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Soutien présumé de la France aux terroristes: Un «coq-émissaire» pour expier les péchés du Mali?

Jusqu’où  les autorités de la Transition malienne vont-elles donc aller ?

Il ne leur a pas suffi de voler d’escalades verbales en escalades verbales contre la France et le président Emmanuel Macron.

Il ne leur a pas suffi non plus de renvoyer à ses chères études diplomatiques l’ambassadeur Joël Meyer déclaré persona non grata le 31 janvier dernier pour des propos tenus par les autorités françaises.

Il ne leur a pas davantage suffi de suspendre RFI et France 24, considérées comme les bras médiatiques de l’impérialisme français.

Il ne leur a même pas suffi de pousser à la sortie Barkhane dont le dernier soldat a franchi la frontière nigérienne le 15 août.

Il faut toujours que Bamako en rajoute une couche.

Même chassé de sa basse-cour malienne où plastronne désormais l’Ours russe, il n’y a pas de répit pour le Coq gaulois. Dernière convulsion en date des spasmes politico-militaires qui secouent l’axe Paris-Bamako, les accusations de soutien aux terroristes dont se rendrait coupable l’Hexagone.

Dans une lettre datée du 15 août dernier et signée du ministre des Affaires étrangères, Abdoulaye Diop, les Maliens ont égrené en effet, un interminable chapelet de griefs contre les Français, constitutifs selon eux de tentatives de subversion voire d’appui à la pieuvre djihadiste. Parmi lesquels plusieurs cas de refus d'obtempérer aux instructions des services de contrôle aérien, des cas d'extinction des transpondeurs, des  falsifications de documents de vol ainsi que des  atterrissages d'hélicoptères dans des localités hors aérodromes.

Au total, c’est une bonne vingtaine de cas  de violations de l’espace aérien malien qui ont été recensés. Ces incursions illicites ont «servi à la France pour collecter des renseignements au profit des groupes terroristes et pour leur larguer des armes et des munitions». Ni plus ni moins !

Ces accusations ont été qualifiées «d’insultantes» par le tout nouveau chef de la force Barkhane, le général Bruno Baratz.

En vérité, ce procès contre la France n’est pas bien nouveau. Que ce soit au Mali, au Burkina ou au Niger, une certaine opinion a toujours suspecté la Patrie des droits de l’homme de jouer au pompier pyromane. L’ami qui serait donc venu nous aider à libérer nos pays soutiendrait, selon les tenants de cette pensée, ceux qui ont mis le «Sahelistan» sous coupe réglée depuis une bonne décennie et qui sont en train maintenant de s’ouvrir une voie d’accès vers le littoral. Un double jeu donc dont il a toujours été cependant difficile d’attester la réalité.

Quand bien même toutes les récriminations recensées seraient exactes, sont-elles pour autant constitutives de pacte avec l’ennemi comme l’affirme le Palais de Koulouba? Difficile à dire.

Ce nouvel épisode des relations tumultueuses franco-maliennes montre en tout cas que même si les soldats tricolores ont plié bagages, ils seront toujours tenus pour responsables de la situation sécuritaire au Mali qui, malgré la présence des mercenaires russes de Wagner, ne s’est pas considérablement améliorée, contrairement à ce que ne cesse de propager la vulgate officielle sur les bords du Djoliba.

Tout se passe donc comme si Assimi Goïta, fâché contre tout le monde, fâché contre Barkhane,  fâché contre la MINUSMA, fâché contre la Côte d’Ivoire, souffre de ce qu’on pourrait appeler le syndrome de la persécution et a trouvé en la France un bouc, que disons-nous, un «coq-émissaire» pour expier tous les péchés du Mali.

Il est vrai que Jupiter, du haut de sa chaire élyséenne, n’a pas toujours fait ce qu’il fallait pour se faire aimer avec son indignation à géométrie variable sur les putschistes et ceux qui opèrent des coups d’Etat constitutionnels ainsi que ses déclarations intempestives dans lesquelles transparaît souvent une forme de condescendance qui contribue à ternir chaque jour un peu plus l’image de la France dans ce qui était jadis son pré-carré, particulièrement en Afrique de l’Ouest.

Au prochain épisode donc !

Hugues Richard Sama

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Le secrétaire d’Etat américain au Rwanda: Antony Blinken et le trublion des Grands Lacs

Le chef de la diplomatie américaine a entamé  le dimanche 7 août une tournée africaine qui l’a d’abord conduit en Afrique du Sud où il a décliné ce qu’on considère comme la nouvelle vision des relations entre le pays de l’Oncle Sam et le continent noir. «Ce que nous recherchons avant tout, c'est un véritable partenariat entre les États-Unis et l'Afrique. Nous ne voulons pas d'une relation déséquilibrée ou transactionnelle», a notamment déclaré Antony Blinken, au cours d'un point de presse avec son homologue sud-africaine Naledi Pandor.

