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Côte d’Ivoire : Soro est-il un homme à plaindre ?

 

C’est une réaction presque de dépit, voire d’impuissance. Depuis la capitale française où il s’est planqué après le mandat d’arrêt international lancé contre lui, Guillaume Soro a en effet lancé un appel à l’union à l’opposition ivoirienne. Cette déclaration fait suite au rejet par le Conseil constitutionnel de sa candidature à l’élection présidentielle du 31 octobre prochain. Le lundi 14 septembre dernier, cette haute juridiction, présidée par Mamadou Koné, en même temps qu’elle validait la candidature à un 3e mandat d’Alassane Ouattara jugée inconstitutionnelle par ses contempteurs, avait en effet envoyé dans les choux de nombreux autres candidats pour diverses raisons.

 

 

Parmi ces indésirables du DOCLO constitutionnel comme on dirait sur les bords de la lagune Ebrié, figurent donc en bonne place l’ancien président de l’Assemblée nationale et Laurent Gbagbo, tous deux condamnés par la justice ivoirienne et radiés du fichier électoral. D’où donc cet appel du 17 septembre de l’ancien chef rebelle pour qui « maintenir cette élection n’a aucun sens. C’est une évidence. De même participer à cette élection serait cautionner le coup d’Etat civil de Monsieur Ouattara. J’appelle donc à une unité d’action de l’opposition pour stopper Monsieur Ouattara dans sa folle aventure par tous les moyens légaux ».

 

Entre autres moyens d’action, l’exilé de Paris propose à tous les autres candidats retenus ou non de saisir la CEDEAO, l’Union africaine, l’Union européenne ou les Nations unies « en vue de l’obtention d’élections démocratiques, transparentes et inclusives, comme ce fut le cas en 2010 ». Certes certains, comme la Commission africaine des droits de l’Homme et des peuples (CADHP), avaient demandé à la Côte d’Ivoire de permettre à l’enfant de Ferké de se présenter, mais on ne voit pas trop comment à 45 jour de l’échéance, la communauté africaine et internationale pourrait inverser le cours des choses sur les bords de la lagune Ebrié.

 

Ado s’étant d’ailleurs choisi des adversaires qu’il veut bien affronter dans les urnes avec la complicité de la justice ivoirienne et étant décidé à dérouler son agenda quels que soient les risques. L’annonce de sa 3e candidature avait déjà, on se le rappelle, entraîné des violences à Abidjan et à l’intérieur du pays, faisant plusieurs morts, et la météo politique ivoirienne annonce de probables orages les jours et semaines à venir après ces nombreuses disqualifications.

 

Mais à bien y réfléchir, Guillaume Soro est-il vraiment un homme à plaindre ? N’est-ce pas lui et ses hommes qui, après dix ans de rébellion et quelques mois d’un conflit postélectoral sanglant, ont installé ADO aux affaires ? Le même Ouattara qui, après avoir souffert de l’ostracisme en politique du fait notamment du concept infect d’ivoirité, fait autant subir aux autres l’exclusion dont lui a souffert par le passé ? Pour être trivial, on pourrait même dire à Guillaume Soro que c’est bien fait pour sa g… C’est d’ailleurs parce que les vainqueurs de la crise postélectorale, qu’il s’agisse de lui, de Bédié ou d’Ado, ont fini par se chamailler sur le butin qu’on en est arrivé là. Démocratique ou pas, si Ado avait jeté son dévolu sur lui pour lui succéder, il ne lui aurait pas trouvé les défauts dont il l’accable actuellement.

 

Cela dit, quand on connaît la capacité de nuisance de celui à qui on attribuait déjà il y a quelques années la paternité cachée des mutineries à répétition au sein des forces de défense ivoiriennes ainsi que parmi les ex-rebelles, Ado aurait tort de dormir sur ses deux oreilles, car Dieu seul sait ce qui peut se passer d’ici le 31 octobre 2020.

 

 

Issa K. Barry

Dernière modification ledimanche, 20 septembre 2020 19:18

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