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Daouda Simboro, directeur national de campagne du MBF : «Chacun aura tiré leçon de sa véritable valeur»

 

Il est le directeur national de campagne du Mouvement pour le Burkina du Futur (MBF), parti sous lequel il  a été député à ce scrutin. Daouda Simboro, puisque c’est de lui qu’il s’agit, s’est prononcé à l’occasion d’un entretien qu’il nous a accordé le mercredi 2 décembre 2020 au siège de la Banque agricole du Faso (BADF) à Ouagadougou  sur, entre autres sujets : l’organisation des élections couplées de cette année,  ses projets futurs et ses rapports avec le premier responsable de l’Union pour le progrès et le changement(UPC), formation politique qu’il a quittée il y a trois ans maintenant. Pour l’actuel DG de la BADF, chacun aura tiré leçon de sa véritable valeur à l’issue  de ce double scrutin. 

 

Après votre démission de l’Assemblée nationale  le 5 novembre 2019, on n’a plus véritablement entendu parler de Daouda Simboro dans le domaine politique. Qu’est-ce qui explique cela ?

 

 

 

 Daouda Simboro est là,  il n’a pas changé. Cela fait maintenait un an depuis mon départ de l’hémicycle que j’occupe le poste de directeur général adjoint de la Banque agricole du Faso(BADF).  Et depuis le premier juillet de cette année, j’en suis le directeur général. J’avais annoncé lors de mon départ de l’Assemblée nationale que je ne m’éloignerais pas de l’arène politique, que ce n’était pas  la fin de ma vie politique. Mieux aux premiers moments de ce nouveau départ, j’ai annoncé que je cheminerais avec un parti dont je me sentirais proche. C’est ainsi que j’ai adhéré au Mouvement pour le Burkina du Futur (MBF), parti dont certains m’ont attribué la paternité. Mais voyez-vous,  ce n’est que récemment que j’y ai occupé un rôle officiel : les dirigeants m’ont fait confiance pour être le directeur national de campagne de ce jeune parti. Peut-être que cette responsabilité qui m’était confiée nourrissait le secret espoir que je convainque mes anciens camarades qui n’auraient pas été retenus par l’UPC de rejoindre le MBF. Si tel était le cas, je pense avoir à ce niveau accompli ma mission  puisque, sur les 13 démissionnaires de l’UPC que nous étions, 12 se sont alignés sur  les registres du MBF. 

 

 

 

Quelle est votre appréciation d’ensemble en ce qui concerne l’organisation du scrutin qui vient de s’achever ?

 

 

 

Comme en toute chose humaine il y a  des insuffisances, ce scrutin n’a pas fait exception. Ces petites difficultés ne sont pas de nature à remettre fondamentalement en cause les résultats qui en sont sortis. De plus, je pense qu’il faut faire avec ces imperfections au regard d’un certains nombre de paramètres tels que l’insécurité qui laissait voire que la tenue de ces élections n’était pas gagnée d’avance. Mais de façon générale à notre niveau, nous sommes satisfaits de la manière avec laquelle les élections ont été conduites. Partant de là, je félicite  la Commission électorale nationale indépendante(CENI) pour le travail abattu, tout en l’invitant à mieux faire les prochaines fois.

 

 

 

Votre parti actuel, le « Mouvement pour le Burkina du Futur », a obtenu trois sièges à l’hémicycle. N’est-ce pas bon signe pour une nouvelle formation politique comme la votre ? Qu’est-ce qui a milité en  votre faveur?

 

 

 

Pour un jeune parti, ce n’était pas évident, mais la réalité est que les candidats, pour la plupart, ont eu à faire leurs preuves dans le précédent parti, à savoir l’UPC : par exemple  les trois qui ont été élus sur les listes provinciales ; Hervé Konaté, élu sur la liste du Kénédougou, était déjà député et il a su y  maintenir sa base ; ça été le même cas pour Boureima Gnoumou inscrit sur la liste provinciale du Tuy ;  et moi-même élu sur la liste provinciale de la Kossi.  C’est tout ça qui explique un peu ce succès. Je peux me hasarder à faire une appréciation positive mais pas satisfaisante. Ce résultat est largement en deçà de mes attentes. On s’était fixé comme  objectif avoir 10 ou 11  députés à ces législatives. Mais après avoir présenté dix sept listes provinciales et une nationale, on s’en est sorti avec quatre députés dont trois au niveau provincial et un à l’échelle nationale. Avec ce résultat, nous sommes classés sixième sur l’échiquier politique national  sur  environ 126 partis qui sont allés à l’assaut des sièges. Pour cette raison, quelque part notre résultat nous conforte dans l’idée  même que nous sommes certes jeunes, mais avons une masse critique d’électeurs qui nous a  permis d’avoir un des 16 sièges de la liste nationale. Par ailleurs, il faut quand même reconnaître que cette campagne était assez exceptionnelle tant pour les législatives que pour la présidentielle. Les cinq partis qui nous ont devancés ont une histoire, des ressources financières, un portefeuille relationnel important et des militants ayant une capacité de contribution très importante.  Si on rapporte le nombre de sièges à la modestie des moyens mis en jeu, le MBF est le  premier parti sur le plan national. Et avec ça, je crois que dans les années à venir, il faudra remettre ce parti à la bonne place, à savoir la première.

