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Présumées exactions des FAMA : Moura, un nom tragiquement prémonitoire

 

C’est aux accords du clairon et de la trompette que l’état-major des Forces armées maliennes (FAMA) répète le refrain d’une grande victoire sur de présumés terroristes au centre du pays dans la dernière décade du mois dernier.

 

 

 

A en croire son communiqué officiel, pas moins de 203 assaillants, ou plus exactement des assiégés dans le village de Moura, situé dans le cercle de Djenné, au centre du Mali, ont été tués. Une cinquantaine d’autres présumés terroristes ont été arrêtés par la même occasion.

 

 

Ce succès des FAMA est consécutif à des renseignements dignes de foi, selon leur hiérarchie, faisant état d’une réunion de plusieurs Katiba du Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans dans ce village, Moura. Il fut alors assiégé pendant 5 jours par l’armée malienne avec l’appui de ses supplétifs russes avant que, par des frappes aériennes suivies d’un nettoyage terrestre par les fantassins, plus de 200 présumés islamistes ne soient tués ou capturés.

 

 

 Qu’on a envie d’applaudir à tout rompre cette grandissime illustration de la montée en puissance des Fama ! Hélas, il y a Amnesty international, la Mission des Nations unies pour le Mali (MINUSMA) et des témoins résidents à Moura qui expriment leurs préoccupations, si ce n’est leur indignation que les militaires maliens et leurs alliés russes aient tiré dans le tas, le jour de la foire du village. Pas sûr donc que ceux qui sont morts à Moura au cours des assauts des Fama dans la localité ces 10 derniers jours soient tous des belligérants djihadistes. Ce siège suivi d’attaques combinées aurait fait périr des civils innocents, au mépris des droits de l’homme et de la convention de Genève sur les conflits armés, selon les organisations et les témoins cités plus haut. Amnesty international parle ainsi de près de 500 victimes dans des opérations « assimilables à des crimes de guerre » et la MINUSMA appelle à « établir les faits et les circonstances».De quoi mettre un bémol aux encouragements aux Fama pour cette grande victoire !

 

 

C’est vrai qu’il n’y a jamais de guerre propre et que les victimes collatérales sont nombreuses à tomber dans les batailles. Mais l’armée malienne doit joindre l’acte à la parole, conformément aux déclarations de son état-major qui soutient que le respect des droits de l'homme et du droit international humanitaire « restent une priorité dans la conduite des opérations ».

 

 

De fait, c’est la deuxième fois en l’espace d’un mois que des voix s’élèvent pour s’interroger  sur les méthodes de guerre des Fama. En effet, au début du mois de mars 2022, le gouvernement mauritanien s’était plaint de la disparition de plusieurs de ses citoyens civils à la frontière avec le Mali. Malgré les dénégations de l’armée malienne, bien des observateurs soulignent que les mercenaires russes qui lui prêtent main-forte sont loin d’être blancs comme neige. Et de pointer du doigt leurs méthodes en Libye, en Centrafrique et en Syrie, où certains d’entre eux se sont construit une réputation de Terminator, de robot froid et implacable contre l’ennemi.

 

 

Voilà donc la hiérarchie de l’armée malienne prévenue. La fin ne justifie pas toujours les moyens, même en guerre. Mais peut-elle vraiment tenir en laisse les oursons sibériens venus pêcher du tilapia sur les rives du Djoliba ? On attend de voir, non sans faire remarquer que Moura aura été un nom tragiquement prémonitoire pour plusieurs centaines de personnes le mois dernier.

 

Zéphirin Kpoda 

 

Dernière modification lelundi, 04 avril 2022 22:00

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