Menu

Retour de Gbagbo : Que va-t-il faire de sa liberté ?

 

Longtemps espéré et attendu, l’ancien président Laurent Gbagbo la « lumière », comme il est appelé à Mama, voire dans toute la région du Centre-Ouest de la Côte d’Ivoire, est bien arrivé à Abidjan en milieu d’après-midi, hier 17 juin 2021.

 

 

La presque demi-heure de retard de l’avion qui le ramenait n’a entamé en rien la patience dans la ferveur populaire  de ses nombreux partisans venus, qui à l’aéroport, qui au siège du FPI, qui aux abords des artères qu’il a empruntées pour rejoindre ce qui sera son lieu de résidence dans le quartier huppé de Cocody.

 

Pour un événement, c’en fut un. En effet, au-delà de la lagune Ebrié, ce retour va marquer l’histoire africaine comme l’épilogue d’une réhabilitation du premier chef d’Etat du continent extradé vers la Cour pénale internationale (CPI) de la Haye puis acquitté au terme d’une longue procédure judiciaire avant d’être accueilli plus qu’en héros dans son pays.

 

 Plus qu’un héros, Gbagbo l’est pour ses inconditionnels partisans du GOR, « Gbagbo ou rien ». Pour ces passionnés du Front populaire ivoirien (FPI), ce retour triomphal de leur champion est comparable à l’avènement  du Christ, excusez du peu, car l’homme vient sauver la Côte d’Ivoire des errements du Rassemblement des houphouëtistes pour la démocratie et la paix. Et le retour d’un rédempteur, cela se prépare, se vit, se fête comme il se doit et Gbagbo en a eu pour son charisme ; lui dont le retour au pays natal a suspendu la vie de ses compatriotes au programme du vol régulier de Brussels Airlines de ce 17 juin. Les forces de l’ordre ont dû mouiller l’uniforme et manier matraques et grenades lacrymogènes pour ne pas être débordées par la foule de ses inconditionnels accourus par milliers à l’aéroport.

 

En vérité, si comparer l’homme au messie, c’est exagérer dans la bêtise du culte de la personnalité, on doit reconnaître en revanche que c’est un véritable miraculé des rudes adversités, voire animosités de la politique ivoirienne avec ses sinuosités dramatiques. Il est ainsi resté insubmersible aux crises politiques de 2001 et de 2010-2011, sans oublier la tentative de coup d’Etat muée en rébellion armée entre 2002 et 2008 et la répression sous le régime du parti unique. Et quand on le croyait perdu dans les geôles de la CPI, accusé de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité, le voilà qui échappe à la prison à vie et sur le point de se refaire une virginité politique. Cette résilience aux soubresauts parfois tragiques de la vie politique en Côte d’Ivoire est notable et le leader historique du FPI a une carte à jouer dans le processus actuel de la réconciliation nationale dans son pays.

 

En tout cas pour la tendance GOR du FPI, ce retour est la condition sans laquelle les propositions du président Alassane Ouattara ne sont pas recevables sur cette question. Au contraire, revenu au pays, Gbagbo passe à leurs yeux pour un facilitateur de choix de la réconciliation, s’il lui est reconnu le statut d’ancien chef d’Etat et de président du FPI. Sur ces derniers aspects, ce retour triomphal de Laurent Gbagbo est une forte indication que le président Alassane Ouattara a dû lâcher du lest. En contrepartie de quoi ? Que  l’« enfant terrible de Mama » mette de l’eau dans son vin politique et qu’il se garde d’être le trublion, pour ne pas dire le poison redouté d’une coexistence pacifique des populations ivoiriennes dont les blessures suite à la guerre civile et aux crises politiques à répétition sont loin d’être totalement cicatrisées.

 

Alors, sans être le messie, Gbagbo sera-t-il au moins un facilitateur de la réconciliation en Côte d’Ivoire et pas le trublion redouté ? On attend de voir !

 

 

Zéphirin Kpoda 

Dernière modification ledimanche, 20 juin 2021 21:14

Ajouter un Commentaire

Code de sécurité
Rafraîchir

Retour en haut