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Situation sécuritaire G5 Sahel : Cette exception mauritanienne qui interroge

Fin de mission pour Roch Marc Christian Kaboré lors du 6e Sommet du G5 Sahel, tenu hier mardi 25 février 2020 à Nouakchott.

 

On ne sait pas si sa mission a été bien accomplie, mais en passant le témoin à son homologue mauritanien, Mohamed Ould el-Ghazouani, le chef de l’Etat burkinabè devait être animé d’un sentiment de soulagement.

En effet, la présidence en exercice du G5 Sahel qu’il a assumée pendant une année aura coïncidé avec une recrudescence des attaques terroristes au Mali, au Niger et particulièrement au Burkina Faso où le Centre-Nord et le Sahel sont devenus des localités martyres.

Dans les trois Etats concernés, les actions des groupes armés auraient fait ces cinq derniers mois des centaines de victimes et engendré une crise humanitaire avec ces déplacés internes estimés à près de 600 000  rien qu’au « Pays des hommes intègres ».

C’est dans ce contexte apocalyptique que s’est tenu le 6e Sommet du G5 Sahel à Nouakchott, censé poser des actes forts dans la lutte contre le péril djihadiste, notamment dans la zone dite des « Trois frontières », une espèce de no man’s land où sévit l’Etat islamique au grand Sahara (EIGS). 

Déjà au Sommet de Pau, en France en mi-janvier dernier,  Emmanuel Macron et les cinq chefs d’Etat du G5 Sahel avaient pris, entre autres résolutions, celle de concentrer leurs efforts sur cette partie du Sahélistan. Une décision, il est vrai, qui a été suivie d’effets quelques semaines plus tard, la France ayant envoyé des renforts logistiques et humains, faisant ainsi passer ses effectifs de la Force Barkhane de 4 500 à 5 100 hommes.

Cette même Force Barkhane entend également remporter la guerre médiatique puisqu’après ses nombreux procès en inutilité, voire en complicité avec les terroristes, elle se fait désormais le devoir de publier régulièrement des communiqués de presse sur les bilans de ses opérations. Comme ce fut le cas la semaine dernière avec l’annonce de la neutralisation de 120 terroristes dans la région de Tilabéri au Niger.

Le hic est que ces informations sont pour le moins difficiles à vérifier, même si on sait qu’une armée régulière ne peut faire de publicité morbide sur ses trophées de guerre, contrairement aux groupes armés, dont la communication est fondée justement sur la diffusion de leurs méfaits.

Pour tout dire, la victoire militaire définitive n’est pas pour demain, au regard des résultats plutôt mitigés tout comme le sont ceux de l’Alliance Sahel, coordination d’une partie des bailleurs de fonds du G5 Sahel, qui a tenu ce même mardi son assemblée générale dans la capitale mauritanienne.

Puisque cette guerre, de l’avis général, doit se gagner aussi sur le terrain du développement, l’Alliance Sahel est appelée à coordonner les financements et à déterminer les priorités.

Sauf que, là aussi, on ne voit pas grand-chose pour le moment, et on a même souvent le sentiment que les sommets, les colloques et ateliers engloutissent des sommes astronomiques qui auraient été plus utiles sur le terrain.

Dans un tel contexte, la présidence en exercice mauritanienne peut-elle donner un nouveau souffle au poussif G5 Sahel ?

Oui, disent certains, tablant, d’une part, sur le fait que l’actuel chef de l’Etat, Mohamed Ould el-Ghazouani, ancien ministre de la Défense sous le gouvernement de son prédécesseur, prend les rênes du G5 Sahel avec de solides connaissances militaires et, d’autre part, sur le fait que, depuis 2011, le pays de Moktar Ould Daddah n’a enregistré aucune attaque sur son territoire.

Dans le second argument, on peut certes voir la preuve de l’efficacité des Forces de défense et de sécurité ainsi que des Services de renseignements mauritaniens.

Mais on peut aussi s’interroger sur cette exception mauritanienne, véritable dune de tranquillité dans un Sahel tourmenté.

En effet, certains voient dans ce cas singulier le résultat d’un pacte que la Mauritanie aurait secrètement scellé avec le diable pour être épargnée de ses foudres. Et c’est cette espèce d’égoïsme national qui constitue une des faiblesses notoires de ce G5 Sahel dont les membres sont couchés sur la même natte mais n’ont certainement pas le même rêve.  

C’est qu’au-delà des réponses communes, chaque Etat, pris isolément, expérimente sa propre recette.

Le Mali n’a-t-il pas récemment décidé officiellement  de prendre langue avec ses pires ennemis que sont Iyad Ag Ghali, chef du GSIM, et Amadou Koufa, fondateur de la katiba du Macina, dans l’espérance, plutôt candide, de bénéficier de leur magnanimité ?

 

Alain Saint Robespierre

 

Dernière modification lemercredi, 26 février 2020 20:22

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