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Relations France-Sénégal: Diomaye Faye en mode équilibriste à l’Elysée?

Après ses tournées africaines qui l’ont conduit successivement en Gambie, en Mauritanie, en Guinée-Bissau, au Cap-Vert, en Guinée, en Côte d’Ivoire, au Ghana, au Nigeria, au Mali et au Burkina, on se demandait quelle destination prendrait le nouveau président sénégalais en dehors du continent. On est désormais fixé depuis hier.

Bassirou Diomaye Faye séjourne en effet à Paris où il doit participer au forum mondial pour la souveraineté et l’innovation vaccinales sur invitation de l’Alliance pour le vaccin (GAVI) et  l’Union africaine (UA). Cette conférence qui doit réunir plusieurs chefs d’Etat du continent  est presque un apéritif avant le déjeuner qu’il doit partager avec Emmanuel Macron ce jeudi 20 juin 2024 à l’Elysée. C’est la première rencontre entre deux présidents qui ont en commun leur jeunesse (respectivement 44 et 46 ans)  et leur parcours professionnel puisqu’ils furent tous deux, avant d’accéder à la magistrature suprême, inspecteurs des finances publiques. Mais la comparaison s’arrête là, car tout semble les opposer.

Le parti des Patriotes africains du Sénégal pour le travail, l’éthique et la fraternité  (PASTEF) dont BDF était il n’y a pas longtemps le secrétaire général, évoluant dans l’ombre d’Ousmane Sonko, n’a jamais caché son panafricanisme et son souverainisme, volant souvent dans les plumes des impérialistes, notamment de la France.

Pas plus tard qu’en mai, à la faveur de la visite à Dakar de Jean-Luc Mélenchon, celui qui est devenu le Premier ministre, Ousmane Sonko, a encore tiré à boulets rouges sur Emmanuel Macron, coupable à ses yeux d’avoir fermé les yeux sur la répression de ses partisans sous le règne de Macky Sall.

Certes, le nouveau chef de l’Etat sénégalais est moins volcanique que son chef du gouvernement, mais il n’en partage pas moins les valeurs. C’est dire qu’il va falloir solder les comptes entre les deux dirigeants et rasséréner des relations qui ont sans doute besoin de l’être.

Quoi qu’il en soit, cette visite est la preuve  que contrairement à ce qui se passe dans de nombreux autres pays, notamment de l’Alliance des Etats du Sahel (AES), le cordon ombilical qui lie l’ancienne puissance coloniale à ce qui fut jadis la capitale de l’Afrique occidentale française n’est pas totalement rompu. Bien au contraire. N’oublions pas que la France demeure le premier investisseur étranger au Sénégal  et son premier partenaire en matière d’aide publique au développement. Elle a aussi de gros intérêts privés au pays de la Teranga. Toutes choses qui devraient amener les deux parties à arrondir les angles, même s’il va falloir sans doute pour la partie française mettre un peu d’eau dans son vin.

Ce séjour de Faye dans l’Hexagone intervient à un moment où un peu partout dans son ancien pré-carré, le Coq gaulois est particulièrement malmené, qu’il s’agisse du Burkina, du Mali, du Niger et même du Tchad , son partenaire stratégique et historique dans la lutte contre le terrorisme dans la zone sahélo-saharienne.

Pour tout dire, quand bien même il y aurait des divergences, on voit mal les deux partenaires aller jusqu’au divorce comme on l’observe dans certaines capitales ouest-africaines.

Sur la présence des troupes françaises stationnées au Sénégal, un sujet qui devrait figurer au menu des discussions, jusqu’à preuve du contraire, Dakar n’a pas encore demandé officiellement leur départ, même si pour anticiper, Paris a annoncé depuis un certain temps le redimensionnement de son dispositif militaire sur le continent. Ce qui va passer, entre autres, par la réduction des effectifs et une coopération moins voyante en matière de défense.

L’un dans l’autre, c’est une prise de contact qui devrait se passer sans accroc entre deux Etats qui ont tout intérêt à ne pas trop tirer sur la corde, même si sur certains points  de la coopération il va falloir,  comme on dit, revoir la copie.

 

Hugues Richard Sama

 

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Togo : Une rentrée parlementaire pas comme les autres

Depuis hier mardi 21 mai 2024, les Togolais ont une nouvelle Assemblée nationale (AN). Les députés élus, le 29 avril dernier lors du double scrutin législatif et régional, ont été officiellement installés. Ils devaient être 113, mais 107 étaient effectivement présents. En effet, au total 107 députés sur les 113 élus se sont présentés à l’AN togolaise pour la session inaugurale.

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Procès du 28-Septembre: Dernière ligne droite d’un jugement marathon

Après trois semaines de suspension, le procès du massacre du 28-Septembre en Guinée a repris le 13 mai dernier avec les plaidoiries des conseils de la partie civile.  Passé cette étape  viendront tour à tour les réquisitions du ministère public et les plaidoiries des avocats de la défense avant que le tribunal ne se retire pour livrer son verdict.

Le procès ouvert le 28 septembre 2022 amorce donc sa dernière ligne droite. Mais même si l’on vit les derniers instants du jugement, la partie civile ne désespère pas de voir requalifier les faits en crime contre l’humanité. Une requête sur laquelle statuera le tribunal au moment de rendre son verdict, c’est-à-dire d’ici le mois d’août, comme l’espère son président, Ibrahima Sory 2 Tounkara.

