viendrais plus nous voir. A quoi bon, puisque nous serons là éternellement, 1er Janvier ou pas 1er Janvier. C’est comme les R+ de Ouaga 2000 Si tous les 20 millions de Burkinabè avaient chacun une R+ à Ouaga 2000, la vie serait invivable. C’est comme les V8. Si les 20 millions de Burkinabè avaient chacun une V8, la vie serait invivable parce que sans plaisir. Et si toutes les Quota genre étaient toutes les mêmes : belles, belles, belles… 

Belles comme elles l’étaient toutes le jour de Noël…

Bonne année encore !  Et de tout cœur…et que votre dernier 1er Janvier vienne le plus tard possible.

Mes respects Monsieur le Professeur Mahamadi Sawadogo !

 

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