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Meeting opposition ivoirienne : Bédié aboie, ADO passe

Ce samedi 10 octobre 2020, le stade Félix Houphouët Boigny était paré aux couleurs de l’opposition, même si la cuvette n’était pas à ras-le-bord, la faute, dit-on, à la police et aux partisans du pouvoir en place.

 

Qu’à cela ne tienne, le grand meeting contre la candidature d’Alassane Ouattara à un 3e mandat, jugé inconstitutionnel, et pour plus de réformes politiques a été tenu. Mais les milliers et les milliers d’Ivoiriens qui ont pris d’assaut ce temple du football et s’attendaient sans doute à des consignes claires, voire à un vade-mecum pour la désobéissance civile, qui devait en principe commencer le même jour, en ont été pour leurs frais.

 

En lieu et place, ils ont dû subir un chapelet interminable de discours : de Mamadou Koulibaly du LIEDER à Henri Konan Bédié du PDCI-RDA en passant par Pascal Affi N’Guessan du FPI et bien d’autres. Même s’ils ne parlaient pas d’une seule voix. Pour toute consigne, il s’est plutôt agi d’un réquisitoire en bonne et due forme, de la « dictature du RHDP », du « viol de la Constitution », de « haute trahison » et du « parjure » d’Ado. Ils ne se sont pas par exemple  mis d’accord pour une alliance électorale, et il n’y a pas eu d’unanimité sur le boycott de la présidentielle.

 

 

Et pourtant, à l’évidence, il faut bien plus que des discours enflammés pour obtenir le report du scrutin ou la transition que les contempteurs du président sortant réclament à cor et à cri. Pendant que Bédié aboie, la caravane RHDP, cornaquée par Ado, passe. Et il n’est pas question de s’arrêter ni même de freiner. Au contraire, le locataire du palais de Cocody se fait menaçant : « Je puis vous assurer que nous avons pris toutes les dispositions pour que les élections du 31 octobre soient paisibles. Ces élections ne donneront lieu à aucun débordement. Toute personne qui voudra s’amuser à troubler l’ordre se retrouvera devant les tribunaux quel que soit son rang social ». On se demande bien pourquoi il n’a pas ajouté « et son  âge », tant l’allusion est tellement limpide.

 

Autant dire que les trois semaines qui nous séparent de cette date tant redoutée qu’est le 31 octobre nous promettent d’être surchauffées, et on tremble pour la Côte d’Ivoire ainsi que la sous-région. Et une fois de plus, ce sont les deux vieux éléphants de la faune politique ivoirienne qui en sont la cause. C’est par eux en effet que les malheurs de ce pays ont commencé, il y a 30 ans déjà avec la guerre de succession qui a suivi le décès de Félix Houphouët Boigny. Ce pays ne s’en est jamais remis, naviguant entre coups d’Etat, rébellion armée, mutineries et conflits postélectoraux, avec des hommes politiques qu’on ostracise de temps en temps.

Si Ado n’est pas étranger, loin s’en faut, à la détérioration du climat politique actuel, lui qui a  modifié la Constitution pour s’ouvrir la voix d’un 3e mandat, qui a promis d’abord de ne pas jouer les prolongations avant de rechausser les crampons après la mort brutale, le 4 août dernier, de son premier ministre et dauphin désigné, Amadou Gon Coulibaly, la responsabilité en incombe aussi à Henri Konan Bédié. Même s’il a le cœur, les jambes et même la chevelure d’un jeune homme de 30 ans, qu’est-ce qu’il vient foutre à 86 ans dans cette galère ivoirienne, lui qui, historiquement, est plus coupable que quiconque des tourments dans lesquels se débat le pays ? C’est même sans doute parce qu’il s’est encore jeté dans le bain sur fond de revanche qu’Ado s’est opportunément parjuré.

 

 

Et comme toujours, quand les éléphants se battent, c’est l’herbe qui en souffre le plus, et les Ivoiriens toutes tendances confondues. Qu’on soit pro-Bédié, pro-Ado ou pro-Gbagbo, on redoute plus que jamais l’orage qui est en train de se former sans qu’on puisse y faire grand-chose. Si ce ne sont des actions à la limite symboliques  comme cette caravane baptisée « Engagés pour la paix » que le groupe musical Magic Système, en partenariat avec l’Union européenne, a entreprise depuis la semaine dernière. Reste à voir si la voix de son lead vocal, A’Salfo, parviendra à dominer le concert des récriminations mutuelles qui montent dans tous les camps. 

 

La Rédaction

Dernière modification lemardi, 13 octobre 2020 01:04

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