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Meilleur buteur, Fasofoot: Ousmane Zoungrana, un record jamais égalé

Il est celui qui détiendrait depuis plus de 35 ans le titre de meilleur buteur dans lhistoire du championnat national de football. Avec un total de 26 buts marqués dans la compétition en 1984, Ousmane Zoungrana de lAs- fonctionnaire de Bobo-Dioulasso conserve jalousement son record que plusieurs générations de joueurs peinent encore à égaler. Au terme de la saison 2020-2021, où les attaquants ont été très prolifiques, nous avons approché Ousmane Zoungrana, ce buteur des années 80. Lhomme avait à l’époque, marqué les esprits en football à Bobo-Dioulasso par sa pointe de vitesse foudroyante, sa rage de vaincre et surtout son sens inné du but. A 57 ans, lex- sociétaire de lASFB reste toujours un passionné du ballon rond. Fier de sa carrière, il déplore cependant le délaissement dont font lobjet les anciennes gloires du football national. Nous lavons joint mardi au téléphone depuis la région cotonnière de Kourouma où il exerce comme saisonnier à la Sofitex. Il a bien voulu se prêter à nos questions.

 

 

 

Que devient Ousmane Zoungrana ?

 

Merci davoir pensé à moi et je pense que cest une première depuis plus de trente ans que jai quitté le terrain de football comme joueur. Je suis employé à la Sofitex il y a de cela plusieurs années et toujours avec le statut de saisonnier. Actuellement je suis en poste dans la région cotonnière de Kourouma. N’étant pas embauché comme agent de la société, je profite de linter campagne pour rentrer à Bobo où se trouve ma famille. Une fois à Bobo, je reprends mes activités sportives comme formateur sur le terrain du JCB à Lafiabougou. Jai débuté ma carrière de formateur dans les années 90 au centre de formation Paré Issa. Cest un centre qui appartenait au regretté Basile Paré qui fut président de lASFB. Je dois aussi souligner que le capitaine des Etalons Charles Kaboré faisait partie de la première promotion de ce centre au moment où j’étais à lencadrement.

 

Suivez-vous le championnat national de football ?

 

Etant à Kourouma il mest très difficile de vivre les mêmes émotions que tous ceux qui sont dans les stades. Mais je suis parfaitement le championnat grâce à la retransmission des matches sur la radio nationale que je ne rate jamais. Je sais que cest lAS Sonabel qui a été championne cette année. Je sais aussi que cest lAS douanes qui est arrivée deuxième. Jai surtout aimé la lutte pour le titre de meilleur buteur. C’était très serré entre Hassamy Sansan Da et Mohamed Lamine Ouattara. Mais au final, le joueur de lAS douanes la emporté. Je crois que le championnat était très animé cette année et je félicite les joueurs mais surtout les encadrements techniques qui sont en train de faire un travail formidable.  

 

Justement à propos de buteur, vous êtes celui qui détiendrait le record ?

 

Jai terminé la saison 1983-1984 avec un total de 26 buts et je ne pense pas que ce record ait été égalé jusque-là. Moi je jouais juste pour marquer et javais toujours réussi des doublés et des triplés. Je me rappelle que cest contre lASFAV (Association sportive des forces armées voltaïques) que jai réussi à marquer le plus de buts. Jai fait un triplé à laller et un doublé au retour. Face à lUSFRAN et à l’équipe de la Comoé,  javais marqué trois buts à laller contre chacune delles et 2 buts contre Banfora au retour. Il y avait souvent des actions qui me réussissaient sans que je susse pourquoi. Javoue que mon étoile brillait à l’époque et rien ne pouvait marrêter. En définitive, marquer un but était un jeu mais aussi un devoir pour moi parce qu’à chaque fois que je montais sur le terrain, les supporters attendaient leur cadeau de ma part. Et moi je ne me privais jamais de leur offrir ce but en guise de cadeau. C’était presque une obligation pour moi si fait que j’étais très adulé par le public et cest ce qui me motivait davantage.  

 

Quels étaient vos atouts en tant que buteur ?

 

Moi javais plutôt une très bonne vitesse. Une fois que jarrive à me défaire dun défenseur, on se donne rendez-vous devant la cage de son gardien. Me rattraper balle au pied était une mission impossible pour tous mes adversaires. Mes coéquipiers savaient que jadorais les espaces et à chaque fois quils avaient lopportunité, ils nhésitaient pas à lancer le ballon dans le sens de ma course. Un peu comme le fait aujourdhui le Paris Saint-Germain avec Kylian Mbappé qui est un très bon sprinter. Jai aussi marqué beaucoup de buts de la tête parce que javais une très bonne détente. Sur les corners j’étais lattaquant le plus surveillé dans la surface de réparation mais cela ne mempêchait pas de faire mal aux gardiens adverses.

 

Comment êtes-vous devenu ce buteur qui faisait trembler toutes les défenses adverses ?  

