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Remaniement ministériel : Roch ne veut pas encore griller son « maïs » (1)

 

«Après deux ans de fonctionnement qui a parfois rimé avec tâtonnement, il importe que le chef de l’Etat nous sorte de cette espèce de torpeur  en secouant le cocotier gouvernemental par un remaniement en profondeur. Pour au moins donner l’illusion qu’avec les nouvelles têtes ce sont de nouvelles idées salvatrices qui arrivent… Cela participe également de l’indispensable oxygénation institutionnelle. 2018, c’est donc le moment ou jamais pour le président de donner un second souffle à son action à mi-mandat.»

 

 

Telle était la chute de notre édito de fin d’année 2017(2) alors que les rumeurs sur l’imminence d’un remaniement ministériel se faisaient de plus en plus persistantes, comme si les Burkinabè voulaient forcer la main au président Roch Marc Christian Kaboré qui demeure pourtant, sauf situation exceptionnelle, seul maître de son temps. Il a finalement mis fin au suspense  le mercredi 1er février 2018 en cosignant avec le Premier ministre Paul Kaba Thiéba le décret n°2018-0035/PRES/PM.

 

La première surprise du chef aura en fait été le maintien du PM alors que certains le voyaient remplacé par sa ministre de l’Economie et des Finances, Rosine Sory/Coulibaly (confirmée à son poste), ou Eric Bougouma des Infrastructures.  Mais force est de constater que le chef du gouvernement,  fusible idéal par excellence qui saute à l’occasion pour protéger l’ensemble du système et à qui, il est vrai, on veut faire porter  tous les péchés du Burkina, conserve la confiance de son mandant. N’eût-il pas du reste été un peu inélégant, nonobstant ses multiples bourdes, de renvoyer à ses chères études bancaires celui qui, en deux ans, aura fait le sale boulot en subissant  le poids de la fronde sociale ininterrompue depuis que le MPP est aux affaires et à qui on voudrait aussi laisser un peu plus de temps pour « donner un coup d’accélérateur au PNDES », qu’il porte à bout de bras depuis sa gestation?

 

En tout cas si Roch n’a pas encore voulu griller son « maïs », il n’aura par contre pas pu sauver le soldat Simon Compaoré qu’il a finalement appelé à ses côtés comme ministre d’Etat, sans portefeuille. Il faut dire qu’entre ses relations, souvent délicates avec les forces de sécurité, en particulier la police, et ses faits et propos inconsidérés, le ci-devant premier flic du Burkina qui arrive ainsi  « yada yada »  à Kosyam a fini par devenir un boulet pour le président, qui n’avait peut-être plus d’autre choix que de sacrifier son fidèle compagnon pour l’ensemble de son œuvre. Même si ce faisant, son éviction sonne comme un désaveu politique. C’était sans doute ça ou courir le risque de griller définitivement l’unique bras droit qui lui reste après le décès de Salif Diallo.

Plus que jamais dans l’antichambre du chef, désormais électron libre au rôle transversal, pouvant de ce fait s’occuper de tout, y compris de la… sécurité, il sera sans doute beaucoup plus utile pour un travail de l’ombre et dans l’ombre. Reste à savoir si son remplaçant, dont beaucoup louent le sens de l’écoute et du dialogue, qui prend ainsi un peu plus d’épaisseur politique en devenant la troisième personnalité du gouvernement dans l’ordre protocolaire, pourra supporter sur ses frêles épaules le poids sécuritaire du pays, en proie depuis maintenant trois ans au péril terroriste.

 

Puisqu’il faut spéculer sur les raisons qui conduisent un chef d’Etat à se séparer de tel ou tel collaborateur, et pour ne parler que des cas les plus emblématiques, on se demande si Laure Zongo/Hien n’a pas été « emballée » par les pagnes du 8-Mars dans lesquels elle s’était empêtrée face aux critiques de plus en plus acerbes de l’autre moitié du ciel, notamment la faîtière des tisseuses ; si bien que le PF et le PM ont, qui sait, voulu  désamorcer cette bombe féminine avant qu’elle n’explose à l’approche de la Journée internationale de la Femme.

 

Et que dire de Jean Martin Coulibaly, mal noté à l’Education nationale par les enseignants qui seront ainsi parvenus à le renvoyer de la classe gouvernementale après avoir arraché un accord pour éloigner le spectre de l’année blanche qui se profilait à l’horizon ? Plus surprenant est peut-être le carton rouge brandi au ministre des Sports Taïrou Bangré.

 

Quid des nouveaux invités à la table du seigneur de Kosyam, en l’occurrence son jusque-là conseiller diplomatique l’ambassadeur Paul Robert Tiendrébéogo pour lequel un ministère plein de l’Intégration africaine et des Burkinabè de l’étranger a été créé au moment où nos compatriotes vivant à l’extérieur doivent en principe voter à la présidentielle de 2020 ? Du juriste Seyni Ouédraogo qui quitte le confort douillet de la société civile pour se jeter dans le grand bain de la Fonction publique, du Travail et de la Protection sociale ?

De Vincent Dabilgou, le protégé de Simon, qui effectue son come-back dans la salle du Conseil des ministres après un premier passage sous Blaise ? Du député Bachir Ismaël Ouédraogo, le « bon petit » de Roch qui, il y a deux ans, avait été jugé encore « trop tendre » pour la charge ? Ou encore du juriste et politologue Abdou Karim Sango, ancien disciple de Laurent Bado en rupture de ban avec son mentor même si tout laisse à penser que c’est au titre du PAREN qu’il est copté à la table gouvernementale ?