Mais en réalité, il n’y a rien de nouveau sous le soleil africain.

Comme on le sait, le dogme de Washington en la matière a toujours été le  «Trade not aid» (le commerce pas les aides), même si dans des domaines comme la lutte contre le terrorisme  les Américains s’investissent de plus en plus, notamment dans le Sahel bien que leur présence demeure discrète. De plus la présence chinoise et russe sur le continent pousse les USA à la contre-offensive.

Antony Bliken qui est à sa seconde visite sur le continent aura mangé son pain blanc en premier en commençant par le pays de Nelson Mandela parce que le plus dur était à venir, notamment en République démocratique du Congo (RDC) où parmi les sujets abordés figurent l’instabilité chronique  dans ce pays-continent et la recrudescence des attaques de la rébellion du M23.

L’envoyé de la maison Blanche  débarque en effet au moment où un rapport officiel de l’ONU pointe un doigt  accusateur sur Kigali. Depuis longtemps, Kinshasa n’a de cesse d’accuser son voisin de soutenir le M23, ce que Paul Kagamé a toujours nié.

De ce point de vue, on se demande quelle sera la teneur de l’audience qui aura lieu entre les deux hommes.

A vrai dire, le secrétaire d’Etat marche sur des œufs. En RDC, il a réaffirmé l’importance de l’intégrité territoriale du pays sans accuser  de façon claire et nette le trublion des Grands Lacs que semble être le Rwanda. Il faut pourtant que la communauté internationale, notamment une grande puissance comme les Etats-Unis, use de son poids politique, diplomatique, militaire et économique pour amener à la raison le Rwanda. Un petit  pays mais aux grandes visées hégémoniques qui malheureusement dédaigne la moindre critique formulée à son encontre. Pour des raisons liées notamment à l’histoire récente du pays, les plaies encore vives du génocide, nombreux sont ceux qui sont indulgents vis-à-vis  du Pays des mille collines. Pour autant, il gagnerait à entretenir  des relations cordiales avec ses voisins, notamment avec ce géant au pied d’argile qu’est la RDC.

 

Hugues Richard Sama

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Retrouvailles Tshisekedi-Kamerhe: Même si ça tangue, le tango continue

Chaudes poignées de main et accolades : ils se sont retrouvés comme s’il ne s’étaient jamais quittés.

Cela fait pourtant deux bonnes années que Félix Tshisekedi et Vital Kamerhe ne s’étaient plus rencontrés, précisément depuis avril 2020 où  ce dernier a été arrêté puis jugé pour corruption et détournement de fonds publics portant sur un montant de 50 millions de dollars dans l’affaire dite des «100 jours», du nom des  travaux d’urgence initiés par le chef de l’Etat au début de son mandat.

A l’issue d’un procès que d’aucuns avaient qualifié de politique, le président de l’Union  pour la nation congolaise (UNC), qui était le directeur de cabinet du chef de l’Etat, avait été condamné à 20 ans de prison. Il avait vu sa peine réduite en appel à 13 ans de travaux forcés en juin 2021. L’on pensait alors que cette sentence était synonyme de mort politique pour l’enfant terrible de Bukavu mais voilà que contre toute attente, celui qui fut l’un des principaux alliés de «Fatshi» dans la conquête du palais présidentiel est blanchi en seconde instance par la Cour d’appel de Kinshasa/Gombe, qui justifie sa décision par le manque de preuves. Un manque de preuve qui n’avait pourtant pas empêché sa condamnation initiale.

Mais les Congolais n’étaient pas au bout de leur surprise, puisque moins d’une semaine après son élargissement, l’ancien pensionnaire de la prison de Makala a retrouvé celui qui était censé être son bourreau le mardi 28 juin dernier. Un tête-à-tête  de deux heures dont pas grand-chose n’a vraiment fuité si ce ne sont les propos de circonstance  de celui qui a été reçu. Il a notamment fait cas de sa «joie de retrouver un partenaire politique. Quelle que soit l’épreuve qu’on endure, cette épreuve doit être en dessous de ce qu’on est déterminé à donner à la nation, à la patrie, à la communauté. C’est en cela que nous allons gagner».

Il s’agirait donc de renforcer le partenariat entre l’UNC et l’Union pour la démocratie et le progrès social (UDPS). Comme quoi même si ça tangue, le tango entre les deux alliés continue.

 

Ces retrouvailles sont aussi la preuve qu’en politique, il faut vraiment jamais dire jamais.

