Menu

Destruction d’une mosquée à Panzani : La jeunesse musulmane lance une fatwa contre un huissier de justice

 

La destruction, sur décision d’huissier, d’une mosquée au quartier Panzani suscite toujours l’émoi au sein d’une grande frange de la communauté. La Coordination des jeunes musulmans du Burkina (CJMB) a, au cours d’une conférence de presse organisée le 17 septembre au  pied  des décombres, exigé de l’auxiliaire de justice et de son client la reconstruction du lieu de culte avant le 7 octobre. Dans le cas contraire, elle prendra ses « responsabilités ».

 

 

 

 

« Arrivé au château d’eau, tournez à droite et descendez-en bas, en bas, en bas ».

 

- « En bas, en bas jusqu’où ? »

 

- « Allez en bas seulement, nous allons mettre des gens au bord de la voie ».

 

C’est en résumé le verbatim de notre conversation au soir avec un des organisateurs de la conférence de presse.

 

En français plus compréhensible, « descendre en bas, en bas » signifie aller dans les profondeurs du quartier.

 

Il est vrai que le chemin qui mène à Panzani, quartier reculé situé au secteur 37 dans l’arrondissement 9, est long, tortueux et impraticable en cette saison pluvieuse. Sur la route, pas moins de deux camions embourbés dans la gadoue et beaucoup de motocyclistes qui sont passés à quelques centimètres d’un bain de boue.

 

Après être sorti indemne du dédale  du non-loti, nous tombons sur le site, ou du moins sur ce qu’il en reste.

 

Seul le minaret est encore debout. Comme si une violente tornade était passée, la toiture s’est affaissée, une partie traîne sur le sol. Des fenêtres, il  ne  reste  plus que des trous béants. Quelques piliers éventrés mais qui n’ont pas encore cédé soutiennent ce qui peut l’être.

 

Les ruines de la maison d’Allah sont devenues un lieu de pèlerinage qu’on vient filmer, photographier et où on  vient même y prier. La destruction n’a pas ôté au lieu son caractère saint ; les fidèles se déchaussent et font leurs génuflexions pieds nus sur le plancher joncé de débris.

 

Les mines sont attristées. Un mot revient fréquemment : fitnah. Un terme arabe qui pourrait se traduire par « trouble » ou « épreuve ».

 

Sur le site, d’autres bâtiments comme l’école franco-arabe n’ont pas échappé aux coups de burin. Les animaux domestiques du voisinage s’essayent à l’escalade sur les amas.

 

A l’origine de ces démolitions, une querelle sur la propriété du terrain. Et chaque prétendant dispose d’un ou de plusieurs documents.

 

 L’occupant actuel, Moussa Guigma, assure être présent sur le site depuis 2007, soit avant le lotissement, et possède des documents émanant du ministère de l’Education nationale, du Cadastre et de la  Direction générale de l’urbanisme qui attestent tous qu’il est le propriétaire du terrain. L’autre qui revendique la paternité, un certain Jacques, résidant à Koudougou, avance, lui, un arrêté du ministère de l’Economie et des Finances.  Un document dont la sincérité est contestée par Moussa Guigma, aujourd’hui soutenu par la coordination des jeunes musulmans, qui, comme qui dirait, a acheté la bagarre. « On ne sait pas si ce document est tombé du ciel ou s’il est sorti des entrailles de la terre», lance Souleymane Sawadogo de la CJMB.

 

Quoi qu’il en soit, le 7 septembre dernier, un huissier agissant au nom du sieur Jacques a procédé à la destruction des installations religieuses et éducatives érigées sur ce lieu entre 2017 et 2018. « Cette destruction s’est faite en violation des règles et procédures en vigueur au Burkina », maintiennent les conférenciers, pour qui l’huissier n’a pas pu leur montrer une ordonnance prouvant qu’il agissait au nom de la loi. Outrés, ils formulent les exigences suivantes : une déclaration écrite du ministre en charge des Cultes pour condamner « cet acte ignoble » et des excuses publiques du sieur Jacques à la Fédération des associations islamiques du Burkina (FAIB).

 

« Si le gouvernement ne réagit pas dans les meilleurs délais pour la résolution de cette provocation contre nos lieux de prières, nous allons réagir d’une autre manière », menacent-ils.

 

Ils exigent également de l’huissier et du mis en cause la reconstruction des infrastructures détruites au plus tard le 7 octobre 2020, autrement, préviennent-ils, ils prendront leurs « responsabilités ». Malgré notre insistance, nous n’avons pu  savoir ce qu’ils voulaient dire par là.

 

 

Hugues Richard Sama

Ajouter un Commentaire

Code de sécurité
Rafraîchir

Retour en haut