 

En tout cas avec  neuf nouveaux venus pour sept partants (soit presque le tiers des membres) et un petit jeu de chaises musicales, c’est le premier vrai remaniement de l’ère Kaboré après deux petits liftings initiaux, notamment pour décharger « Tébguéré » de l’Administration territoriale et trouver un successeur au démissionnaire Tahirou Barry dont le remplaçant, Issouf Sawadogo, n’a finalement fait qu’un aller-retour de trois mois à la Culture où il n’aura même pas eu le temps de déballer ses instruments de musique. 

 

Voici donc, à mi-mandat presque, le premier magistrat burkinabè avec un apport de  sang neuf  pour imprimer un second souffle à une action gouvernementale qui donnait  souvent l’impression d’être poussive. Le propre de ce genre d’exercice, on ne le sait que trop, est de ne jamais contenter tout le monde, chaque Burkinabè ayant sa dream team en l’espèce. En janvier 2016, à la formation du premier gouvernement Kaba, une personne de nos connaissances  nous avait ainsi demandé, pince-sans-rire, si la liste, pourtant officielle qui circulait, était « vraiment la bonne » ou s’il y en aurait une autre d’ici là. Ainsi va le Faso, mais comme c’est toujours ceux qui sont assis qui savent le mieux danser avant de montrer leurs limites une fois sur la piste, il faut se garder de la critique facile et systématique et attendre de voir une personne à l’œuvre avant de  la  juger sur pièce. 

 

 

 

Ousseni Ilboudo

 

 

 

(1) Kaba en dioula signifie « maïs » en français

 

 

 

(2) « 2018, le moment ou jamais », édito de fin d’année paru dans notre livraison n° 9517 du 29 décembre 2017

 

 

 

Dernière modification ledimanche, 04 février 2018 20:39

Commentaires   

0 #4 Zut ! 04-02-2018 10:24
Ablassé Ouédraogo est le chef de file de ceux qui pensent que tant qu'ils ne sont pas ministres, rien ne va au Burkina. Honte à vous partisans de l'égocentrisme. Ces types de personnes, veulent être au gouvernement, essentiellement pour des avantages personnels, comme l'honneur, l’argent des marchés publics. Ils usent d'alibis fantoches de réconciliation et de gouvernement d’union nationale, pour masquer leurs intérêts personnels.
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0 #3 Alerte 03-02-2018 16:55
M.Diabré disait sous le régime Compaoré , qu’il était un opposant républicain, un contre-pouvoir qui n’est pas systématiquemen t contre le pouvoir. Pour cette raison, il dit qu’il critiquera et félicitera quand c’est nécessaire. Apparemment, cet engagement était un pacte sournois de connivence entre Diabré et son ancien chef Blaise Compaoré. Il ne met plus en application ce principe avec le régime du président Kaboré, qui a pourtant été son camarade de lutte pour une transition démocratique. M.Diabré doit savoir qu’en politique, le respect de la parole donnée est capital au risque d’être figé comme un démagogue et perdre toute crédibilité. L’UPC a visiblement choisi de peindre tout en noir contre le régime Kaboré.Rabi Yaméogo se fait toujours porte-parole de la haine et de la violence et ne reconnait rien de positif au nouveau gouvernement. Une preuve, que quand l’UPC demande des changements dans le gouvernement, c’est juste pour des querelles de personnes et non pas pour des raisons d’objectivité. En réalité, l’UPC veut que le régime Kaboré soit en difficulté, afin d’espérer lui ravir la place. Pour cela, elle a du chemin à faire car, l’UPC est sur une pente glissante. Les récents comportements de vandalisme de militants UPC contre des députés frondeurs du parti et les agissements honteux de conseillers municipaux qui ont piétiné des documents publiquement et bloqué une session à la Mairie de Ouagadougou en janvier 2018, prouvent que l’UPC est train de se révéler comme un parti violent et anarchiste. Beaucoup de citoyens ont été indignés par ces comportements de militants UPC.Si le parti continue de la sorte, il risque de perdre la seconde place après le MPP ,au profit du CDP.L’ADF/RDA ou la NAFA viendraient à la 3è place et l’UPC pourrait se retrouver à la 4è place voire pire que cela.
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0 #2 Kôrô Yamyélé 02-02-2018 09:43
- Observez le regard sombre de RMCK vers le MENA (l’Ex-MENA). Il a fini par connaitre en fonds ce MENA (Ex-MENA) et à découvrir ce qu’il sait faire le plus : Servir de gros mensonges !

Par Kôrô Yamyélé
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0 #1 Fernando 02-02-2018 07:55
Le ministre d’Etat auprès de la Présidence du Faso, Simon Compaoré est une incontestable machine électorale pour son parti le MPP et son candidat le Président Roch Marc Christian Kaboré.De par sa nouvelle fonction, il aura davantage de temps pour mieux préparer avec le président, les actions électorales et démocratiques pour la réélection sans trop de peine, du président Kaboré ,pour son second et dernier mandat quinquennal à la présidentielle de 2020.Un ministre d’Etat étant souvent un émissaire de marque du Premier ministre et du Chef de l’Etat, c’est dire que Simon Compaoré sera également à la tâche dans ce domaine. Travailler avec des résultats concrets et laisser les gens parler et apprécier, voilà ce que fera le duo Kaboré et Compaoré, pour impulser le développement du Burkina selon les engagements du programme présidentiel.
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