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Lamine Sanou, promoteur de Lam’s management: «Développer Bobo, c’est accélérer le développement du Burkina»

Il est sans nul doute l’un des internautes les plus prolifiques en publication et aussi, les plus suivis dans la région de Bobo. Toujours prompt à réagir à des sujets d’actualité en vue d’apporter un regard critique ou même de donner ce qu’on pourrait qualifier, sa part de vérité, Lam de Dioulassoba, de son vrai nom Lamine Sanou, est plus que jamais devenu un monstre des réseaux sociaux dans la région et dont les publications ont toujours suscité de multiples réactions. Profondément attaché à cette ville de Sya qui l’a vu naître,  cet internaute ne manque pas souvent et avec des mots très durs, de s’en prendre ouvertement aux autorités qu’il accuse de faire peu ou rien pour sa localité. Alors taxé de régionaliste, Lam de Dioulassoba s’en défend et dit être tout simplement engagé dans un combat pour le développement de Bobo et sa région. C’est avec le franc-parler qu’on lui connaît qu’il a accepté de se prêter à nos questions. Lisez plutôt.

   

 

Qui est Lam ?

 

Je suis Lamine Sanou. Mais je suis plus connu sous le nom  Lam qui est tout simplement le diminutif de Lamine. Je suis un agent communal  et je suis également un promoteur culturel sous le label Lam’s management. Et c’est grâce à cette structure que j’organise chaque année, le grand évènement culturel dénommé  « Moussow ka sou » qui veut dire la nuit des femmes. La manifestation a lieu chaque 8 mars et c’est toujours pour moi l’occasion de magnifier la femme burkinabè à travers un gigantesque concert avec la participation d’artistes nationaux et internationaux.

 

Vous êtes surtout très connu sur les réseaux sociaux à travers vos multiples publications relatives à la vie sociopolitique au Burkina et particulièrement à Bobo-Dioulasso. Lam est-il un activiste ?

 

Je suis juste un citoyen libre de ses pensées et de ses mouvements. J’aime mon pays, le Burkina Faso, et je me dois en toute circonstance d’apporter ma pierre à l’édification de notre société. Et c’est ce que j’essaie toujours de faire par des critiques, des propositions et des points de vue qui peuvent être pris en compte ou pas. Non, je ne me considère pas comme un activiste ou un lanceur d’alerte. Je ne suis qu’un citoyen lambda soucieux du développement de son pays et de sa région. Et pour ça, je n’hésiterai jamais à dire ce que je pense pour un mieux-être de nos populations. Aujourd’hui, c’est un devoir pour nous de tirer souvent la sonnette d’alarme et même de porter sur la place publique ce qui échappe le plus souvent aux décideurs politiques. Le combat que nous menons vise surtout à baliser le terrain pour les générations futures. Le Burkina de demain doit être meilleur à celui d’aujourd’hui.  

 

Quelle lecture faites-vous aujourd’hui de la situation sociopolitique au Burkina après l’insurrection des 30 et 31 octobre 2014 ?

 

Je suis aujourd’hui  un citoyen très déçu de l’évolution politique dans mon pays. Ma position n’a pas variée depuis les évènements des 30 et 31 octobre. Parce que pour moi, il n’y a eu que de la duperie. Ce qu’il faut savoir c’est qu’une insurrection, selon un libre penseur, balaie les hommes et le système. Mais dans le cas du Burkina, des hommes ont été balayés mais le système est resté le même. Il a même empiré au regard de ce que nous vivons aujourd’hui. La corruption, le clientélisme, la gabegie, le népotisme ont pris des proportions très inquiétantes. A mon humble avis, il ne faut pas parler d’insurrection.  Rien n’a fondamentalement changé. Parlant du foncier par exemple que certains qualifient et à juste raison de bombe à retardement, sous l’ère Compaoré, il n’y avait qu’une quarantaine de sociétés immobilières. Mais aujourd’hui, on est à plus de deux cents sociétés immobilières. Des gens venus de nulle part continuent de s’organiser pour faire main basse sur de grandes superficies au détriment de ces milliers de familles en quête d’un lopin de terre pour y vivre et se sentir Burkinabè. Je proteste vigoureusement contre la gestion du foncier au Burkina. Ils ont plutôt suspendu les lotissements pour faire profiter les plus nantis au détriment des plus pauvres. Avec ça, on ne peut pas parler d’insurrection.  On n’a fait que déshabiller saint Pierre pour habiller saint Paul. Les hommes ont changé, mais le système demeure.

