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Transition malienne :Assimi Goïta et le quarteron d’officiers félons

 

Il faut croire que dans sa formation d’officier il y avait un module consacré à la préparation et à l’exécution de coups d’Etat. Neuf mois seulement après avoir déposé le président Ibrahim Boubacar Keïta, précisément le 18 août 2021, le colonel Assimi Goïta vient en effet de perpétrer son deuxième putsch.

 

 

Cette fois-ci, c’est le président et le Premier ministre de la Transition qui étaient dans le viseur du putschiste impénitent, avec toujours le même mode opératoire. Le chef de l’Etat et son PM ont été tous les deux arrêtés, puis conduits au camp militaire Alpha Yaya de Kati où ils ont été internés.

 

La raison ici : la formation de la nouvelle équipe Moctar Ouane qui, entre autres changements, a vu le départ des colonels Sadio Camara et Modibo Koné des postes de ministres de la Défense et de la Sécurité. Ils ont beau avoir été remplacés par d’autres militaires, l’affaire n’était pas du goût du vice-président de la Transition, chargé des questions de défense et de sécurité qui a choisi de renverser toute la table gouvernementale.

 

Dans un communiqué rendu public hier mardi 25 mai 2021, le VP a annoncé avoir déchargé Bah N’Daw et Moctar Ouane  de  de leurs prérogatives, car coupables, à ses yeux, de n’avoir pas respecté la Charte de la Transition.

 

Le texte invoqué stipule en effet que le « vice-président de la Transition est chargé des questions de défense et de sécurité ». Une formulation pour le moins imprécise, pour ne pas dire confuse, qui laisse libre cours à toutes sortes d’interprétations.

 

On peut accorder à Assimi Goïta que son orgueil de vice-président ait été froissé s’il n’a effectivement pas été consulté. Mais de là à en prendre prétexte pour donner un coup d’arrêt à la Transition, qui a eu du mal à se mettre en route, il y a un pas que le bidasse n’aurait pas dû franchir.

 

Ce putsch dans le putsch vient compliquer une situation qui n’était déjà pas simple. Et on est bien curieux de savoir  ce que fera la CEDEAO, qui a dépêché dès hier sur les rives du Djoliba son émissaire, l’ancien président nigérian Goodluck Jonathan.

 

Et c’est reparti pour des chassés-croisés  politiques comme ce fut le cas lors du renversement d’IBK : rencontres avec les embastillés de Kati, les militaires, les partis politiques et les organisations de la société civiles. Mais sur quoi tout cela va-t-il déboucher ?

 

L’organisation sous-régionale pourra-t-elle remettre en selle les deux ex-têtes de l’éxécutif et dans quelles conditions ?

 

A supposer qu’elle y parvienne, de quelle autorité disposeront-elles désormais ?

 

Pour autant on voit mal la CEDEAO s’accommoder de l’accaparement de tout le pouvoir par la soldatesque quand on se rappelle comment, il y a quelques mois, elle avait déjà fait ce qu’elle pouvait pour éviter une très grande coloration kaki de la Transition.

 

L’autre scénario possible, c’est une Transition dans la Transition avec de nouvelles têtes.  

 

Quoi qu’il en soit, c’est du temps perdu alors que l’élection présidentielle est prévue dans moins d’une année.

 

Alors que la communauté internationale condamne ce coup de force, la société civile et les partis politiques qui estimaient, avec juste raison, que l’armée avait volé leur victoire après plusieurs semaines de contestations contre le pouvoir d’IBK se complaît jusque-là dans une forme d’apathie. Résignation ou signe d’approbation ? 

 

Comme on le voit, ces militaires ne rendent pas service à leur pays, dont ils sont même la honte.

 

Voici en effet des gens qui, il y a une dizaine d’années, étaient sortis de leur caserne pour renverser le président Amani Toumani Touré parce que, prétendaient-ils alors, ils voulaient plus de moyens pour aller combattre l’hydre terroriste qui s’était sanctuarisée dans le septentrion du pays.

 

Trois coups d’Etat après, la situation sécuritaire reste aussi calamiteuse, des pans entiers du territoire échappant encore au contrôle de l’Etat. Et pendant ce temps, les militaires, dont la vocation est la défense de l’intégrité territoriale, s’écharpent à Bamako au sujet du pouvoir et de l’avoir.

 

Quelle image de leur pays donnent-ils ainsi pendant que des soldats étrangers se font tuer dans les combats contre les groupes armés ?

 

S’ils voulaient démontrer ainsi leur puissance, Assimi Goïta et le quarteron d’officiers félons, pour emprunter l’expression du général de Gaulle, auraient dû aller se frotter aux djihadistes plutôt que de terroriser de pauvres civils dont ils devraient assurer la sécurité et la quiétude.     

 

Il n’y a pas pire façon de déshonorer l’uniforme qu’ils arborent pourtant fièrement dans les rues de Bamako.

 

 

 

Alain Saint Robespierre

 

Dernière modification lemercredi, 26 mai 2021 20:44

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