Quoi qu’il en soit, ce procès marathon se veut historique pour la Guinée. A la barre, 11 accusés, dont l’ancien président Moussa Dadis Camara, poursuivis notamment pour assassinats, meurtres, actes de torture, coups et blessures volontaires et séquestration. Alors que celui qui avait profité du décès de Lansana Conté pour prendre le pouvoir par les armes le 24 décembre 2008  s’était mis à rêver de pousser des racines sur le fauteuil présidentiel, l’opposition et une bonne partie de la casse politique avaient décidé de lui barrer la route en organisant le 28 septembre 2009 une grand rassemblement au stade éponyme. Des militaires ont alors fait irruption dans l’enceinte sportive, tirant sur la foule et violant plusieurs femmes. Le bilan fait état de 157 personnes tuées et de centaines de blessés.

Il aura donc fallu attendre treize ans et la construction d’un bâtiment flambant neuf pour accueillir le tribunal pour qu’enfin débute la manifestation de la vérité.

On aura assisté à un jugement spectacle qui a révélé des «stars» comme Toumba Diakité et Moussa Dadis Camara, fidèle  à lui-même avec ses  pitreries qu’on avait l’habitude de  voir quand il était aux affaires.

Quelles que soient l’issue ce jugement et les peines qui seront prononcées, ce devrait être une leçon pour tous les responsables guinéens et même au-delà de la Guinée

Dieu seul sait en effet à quel point  les hommes forts, quand ils sont au pouvoir, peuvent se permettre tout et n’importe quoi. Et ce ne sont pas les exemples qui manquent dans cette Afrique,  où la vie humaine est parfois banalisée au nom de la lutte pour le pouvoir ! Nos dirigeants gagneraient à gouverner d’une manière vertueuse et à ne pas sombrer  dans l’arbitraire et la violence aveugle. Même si certains pensent que ça n’arrive qu’aux autres, l’histoire nous enseigne le contraire : aucun crime ne reste impuni.

 

 

Hugues Richard Sama

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Recrudescence des attaques en Centrafrique:Où est donc passé Wagner ?

En République centrafricaine, les rebelles de la Coalition des patriotes pour le changement (CPC) multiplient les attaques contre la population civile et les positions de l'armée, comme l’attestent les événements de ces derniers jours. Dimanche dernier, une dizaine de civils ont été tués et au moins six maisons incendiées par les rebelles de la CPC à Kologbota, un village situé à trente kilomètres de Bakouma, dans le nord-est. Le lendemain, lundi, une autre attaque de la CPC a visé la position des forces armées au village de Kadjama, à 37 km de Markounda, dans la préfecture de l’Ouham-Fafa. Trois personnes, dont deux militaires, y ont perdu la vie. De quoi semer la désolation et la stupeur de façon permanente. En réalité, depuis de longues années, il y a une sorte de paix fourrée en Centrafrique qui n’arrive pas à se défaire du cycle de violence dans lequel le pays de Barthélemy Boganda se débat depuis si longtemps. C’est une insécurité parfois alimentée par des rancœurs politiques entre dirigeants, et l’arrivée du président Faustin Archange Touadéra n’a malheureusement pas arrangé les choses. Les miracles promis par Archange ne se sont jamais réalisés malgré le recours à Wagner, devenu maintenant Africa corps. En effet, à grand renfort de publicité promettant de transformer le pays en havre de paix, des centaines de mercenaires du groupe paramilitaire russe Wagner sont arrivés en Centrafrique dès 2018, officiellement pour entraîner l'armée, selon Moscou. Fin 2020, le dispositif avait été renforcé pour juguler une offensive rebelle sur Bangui. Des années après, force est de reconnaître que la plaie est toujours béante et n’est visiblement pas près de se cicatriser. En vérité, avec les concessions minières qui servent à les rétribuer, on se demande si ces mercenaires ne sont pas venus que pour faire des affaires. L’expérience a montré en effet que c’est plus, bien souvent, la défense d’un régime que celle du territoire qui les préoccupe le plus. Les populations sont souvent laissées à elles-mêmes quand elles ne sont pas simplement victimes des exactions de ceux qu’on a appelés à l’aide. C’est le cas en Centre-Afrique comme dans de nombreux autres pays où ces mercenaires déposent leurs pénates en vendant du rêve aux citoyens. Faut-il s’en étonner outre mesure, vu que Faustin Archange Touadéra est lui-même plus préoccupé par la conservation de son pouvoir que par la situation de son pays ? Lui qui, élu en 2016 en pleine guerre civile et réélu en 2020 dans des conditions contestées par l'opposition, a fait modifier la Constitution en juillet 2023 par un référendum, boycotté par l'opposition, pour s'autoriser à briguer un troisième mandat en 2025. Hélas, ainsi vont souvent nos relations avec certaines puissances puisqu’on a l’art de se défaire des griffes d’un ancien maître pour s’offrir à peu de frais à un nouveau pas forcément plus vertueux et efficace. Cela dit, celui qui règne sur des arpents de terre autour de Bangui sans véritable prise sur son pays semble avoir conscience de cette situation, lui qui s’inscrit désormais dans la diversification de ses partenaires pour ne pas être à la merci d’un seul, soit-il puissant. Le pays tente en effet de diversifier ses partenariats stratégiques en entamant des discussions avec la société militaire privée américaine Bancroft. Il s’est aussi rapproché de Paris avec la visite actuelle en France du président Touadéra qui avec son homologue de l’Hexagone ont dû se dire beaucoup de chose dans le sens du rééquilibrage de ses relations avec les puissances de ce monde. Il est donc dans une logique de parler à tout le monde pour multiplier ses chances de réussite.

Abdou Karim Sawadogo

 

 

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