 

 

 

 Daouda Simboro va-t-il siéger à l’Assemblée nationale ou est-ce qu’il va conserver son juteux poste à la Banque agricole du Faso (BADF)?

 

 

 

J’ai été élu, donc j’attends qu’on installe le Parlement. De plus je ne sais pas ce  que demain me réserve. Mais dans tout les cas, je voulais prouver une chose : que les populations de la Kossi m’avaient adopté. Cela étant fait, c’est à eux qu’appartient mon mandat. Par conséquent, s’ils me disent de siéger, ce n’est  pas exclu que je le fasse étant donné que ce sont elles qui m’ont élu.  En outre, j’ai déjà fait le sacrifice de la Banque pour aller à l’Assemblée nationale. Et à la banque où j’étais,  je n’occupais pas un petit poste. Ce n’est pas le poste qui est le plus déterminant, mais  le sacerdoce que je m’impose qui est le plus important. Dans la même veine, pour l’heure, ce qui est primordial, c’est que je valide le mandat avant de réfléchir à la suite. Néanmoins, dans moins d’une semaine je dois repartir dans la Kossi pour consulter ceux qui m’ont fait confiance. Et ensemble avec les principaux leaders d’opinion on verra  la conduite à tenir.

 

 

 

C’est quoi la suite pour le MBF ?

 

 

 

Le MBF entend s’organiser sur le terrain, car au moment où débutait la campagne, on n’avait pas fini notre implantation sur le territoire national. C’est pourquoi du reste on est allé aux élections en comptant simplement sur  les zones qu’on avait déjà couvertes. En clair, le travail va consister à terminer ce maillage du territoire, car on entend conquérir les mairies, une trentaine environ. A l’issue de cela, l’étape suivante sera de travailler pour la conquête du pouvoir. 

 

 

 

Est-ce qu’on peut s’attendre  à ce que cette fois-ci l’ancien député que vous êtes occupe une fonction ministérielle dans le futur gouvernement si la proposition lui en était faite ?

 

 

 

Pour beaucoup de ministres, ils sont appelés à servir le pays. Et quand on vous fait l’honneur en vous appelant à servir le pays,  peu refusent. En ce qui me concerne, j’ai déjà une mission que j’entends mener à terme. Etre ministre  à mon niveau n’est pas une préoccupation.  Mais si davanture on m’appelait au gouvernement, je juxtaposerais les missions que j’ai à la banque. Avant, il faut dire que  j’appartiens à un parti, donc si un poste ministériel était proposé au MBF, on se consulterait au sein du parti pour voir qui va l’occuper. Personnellement, ça ne m’intéresse pas comme je l’ai dit précédemment. Mais je serais honoré que le MBF ait un portefeuille ministériel.

 

 

 

Au scrutin de 2015, l’Union pour le progrès et le changement (UPC) a obtenu 33 sièges, et le président du parti  est arrivé 2e à la présidentielle. Cette année les résultats sont plutôt décevants. Et certains viennent à dire que Zèph est le plus grand perdant de ces élections. Qu’en pensez-vous ?

 

 

 

Théoriquement je n’ai pas à parler de ce parti puisque j’ai tourné la page. Cependant en tant que citoyen qui observe les agitations qui se déroulent sur la scène politique burkinabè,  je pense que l’analyse s’impose à tous. Cela dit, on ne peut pas prétendre qu’on est devenu plus fort lorsqu’on passe d’un effectif de 33 députés  à 12. C’est revenir à 1/3  de ses capacités. Il y a une sorte de parallèle qui peut être établi dans la mesure où le score à la présidentielle a suivi la même tendance : de  29% à la présidentielle passée,  le résultat est revenu à 12. Cela n’est pas étonnant.