 

Vous êtes souvent très acerbe dans vos critiques. N’avez-vous pas peur de ces mots très durs que vous employés souvent contre des autorités ?

 

C’est pour moi une façon de faire passer le message et d’attirer l’attention des autorités sur des questions brûlantes. Comme le disait mon petit frère Naïm Touré, il faut souvent choquer pour se faire entendre.  Pourquoi avoir peur quand on est convaincu de la justesse du combat qu’on mène ?  Non, je n’ai pas peur et d’ailleurs je dirai que je ne fais qu’exercer un droit, c'est-à-dire, ma liberté d’expression dans un contexte démocratique. Il ya beaucoup de choses à corriger aujourd’hui dans la gestion du pouvoir d’Etat et tout le monde le sait bien. Je continuerai toujours à dénoncer et avec des mots très durs comme vous le dites, les tares de la société. Cela me rappelle cette citation du célèbre journaliste Norbert Zongo qui disait « La pire des choses, ce n’est pas la méchanceté des gens mauvais, mais le silence des gens bien ». Donc nous serons toujours là pour dénoncer les incohérences du régime mais aussi pour l’encourager dans ses bonnes actions  en faveur des populations.

 

Avez-vous déjà reçu des menaces ?  

 

Personne ne m’a frontalement rencontré ou ne m’a appelé au téléphone pour me proférer des menaces. Mais je sais que je dérange et les échos qui me parviennent à travers certaines de mes publications en sont la preuve. Des amis m’ont déjà rapporté des faits, selon lesquels des personnes s’intéresseraient à mon itinéraire et voudraient aussi savoir avec quel moyen je me déplace. Mais tout cela ne peut pas me faire reculer au regard du combat que je mène. Je n’ai qu’un seul objectif. Le développement de mon pays et de ma région.  et pour ça, je suis prêt à donner ma vie.

 

Parlant justement de votre région, vous avez depuis bien longtemps un regard critique sur le développement de Bobo. Des raisons ?

 

C’est avec un réel plaisir que j’ai toujours répondu à cette question. Bobo a beaucoup souffert du fait de ses politiciens plutôt préoccupés par leur propre développement que par le développement de la localité. La ville regorge d’énormes potentialités pour son développement. Et l’un de ses atouts majeurs est sa situation géographique, c'est-à-dire ce grand carrefour au cœur de l’Afrique de l’Ouest. Pour moi, Bobo peine à décoller depuis les indépendances jusqu’à nos jours. Si les choses se passaient comme il se devait, cette ville avec son riche potentiel naturel devrait être aujourd’hui considérée comme  la mamelle de tout le Burkina. Développer la région de Bobo pour moi, c’est accélérer le développement du Burkina. Mais j’en veux particulièrement aux leaders politiques de la région qui sont prêts à n’importe quel sacrifice pour leur parti politique plutôt que pour le développement de leur localité. Et c’est vraiment dommage. Ils sont en partie responsables du marasme économique de Bobo et de cette galère que vivent les jeunes. Au lieu de circonscrire leurs activités aux simples  parrainages, les leaders politiques de la région auront plutôt intérêt à s’investir dans les chantiers de développement.  C’est sur ce terrain qu’ils pourront réellement se rendre utiles à eux-mêmes et à la région.

  

Certains  affirment pourtant que la jeunesse bobolaise est plutôt victime de sa passivité. Que répondez-vous ?  

 

Ceux qui le disent ne connaissent pas en réalité la jeunesse bobolaise. Cette frange de la population est plutôt victime du mépris des autorités à mon avis. C’est une jeunesse qui est toujours prête à assumer ses responsabilités pour peu qu’on lui fasse confiance et qu’on lui donne l’occasion. Si vous allez à Ouaga ou dans d’autres localités du pays par exemple, des Bobolais occupent des postes de responsabilités et se montrent toujours à la hauteur des tâches qui leur sont confiées. Donc, je dirai que le Bobolais est travailleur comme tous les autres Burkinabè. Mais seulement, il n’a pas toujours la chance  de bénéficier des opportunités qui lui permettront de s’affirmer sur l’échiquier national en matière d’emploi.  

