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Présidentielle mauritanienne : Mohamed Ould Ghazouani naturellement

L’affaire a été rondement menée. En effet, lundi dernier, selon la Commission électorale nationale indépendante (CENI), le président mauritanien sortant, Mohamed Ould Ghazouani, a été réélu au premier tour pour un second mandat de cinq ans.

 

Il a obtenu 56,1% des voix, loin devant son principal adversaire, Biram Dah Abeid, militant anti-esclavagiste qui a obtenu, lui, 22,1% des voix et qui conteste sa victoire.

Celui-ci a affirmé qu’il était le véritable vainqueur de l’élection, ajoutant au cours d’une conférence de presse que les résultats provisoires étaient un « coup d’Etat électoral » visant à aider Ghazouani. Il accuse même la CENI d’avoir frauduleusement accordé au président sortant des milliers de voix « sorties de nulle part ».

Depuis son domicile de Riadh, une banlieue pauvre de la capitale mauritanienne, il a appelé à la désobéissance civile contre le gouvernement et a demandé à l’armée et aux forces de sécurité de ne pas « accepter d’être utilisées par celui-ci contre le peuple ».

A quoi pouvait-il s’attendre ? Feu Omar Bongo de son vivant a dit qu’en Afrique « on n’organise pas des élections pour les perdre ». Une réflexion qui a été émise suite à la défaite d’Abdou Diouf au second tour du scrutin en 2000 au Sénégal. Cette assertion est d’autant plus actuelle qu’il s’agit surtout de militaires pour le cas de la Mauritanie, et on sait bien que la soldatesque comme dans bien de situations sur le continent noir, n’est pas prompte à céder le pouvoir aussi facilement.

Candidat soutenu par le président de la République sortant Mohamed Ould Abdel Aziz à l’élection présidentielle de juin 2019, Mohamed Ould Ghazouani est élu dès le premier tour avec 52,01% des voix, devant le même Biram Dah Abeid, qui en recueille 18,59% confirmé par le Conseil constitutionnel, il est investi le 1er juillet et a prêté serment le 1er août.

Ancien chef d’état-major des armées de 2008 à 2018 puis ministre de la Défense, il est considéré comme une personnalité consensuelle et comme l’artisan principal des succès de l’armée mauritanienne. La dernière attaque terroriste remonte en Mauritanie à juillet 2011. Selon Alain Antil de l’Institut français de relations internationales, Ghazouani est « très structuré et était très apprécié dans l’armée mauritanienne. Ce n’est pas du tout un homme de paille ».

Elu pour cinq nouvelles années, ses compatriotes lui reconnaîssent d’avoir mis, lors de son premier mandat, l’unité nationale et le dialogue au premier plan, d’avoir « réalisé un consensus national autour des questions fondamentales auxquelles le pays est confronté, réalisé les réformes pour un véritable Etat de droit, conduisant à la normalisation de la vie politique ».

Il a aussi promu une diplomatie apaisée avec ses partenaires internationaux et s’affirmé comme partenaire privilégié des Occidentaux dans la lutte contre le terrorisme au Sahel. Dans une Mauritanie qui continue à faire figure d’exemple pour sa stabilité dans la sous-région, certains nourrissent des fantasmes et y voient une meilleure organisation de l’armée, un meilleur maillage du territoire. La stabilité est effectivement là et pour son second mandat, Mohamed Ould Ghazouani a promis d’assurer plus de sécurité et la croissance économique.

La Mauritanie, faut-il le rappelé, est riche en ressources naturelles, notamment en minerai de fer, en cuivre, en zinc, en phosphate, en or, en pétrole et en gaz naturel. Elle est sur le point de devenir un producteur de gaz d’ici la fin de l’année en cours, avec le lancement prévu du projet gazier offshore Greater Trortue Ahmeyin, exploité par BP, à la frontière avec le Sénégal.

Le président mauritanien est élu au scrutin uninominal majoritaire à deux tours, pour un mandat de cinq ans renouvelable une seule fois. Le Ghazouani s’aura-t-il s’arrêter après son second mandat ? Sera-t-il tenté, comme bien d’autres chefs d’Etat avant lui, par la modification de la Constitution pour se représenter ? On ose espérer qu’il sera habité le moment venu par la sagesse. C’est bien une condition pour éviter de réduire à néant ses acquis, et même sa bonne réputation minutieusement construite au fil des ans.

 

D. Evariste Ouédraogo

 

 

Dernière modification lemercredi, 03 juillet 2024 19:46

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