 

 

 

Est-ce que les multiples départs du parti n’ont pas contribué à le fragiliser ?

 

 

 

 Certains diront que notre départ y est pour quelque  chose, mais une fois de plus je rappelle que nous avons tout fait pour ne pas en arriver là. Mais hélas, la réalité est là, on est parti et on nous a traités de taupes.  Si tant est qu’ils se sont débarrassés de ces taupes, normalement les plantes du jardin devraient pousser et être plus vertes. Et visiblement il y a toujours un problème puisque ce n’est pas ce qu’on a constaté. Les départs de ce parti peu avant l’ouverture de la campagne nous ont donné raison trois ans plus tard, donc nous, les 13 démissionnaires, on a eu raison trois ans plutôt. Le verdict est tombé et les faits, têtus qu’ils sont,  ont prouvé qu’il y a un problème à l’UPC. Rien de ce parti ne me concerne encore, mais ça aurait été bien pour la démocratie burkinabè que cette formation politique  puisse compter, car elle a été la première à proposer le changement aux Burkinabè. Je ne sais pas quel va être l’avenir de ce parti. Mais de toute évidence, si les problèmes qui ont été dénoncés çà et là persistent,  je crains qu’il ne devienne  à la longue un simple parti ordinaire comme tous les autres. Je sais qu’à l’heure actuelle, Zéphirin Diabré sait que, s’il m’avait écouté, beaucoup de choses auraient été évitées. Je crois que c’est la dernière fois que je parle de ce parti.

 

 

 

Vous qui l’avez côtoyé pendant un certain temps, croyez-vous qu’il pourra se relever d’une telle déroute électorale ?

 

 

 

Tout le temps que j’ai passé aux côtés de Zéphirin Diabré, pas un seul instant je n’ai remis en cause ses compétences ou ses capacités. Quand j’ai évoqué les problèmes, ils étaient d’ordre managérial,  portaient sur certaines décisions prises. Mais en aucun cas je n’ai douté qu’il ait  la carrure d’un homme d’Etat. Pour se révéler un homme d’Etat à même de conquérir et de gérer l’appareil d’Etat, il faut mettre en place tout un dispositif. Et c’est peut-être là qu’il a besoin d’aide. S’il est aidé à ce niveau, qui sait, il se relèvera certainement. Je pense que c’est une personne suffisamment avertie qui devra avec humilité tirer les leçons de ce qui s’est passé, se remettre en cause et se relancer. Ce qui lui arrive est juste une leçon, et s’il l’assimile, il pourra se relever. Sinon, toute chose restant égale par ailleurs, ca ne marchera pas. De toutes les façons, chacun  aura véritablement tiré leçon de sa véritable valeur de ces élections. En ce qui me concerne, nous avons un président élu, aux côtés de qui nous nous sommes rangés avec fierté. On veut cinq ans de gestion dans la tranquillité pour  le locataire de Kosyam. Et on va l’appuyer  pour ce faire et être comptable des résultats  obtenus dans l’exercice du mandat à venir. Tous ceux qui envisagent de lui mettre des bâtons dans les roues devront penser au Burkina et l’accompagner dans la mise en œuvre de son programme durant son dernier  mandat. Les élections qui viennent vont être encore plus ouvertes si on intègre le fait que le Président n’aura pas à briguer un autre mandat ; chose qui, toutefois, favorisera peut-être l’émergence d’une autre classe d’hommes politiques.

 

 

 

Quels sont aujourd’hui vos rapports ?

 

 

 

On n’a aucun rapport.  La dernière fois qu’on s’est adressé la parole, c’était juste pour dire bonjour, président. Et cela date de plus de sept mois, car c’était au temps fort de la covid 19. Il n’y a pas eu non plus d’échange téléphonique entre nous. Et je pense que tous les deux, nous nous en portons bien. Qu’à cela ne tienne, c’est quelqu’un que j’ai toujours respecté, chose que je continue de faire d’ailleurs. Mais cela ne m’a pas empêché de défendre mes convictions et mes positions ; choses que je défendrai devant quiconque.  Je lui souhaite au passage bon vent, je n’ai aucune animosité à son égard. Je regrette seulement qu’il ait à retarder ses ambitions ou à en faire le deuil de certains.  Sinon tout est entre ses mains.

 

 

Interview réalisée par

Roukiétou Soma

 

Dernière modification ledimanche, 06 décembre 2020 17:22

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