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Audition de Félicien Kabuga : Quoi qu’on dise, il n’est pas à plaindre, celui-là

Comme l’a si bien écrit le journal Le Monde, il a été trahi par ce qu’il ne peut ni corrompre ni effrayer : non seulement le temps, mais aussi la covid 19 qui l’a obligé à rester dans son immeuble de peur d’être contaminé. Ce vieillard de 84 ans a été donc cueilli comme un fruit (trop) mûr  à son domicile français d’Asnières dans les Hauts-de Seine.

 

 

Il s’agit d’une grosse prise pour la justice française, le Rwanda et surtout pour le Tribunal pénal international pour le Rwanda (TPIR), puisque que, pendant plus de 25 ans, celui qui est recherché glissait comme une anguille entre les mains de ceux qui lui donnaient la chasse, de la Suisse à l’Allemagne en passant par le  Kenya. Samedi 16 mai dernier, c’était donc la fin de la cavale pour Félicien Kabuga, puisque c’est de lui qu’il s’agit.

Beaucoup se demandaient si, durant ses multiples fuites, il ne bénéficiait pas de complicités haut placées dans les systèmes politiques des différents pays où il a séjourné, notamment de la France, accusée par Kigali d’avoir été à la manœuvre pendant cette tuerie programmée qui a fait 800 000 morts entre avril et juillet 1994.  Un bémol cependant : il faut reconnaître que ce Fantômas tropical était difficile à débusquer, car il vivait depuis plusieurs années sous une fausse identité. A sa présentation au parquet mercredi dernier, sa demande de remise en liberté conditionnelle sous contrôle judiciaire a été rejetée. Son âge avancé ne lui a donc pas été d’un grand recours.

La demande de son transfert a, par contre, été mise en délibéré pour le 3 juin prochain. La question est d’importance parce qu’au moment de son arrestation, l’on se demandait bien par quelle juridiction  il serait auditionné : par la justice française, au Rwanda, à la Haye ou par le TPIR à Arusha  en Tanzanie? Considéré comme étant le grand argentier du génocide, il est reproché à ce naguère prospère homme d’affaires le financement de la tristement célèbre Radio et Télévision libre Mille collines (une radio extrémiste antitutsi qu’il dirige à l’époque), du magazine extrémiste Kangura et l’armement des milices génocidaires interahamwe. En tout, il devra répondre de sept chefs d’accusation  en lien direct avec les crimes commis pendant le génocide des Tutsi au Rwanda.

Les carottes sont donc cuites et recuites pour Félicien Kabuga. Et eu  égard  à son grand âge, on espère seulement qu’il aura longue vie pour assister à son procès et purger sa peine si toutefois il n’était pas in fine acquitté. Quoi qu’il en soit, même dans son malheur, il n’est pas à plaindre, les 800 000 victimes n’ayant pas eu la même chance que lui, eux qui sont à six pieds sous terre depuis … 1994.

 

Issa K. Barry

Dernière modification ledimanche, 31 mai 2020 18:32

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