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Affaire Isabel Dos Santos : Les Luanda Leaks ou la rançon d’une gestion patrimoniale

Le Consortium international des journalistes d’investigation (ICIJ) a encore frappé fort. Après les fameux Panama Papers,  Luxembourg Leaks, Swiss Leaks, China Cables et autres grandes enquêtes qui ont défrayé la chronique, cette rédaction internationale, forte de 120 journalistes et de 36 médias partenaires à travers le monde, a cette fois-ci épinglé Isabel dos Santos et Sindika Dokolo.

 

La première n’est autre que la fille de l’ancien président angolais Jose Eduardo Dos Santos qui a passé la main en septembre 2017 à son ministre de la Défense Jao Lourenço, et le second, son époux, fils du premier banquier zaïrois sous Mobutu. Des enfants bien nés, dira-t-on !

Les deux formaient l’un des couples les plus en vue sur le continent, mais c’était aussi un duo en or pour des raisons évidentes.

Celle que ses compatriotes avaient méchamment surnommée « la petite fille aux arachides » était d’ailleurs réputée être la femme la plus riche du continent et a notamment dirigé la très lucrative Sonangol qui gère la manne pétrolière angolaise et contribue à hauteur d’un tiers du PIB de l’Angola.

Au total, ce sont quelque 715 000 fichiers, essentiellement confidentiels, qui expliquent par le menu détail l’organisation et le fonctionnement de 400 entreprises et filiales dispersées dans une quarantaine de pays et dans lesquelles le célèbre couple détiendrait des parts.

Les enquêteurs des Luanda Leaks ont ainsi eu accès à des courriers, des pièces attachées, des contrats, des procès-verbaux de réunions de conseils d’administration, des organigrammes, des rapports de gestion et des conventions de prêts.

Et quand bien même dans ces centaines de milliers de pages les deux incriminés n’interviendraient pas directement, ils se réfugieraient derrière des sociétés écran, des prête-noms et des intermédiaires plus ou moins véreux pour passer entre les mailles du filet. C’est donc un véritable labyrinthe économico-financier dans lequel on se perd facilement, à moins que ce ne soit une ruche où Isabel joue le rôle de reine pendant que les nombreuses petites mains butinent à qui mieux mieux.

Autant dire que c’est un travail de bénédictin, comme à l’accoutumée, que le consortium s’est attelé à faire pour mettre à nu cette entreprise prédatrice qui a fait main basse sur les ressources de l’Angola, même si beaucoup de gens se doutaient bien que ce duo s’est pendant longtemps payé sur la bête quand papa était aux affaires dans tous les sens du terme.

On peut certes trouver le timing de ces révélations un peu suspect, elles interviennent en effet quelques jours après qu’Isabel Dos Santos a déclaré sa candidature à la présidentielle de 2022. On peut encore trouver qu’elles sont une chasse aux sorcières et des règlements de comptes après la perte du pouvoir par les Dos Santos, mais peut-on raisonnablement penser que la bonne dame aurait accumulé autant de richesses si son géniteur n’avait pas dirigé l’Angola  38 longues années ?

Et comme c’est souvent le cas dans ces autocraties, le clan finit invariablement par confondre les caisses de l’Etat à sa propre poche, et les fils et filles sont placés à des postes stratégiques au sommet de l’appareil d’Etat. C’est cette gabegie  qui est en train de rattraper Isabel, laquelle fait déjà l’objet avec son époux et son frère Jose Filomeno, ancien président du Fonds souverain angolais, de poursuites judiciaires à Luanda pour de présumés détournements  de fonds.

Et on craint pour eux que la justice angolaise ne boive aux sources des Luanda Leaks pour bétonner davantage son accusation.

 

Hugues Richard Sama

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