Certes, il n’est pas encore question, du moins officiellement, de la présidentielle de 2023, mais on peut difficilement penser qu’ils ont juste devisé de la pluie et du beau temps autour d’un «Soso ya mwamba», ce plat national congolais fait de poulet fumé préparé dans une sauce aux arachides grillées et à la tomate, sans évoquer ce rendez-vous majeur.

Le successeur de Joseph Kabila, qui n’a jamais fait mystère de son intention de rebeloter malgré un bilan jusque-là maigrichon, a sans doute de nouveau besoin des services du fin manœuvrier que serait Vital Kamerhe pour renouveler son bail au palais de la Nation. Et ce dernier, dont la vie politique a été mise entre parenthèses pendant deux ans, a tout autant besoin de son ancien allié pour exister et, qui sait, se mettre en réserve de la République pour l’après-Tshisekedi. N’était-ce pas d’ailleurs ce qu’avait prévu leur pacte originel, la coalition «CACH», qui avait propulsé Tshisekedi au faîte du pouvoir à l’issue de «petits arrangements à l’africaine», pour reprendre la méchante formule de Jean-Yves Le Drian?

 

Hugues Richard Sama

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Opposition sénégalaise : Nul ne peut se prévaloir de ses propres turpitudes !

 

L’opposition sénégalaise aurait voulu lancer une précampagne des législatives haute  en couleur  qu’elle ne s’y serait pas prise autrement. En un peu moins de 2 mois de ce scrutin aux grands enjeux, elle a fait une revue de troupes à Dakar à l’appel des ténors de la coalition Yewwi Askan Wi : Ousmane Sonko, Barthélemy Dias et Kalifa Sall.

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Visite Philippe en RDC: Et si on sortait de cette trop grande susceptibilité mémorielle?

«Philippe au Congo». Rassurez-vous, ce n’est pas le titre d’un album de Tintin, le célèbre journaliste reporter,  aventurier d’Hergé, mais ça pourrait être la chronique du séjour de six jours qu’effectue depuis le 7 juin 2022 le roi des Belges en RDC. Une visite qui a lieu 12 ans après celle de son père, Albert II.

Philippe, qui séjourne dans le pays en compagnie de son épouse, la reine Mathilde, de membres du gouvernement et du Premier ministre, Alexander De Croo, a décoré un ancien combattant, Albert Kunyuku, cent ans mais encore bon pied bon œil, et restitué un masque géant au musée national de la RDC.

Le 7e roi des Belges s’est ensuite adressé au Parlement réuni au palais du Peuple à Kinshasa. Il a notamment exprimé son «plus profond regret pour le régime colonial marqué par le paternalisme, les discriminations et le racisme» avant d’appeler les deux pays à écrire une nouvelle page de leur histoire.

Ceux qui attendaient des excuses formelles en sont donc pour leurs frais. Le souverain belge, contrairement à ce que certains Congolais espéraient, n’est pas en effet allé plus loin que les simples regrets qu’il avait déjà exprimés par écrit il y a deux ans au sujet des méfaits de la colonisation.

Il faut reconnaître que son ancêtre Léopold II avait fait de ce vaste territoire de 2,3 millions de kilomètres carrés sa possession personnelle dont il usait et abusait à souhait des  immenses richesses pendant que les Congolais pataugeaient dans une misère crasse. Une férule dont le point d’orgue aura sans doute été l’assassinat crapuleux de Patrice Lumumba le 17 janvier 1961 de concert avec les Américains. Comble de la férocité, le corps du premier Premier ministre du pays sera dissous dans de l’acide et il ne reste plus de lui qu’une relique, une dent, emportée par un  policier belge qui a participé à son assassinat, et qui devrait être restituée bientôt à sa famille.

Philippe bat donc sa coulpe au nom de tous ses prédécesseurs et de tous ses compatriotes, même s’il faudra bien plus qu’une simple repentance pour rasséréner les relations entre les deux Etats que les brûlures de leur histoire commune séparent toujours.       

Pourquoi faudrait-il d’ailleurs qu’on exige toujours des excuses plates et pardons comme si on se complaisait à regarder éternellement dans le rétroviseur au lieu de se focaliser sur le futur, comme c’est également le cas du Rwanda vis-à-vis de la France au sujet du génocide de 1994 ou encore de l’Algérie vis-à-vis de la même France pour le fait colonial et la guerre d’indépendance?

Certes, il faut toujours regarder dans notre passé, proche ou lointain, pour mieux envisager l’avenir, mais il faut se garder de se barricader dans cette susceptibilité mémorielle, pour ne pas dire dans cette «rente mémorielle», ainsi que l’avait affirmé Emmanuel Macron aux dirigeants algériens.