 

Est-ce que vous avez le soutien de cette jeunesse dans le combat que vous menez ?

 

Au début, certains croyaient que je ne faisais que du populisme. Mais ils ont fini par comprendre qu’en réalité c’est une cause noble que je suis en train de défendre pour l’intérêt général. Ceux qui étaient réticents au début ont commencé à entrer dans le mouvement et je pense qu’aujourd’hui, je suis bien compris et bien soutenu dans mon combat. Cela me réconforte davantage et  c’est pourquoi je  suis maintenant plus engagé qu’avant. J’ai toujours eu des échanges avec les jeunes de Bobo et cela m’a permis de tisser des liens très étroits de collaboration avec beaucoup d’entre eux. Je vous invite à suivre les réactions sur mes publications pour vous faire une idée de ce que je représente aujourd’hui pour cette jeunesse.

 

Certains vous collent l’étiquette de régionaliste. Qu’en dites-vous ?

 

(Rires). Je ne sais pas ce qu’ils entendent par régionaliste. J’aime le Burkina et je le clame partout où je veux. Il en est de même que pour ma ville. J’aime Bobo et personne ne peut m’empêcher de le manifester. Si exprimer sa fierté d’appartenir à une ville est considéré comme du régionalisme, alors je le revendique. Si revendiquer des projets de développement pour sa région est du régionalisme, alors je le revendique. Tout le monde aime sa région et tout le monde est soucieux du développement de sa région. C’est mon cas et nul ne pourra m’enlever l’intérêt que je porte à cette ville. Le problème de Bobo est qu’il est toujours absent dans les grandes sphères de décision et c’est ce qui explique en partie son retard. Cela nous gêne beaucoup et nous n’allons pas cesser de nous faire entendre pour que notre ville soit prise en compte dans les grands projets de développement. Comment expliquez-vous par exemple que l’un des tous premiers centres hospitaliers universitaires du pays, Souro-Sanou manque d’eau pour le bon fonctionnement de ses services ? C’était la triste réalité, il ya de cela quelques jours. Et pourtant la région a un potentiel hydrique qui dépasse largement ses besoins. On ne peut pas se taire devant une telle situation. Si c’est ça être régionaliste, alors je le suis.  

 

Pensez-vous aujourd’hui avoir pu apporter quelque chose ou un changement quelconque dans cette ville à travers vos publications ?

 

Je suis très heureux de constater que ma page est beaucoup suivie et même par des responsables administratifs et politiques dont je préfère taire les noms.  Une chose est sûre,  mes publications ne laissent personne indifférente. C’est en effet suite à une de mes revendications sur les réseaux sociaux demandant au richissime homme d’affaires burkinabè Kadhafi, l’aménagement de la voie passant devant son immeuble dans la zone commerciale qu’un projet de bitumage a été lancé et même exécuté. J’ai reçu pour cela des encouragements de la part des internautes bobolais. Il y a eu aussi le combat que nous avons mené et gagné pour la préservation des ressources naturelles dans la région. Nous étions aux avant-postes du combat pour la protection de la forêt classée de Kua et nous avons été entendu. C’est encore moi qui ai lancé une alerte sur la dégradation et les risques d’effondrement de la toiture de la mosquée de Dioulassoba. La suite, on la connaît. Les exemples ne manquent pas dans ce sens et tout cela est une fierté pour la jeunesse bobolaise.  

 

Lam a-t-il des ambitions politiques ?

 

Pour le moment non. Mais s’il faut un jour passer par là pour que les choses bougent au rythme qu’on veut, nous n’hésiterons pas à investir le terrain politique. Je suis pour le moment un simple citoyen soucieux du développement de sa région.  Je continuerai à m’investir pour le développement de mon pays et de ma région. Alors s’il faut s’engager dans la politique pour atteindre les objectifs qu’on s’est fixés, je le ferai et en temps opportun.

Propos recueillis par Jonas Apollinaire Kaboré 

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