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Excès d’alcool dans l’organisme : Le « Dry january » pour se remettre d’aplomb

Ne pas boire une goutte d’alcool durant le mois de janvier, voilà en quoi consiste le « Dry january », dont l’objectif est de permettre à l’organisme de récupérer après les excès enregistrés lors des fêtes de fin d’année. Ce challenge a été initié en 2013 par une association britannique et repris par d’autres pays comme la France (avec le Mois sobre), où le mouvement a fait des vagues, soulevant ainsi des questions chez certains observateurs burkinabè. Ils se demandent en effet quels peuvent être les avantages d’un mois sans alcool. Pour le savoir, nous avons rencontré un médecin de santé publique, le Dr Hubert Traoré, le lundi 13 janvier 2020 à Ouagadougou. Il s’est également prononcé sur le caractère addictif de ce produit, très prisé sous nos cieux malgré ses conséquences sur la vie et la santé.

 

Les Burkinabè se sont-ils remis de la fièvre des fêtes de fin d’année ? Pas sûr ! Il suffit de regarder attentivement pour voir que certains ont toujours la tête dans les nuages, et les excès en matière de repas ne participent pas à arranger les choses. Les spécialistes conseillent en général d’adopter une alimentation légère et saine, de boire beaucoup d’eau pour éliminer les toxines et d’avoir une bonne hygiène de vie au quotidien en pratiquant une activité physique.

Pour ceux qui profitent de ces occasions pour consommer les boissons alcooliques sans modération, il y a ce challenge, le Dry january, qui encourage les uns et les autres à ne pas boire une goutte d’alcool durant tout le mois de janvier. Lancé en 2013 au Royaume-Uni par l’association « Alcohol change UK », ce mouvement a été partagé dans plusieurs pays dont la France avec le Mois sobre qui a eu du mal à s’imposer. Et même si les positions divergent dessus, certains spécialistes français estiment par exemple que le foie peut être un peu trop chargé de graisse avec une alimentation trop riche et une prise excessive d’alcool. A leur avis, « le Dry january est un excellent moyen pour booster le processus d’élimination des toxines ».

Au Burkina Faso, 15e pays africain où on consomme le plus d’alcool selon le classement de l’OMS (Organisation mondiale de la santé), le Dr Hubert Traoré partage un peu cette vision. En effet, il croit avant tout qu’il ne sert à rien de traumatiser son organisme, fête ou pas fête. « L’idéal serait de consommer de façon modérée», a-t-il expliqué. En sus, il a apprécié le fait que ce challenge peut permettre aux gens de prendre conscience du danger : « C’est en cela que ce mouvement peut être vraiment salutaire ». C’est d’ailleurs avec désolation que le médecin de santé publique a évoqué le cas des nombreux Burkinabè qui ruinent leur santé avec les boissons frelatées. « Quand vous entrez aux confins du pays, vous voyez des jeunes d’à peine 25 ans qui ont l’aspect d’une personne de 45-50 ans. Dans les cabarets des quartiers périphériques de Ouagadougou, ce n’est plus le dolo simple de nos grands-parents. On y ajoute du pastis, du gin, etc. Y en a même qui y mettent de petits comprimés d’amphétamines », a-t-il expliqué, soulignant que « ce sont autant de substances qui favorisent l’addiction ».

 

A quel moment on parle d’addiction

 

A la question de savoir si l’alcool seul peut rendre quelqu’un dépendant, ce professionnel, qui dirige un programme de réduction des risques chez les consommateurs de drogues dans une ONG, répond par l’affirmative. A l’en croire, l’alcoolique, c’est celui qui commence à boire dès son réveil. Et les experts se basent sur les critères établis par L’OMS (Organisation mondiale de la santé) et l’American psychiatric association pour savoir à quel moment on parle d’addiction à un produit ou à un comportement : entre autres, il y a le besoin impérieux et irrépressible de consommer, la perte du contrôle de la quantité et du temps dédié à la prise de substance, l’augmentation de la tolérance au produit ( on en prend beaucoup plus et manifeste le syndrome du sevrage ou du manque), l’incapacité à remplir ses obligations (sociales), les problèmes personnels ou sociaux et les activités réduites au profit de la consommation (activités de la famille). Lorsqu’une personne réunit deux à trois critères, c’est une addiction faible, entre quatre et cinq, on parle d’addiction modérée, et quand c’est plus de six, c’est une addiction sévère. Notez qu’il est possible de s’en sortir même si ça demande beaucoup d’efforts personnels. Il faut aussi l’accompagnement de l’entourage et des services de santé (addictologues) pour une prise en charge psychologique, une désintoxication et une éducation pour faire face aux situations qui incitent à la boisson (à travers les groupes de parole).

Au-delà de ce risque addictif, le fait de boire excessivement de l’alcool peut être nocif à l’organisme : ainsi, les personnes concernées peuvent avoir une inflammation des gencives (gingivite), un cancer de la langue, de la gorge et de l’œsophage, des ulcères d’estomac et des gastrites. Une prise répétée entraîne aussi des maladies hépatiques, notamment la cirrhose du foie (vomir du sang en est un des symptômes) qui, pour un certain nombre, va muter en cancer du foie. S’agissant du système cardiovasculaire, il y a les conséquences sur les vaisseaux. Le consommateur va faire de l’hypertension artérielle, donc il sera exposé aux AVC (accidents vasculaires cérébraux), aux crises cardiaques et aux cardiopathies dilatées (le cœur augmente de volume et devient inefficace). Au niveau du cerveau, il y a les pathologies psychiatriques : « Lorsqu’il ne boit pas, il est stressé, il ne se sent pas bien du tout », a expliqué le Dr Traoré. L’alcoolique peut également développer des neuropathies périphériques. Cela signifie que la sensibilité des pieds diminue, la plante des pieds chauffe et il ressent des douleurs.

Le Dr Hubert Traoré, lors de notre entretien, a insisté sur le mode de vie des Burkinabè, notamment ceux qui construisent leur vie autour de l’alcool : « Les uns et les autres doivent prendre conscience que nous vivons mal, et que cela aura des conséquences à la longue. Certains ont même un sport favori qui est de se retrouver le week-end pour descendre des caisses de bière. C’est nocif, car quand on prend des quantités qui dépassent ses capacités de détoxication, ça empoisonne le sang, par conséquent de plus en plus de jeunes meurent d’AVC ou de problèmes cardiaques. On peut se retrouver entre amis et boire modérément ». Par ailleurs, des études ont démontré que le fait de prendre un verre d’alcool (le vin surtout) au cours du repas et non en dehors, permet de protéger le système cardiovasculaire, à condition d’avoir une vie saine ; autrement dit, il ne faut pas manger trop gras, trop salé, trop sucré, boire de l’alcool en dehors des repas ; par contre, il faut consommer léger le soir et pratiquer le sport.

Zalissa Soré

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