On a même souvent l’impression qu’une telle attitude nous exonère  de notre propre responsabilité.

Qu’a fait justement le Zaïre d’abord, la RDC ensuite depuis que le pays a acquis son indépendance formelle pour construire une véritable société de progrès au bénéfice de tous? Pas grand-chose en réalité. Bien au contraire, à la prédation des colons a suivi celle des dirigeants, particulièrement de Mobutu,  une sorte de Léopold II noir, qui lui aussi a régné sans partage sur le pays, dont il a accaparé les faramineuses richesses. Et les Kabila père et fils n’ont pas fait mieux.

 

Hugues Richard Sama

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Tournée Olaf Scholz au Sénégal et au Niger : Quand l’aigle allemand plane au-dessus du Sahel

Pour sa première tournée en Afrique depuis son élection à la chancellerie fédérale d’Allemagne le 8 décembre 2021, Olaf Scholz a choisi de se rendre respectivement au Sénégal, au Niger puis en Afrique du Sud. Une série de visites dont l’agenda est frappé du double sceau  économique et militaire.

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Retrait du Mali: Mohamed Bazoum signe l’acte de décès du G5 Sahel

Le président nigérien, Mohamed Bazoum, a une réputation bien établie de franc-parleur qui ne fait pas toujours dans les circonlocutions ni le langage diplomatiques. Ce qui peut étonner d’ailleurs, l’homme ayant été deux fois ministre des Affaires étrangères de son pays, respectivement de 1995 à 1996 puis de 2011 à 2015. Le fait d’être devenu premier magistrat du Niger n’a rien changé à ce trait de   caractère. Combien de fois n’a- t-il pas en effet tiré à boulets rouges sur les autorités maliennes au regard de l’évolution sociopolitique du pays, marquée par les deux coups d’Etat successifs d’Assimi Goïta?

MB, comme on l’appelle, a remis le couvert ces derniers jours . A la faveur d’une longue interview accordée au journal français La Croix, il a d’abord regretté l’isolement de Bamako en Afrique de l’Ouest, une mauvaise chose pour toute la sous-région. « Si ce pays était dans une situation normale, nous serions en mesure de développer notre coopération en relation avec Barkhane», a déploré le successeur de Mahamadou Issoufou avant de déclarer sans ambages qu’avec le récent retrait du Mali de l’organisation, le G5 Sahel était mort. Le décès de la task force était en réalité constaté par de nombreux observateurs de la scène sociopolitique ouest-africaine. Le président nigérien vient juste d’en signer officiellement l’acte de décès.

Créée en 2014 pour mutualiser les moyens, à la fois humains, logistiques et en renseignement, de même que pour mieux coordonner la lutte contre les terroristes dans le Sahelistan, l’organisation  a toujours été, hélas, un avorton qui ne parvenait pas à marcher,  à plus forte raison à monter en puissance comme l’espéraient ses géniteurs. Et quelque part, c’est le coup de grâce que vient de lui donner le Mali.

Mécontent que certains Etats lui dénient son tour de passage de la présidence en exercice, à cause du double putsch d’Assimi Goïta, Bamako a en effet décidé le 15 mai dernier de quitter le G5 Sahel ainsi que toutes ses instances. A coup sûr,  ce sont les djihadistes de tous poils qui doivent applaudir à tout rompre, dans la mesure où le départ du partenaire malien va jouer sérieusement sur les capacités, déjà limitées, qu’avait cette coalition.

Cela dit, on peut reprocher  à Assimi Goïta et à la junte malienne de se lancer dans une fuite en avant, voyant des ennemis extérieurs et intérieurs partout,  comme s’ils étaient frappés du syndrome de la persécution, mais on doit aussi avoir l’honnêteté de reconnaître que sur ce coup-ci, ils ont un peu raison.

Rien, dans les textes du G5 Sahel, ne prescrit en effet l’exclusion d’un Etat membre en raison de sa situation à domicile. D’ailleurs,  putschiste pour putschiste,  en quoi Assimi Goïta est plus putschiste que le lieutenant-colonel Paul-Henri Sandaogo Damiba du Burkina ou le Tchadien Mahamat Idriss Déby, qui a perpétré un coup d’Etat constitutionnel pour succéder à son père à la mort de ce dernier en avril 2021? Il y a donc comme un deux poids deux mesures qui conforte Bamako dans sa conviction qu’il y a des forces obscures, la France pour ne pas la nommer, qui tirent les ficelles en sous-main. Cela dit,  que par dépit le Mali soit  parti, il pourrait aussi subir l’effet boomerang de sa décision, tant les sorts des pays membres de la force conjointe, notamment le Mali, le Burkina et le Niger, sont  entremêlés.

 

Hugues Richard Sama

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