 

Il faut savoir une chose, en football cest le travail personnel qui est le plus important. Un joueur qui veut réussir doit savoir quen plus de lentraînement collectif, il a lobligation de travailler individuellement pour corriger ses erreurs, améliorer sa condition physique pour avoir un bon rendement sur le terrain. Moi je ne me privais jamais de me retrouver seul sur un terrain pour faire des essais de tirs lointains afin daméliorer mon adresse sur les balles arrêtées et les frappes lointaines. Jaimais aussi courir et chaque fois que le temps me permettait, je parcourais seul de longues distances. Cest pour ça que j’étais plus à laise sur le terrain et jarrivais à dominer physiquement, partenaires et adversaires.   

 

Quels souvenirs gardez-vous de cette équipe de lASFB ?

 

Je dois dabord vous dire que cest à lASFB que jai passé toute ma carrière. Je nai jamais évolué dans une autre équipe. Il est vrai que jai joué avec les silures de Bobo et jai déjà été sélectionné dans l’équipe nationale. Mais à ce niveau jai pu jouer des matchs amicaux. Seulement lors dun regroupement pour une compétition officielle avec les Etalons, jai contracté une blessure qui ne ma pas permis de compétir. Mon grand souvenir avec lASFB, le club de ma vie, cest ce titre de meilleur buteur. Nous avions une équipe homogène où chaque joueur savait ce quil avait à faire dans un match. Notre jeune génération est arrivée en D1 trouver un groupe bien soudé et qui était composé de joueurs comme Abdoulaye Compaoré, les regrettés Bado Alphonse et Issa Kaboré. Il y avait aussi Ibrahim Thiémounou, Lambert Bayala et le capitaine Tamani Issiaka. Ce dernier était un très bon milieu de terrain. Voilà des aînés qui ont su faciliter notre intégration au sein de l’équipe sénior. Nous navons pas eu de la peine à nous exprimer. Javoue que cette équipe de lASFB des années 80 jusqu’à une période très récente était une vraie famille. Je nai jamais regretté dappartenir à cette famille et si c’était à recommencer je le ferais. Nous avons joué juste pour le plaisir et pour lamour du club. Cest tout.

 

Est-ce que vous gagnez bien votre vie aujourdhui après cette brillante carrière ?

 

Il faut dabord savoir que dans les années 80 à 90, on jouait juste pour le plaisir et pour lamour du club. Largent importait très peu. Rare étaient ces joueurs qui pensaient à aller monnayer leur talent à lextérieur comme cest le cas aujourdhui. Même laprès foot n’était pas trop dans les esprits. Cest ce qui nous rattrape aujourdhui. Et cest vraiment dommage que de nos jours, beaucoup de joueurs de ma génération soient dans la déchéance totale. Ils sont nombreux à avoir défendu vaillamment les couleurs de l’équipe nationale et de leur club mais qui aujourdhui sont entièrement démunis. Moi personnellement, je ne suis quun saisonnier à la Sofitex depuis des années. Je pense que les autorités doivent faire quelque chose pour les anciennes gloires afin de susciter encore lenvie chez les jeunes. En nous regardant dans une telle condition misérable de vie, les générations actuelles pourraient prendre un coup au moral en se faisant déjà des soucis sur leur vie après leur carrière. Je pense que lEtat doit faire des efforts pour les anciens joueurs. Gagner ma vie ? Non, je me débrouille avec les moyens de bord comme tant dautres de ma génération.

 

Avez-vous les nouvelles de lASFB ?

 

Oui bien sûr. Comme je lai dit plus haut, je suis le championnat national et cette année on a eu très chaud. L’équipe a pu se maintenir et cest lessentiel. Je pense quil faut travailler à nous éviter dans les années à venir de telle situation. Ce qui me réconforte surtout est que l’équipe est restée fidèle à son slogan qui est « un grand club ne meurt jamais ». Jai des contacts avec le président Traoré Aboubacar et ses supporters encore en vie qui ne manquent pas de mappeler pour discuter de la vie du club avec moi. Je suis jaune et noir et je reste jaune et noir.

 

Si vous aviez des conseils à prodiguer aux jeunes buteurs daujourdhui, que leur diriez-vous ?

 

Moi je pense que la génération actuelle a tout ce quil lui faut pour réussir. A notre époque par exemple, suivre les meilleurs championnats européens en direct à la télé n’était pas donné à tout le monde. Alors que cest là aussi quon apprend beaucoup de choses en football. Les attaquants doivent savoir quils ont des efforts supplémentaires à faire sur un terrain pour pouvoir répondre à lattente du public. Car cest à eux de conclure les belles actions. Cest pourquoi je dis quun attaquant doit beaucoup travailler individuellement surtout pour être à la hauteur des attentes de ses supporters. Et un attaquant doit toujours penser à battre son propre record au fil des saisons. Le football burkinabè a connu de grands attaquants et je crois savoir que Mamadou Zongo dit Bebeto avait 22 buts avant de partir à lASEC dAbidjan. Si des années après le meilleur buteur du Fasofoot est encore à 26 buts, cest quil y a encore du travail. Donc jinvite les attaquants à se mettre au travail et à être très ambitieux. Jattends de voir Hassamy Sansan Da ou Mohamed Lamine Ouattara battre mon record lannée prochaine. Cest tout le mal que je leur souhaite.

 

Propos recueillis par

Jonas Apollinaire Kaboré  

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