Lutte contre le terrorisme: La Boucle du Mouhoun à la dérive ?
- Écrit par Webmaster Obs
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C’est vraiment un week-end du Nouvel An cauchemardesque qu’a vécu la Boucle du Mouhoun. Alors qu’un peu partout les Burkinabè sacrifiaient aux traditionnels vœux, où le mot « sécurité » revenait comme une antienne, il en est d’ailleurs ainsi depuis quelques années, une succession de drames a endeuillé cette partie du Burkina.
Il y a eu d’abord le 30 décembre 2022 des massacres à coloration ethnique à Nouna, où 28 personnes issues de la communauté peule auraient été froidement abattues par des Volontaires pour la défense de la patrie (VDP), selon le Collectif contre l’impunité et la stigmatisation des communautés (CISC) ; ensuite, une attaque a visé deux jours plus tard l’Institut national de formation des personnels de l’éducation (INFPE), qui se trouve à Dédougou, le chef-lieu de région. Et comme si cela ne suffisait pas, ces hommes sans foi ni loi s’en sont pris à un homme de Dieu, l’abbé Jacques Zerbo, tué le 2 janvier 2023 sur l’axe Tougan-Dédougou, désormais infesté par les forces du Mal.
Et en cette période de reprise scolaire où de nombreux enseignants rejoignent leur poste, le directeur de l’école de Ninlaré, dans le Sourou, Adama Kékélé, a trouvé la mort dans les encablures de Gassan, localité qui se vide de sa population depuis quelques jours suite à un ultimatum des groupes armés terroristes. Vraiment, il y a de quoi donner le tournis.
En réalité, après le Sahel, l’Est, le Centre-Nord, il y a belle lurette que la pieuvre tentaculaire qui nous enserre s’est sanctuarisée dans ce qui est considéré comme le grenier du Burkina.
Ironie du sort, ces multiples drames surviennent au moment où le chef de l’Etat, le capitaine Ibrahim Traoré, a choisi de prononcer son discours du Nouvel An depuis Solenzo. Solenzo, cette ville-martyre qui avait été mise sous coupe réglée depuis de longs mois par les fameux HANI et qui a fini par être libérée grâce au travail acharné des Forces de défense et de sécurité (FDS). C’est dire si c’est tout un symbole que ce discours ait été livré depuis la capitale des Banwa. Les terroristes auraient voulu faire la nique au capitaine Traoré qu’ils ne s’y seraient pas pris autrement.
Cette série noire intervient également alors que le président du Faso, en marge de sa visite à Solenzo, a effectué un séjour dans le grand Ouest où, bien entendu, le problème sécuritaire était au centre des débats. Ces attaques itératives montrent à quel point ce problème est particulièrement préoccupant, et on espère que les nouvelles autorités burkinabè sauront trouver très rapidement la solution magique pour venir à bout de la vermine qui s’incruste un peu partout.
S’agissant des massacres de Nouna, ce n’est pas la première fois que les FDS et leurs supplétifs civils sont accusés de commettre des liquidations extrajudiciaires. L’autorité politique et la hiérarchie militaire ont toujours promis des enquêtes quand survient ce genre de tragédies, mais force est de reconnaître que jusqu’à présent, aucune de ces investigations n’est encore allée à son terme, ou à tout le moins les résultats n’ont jamais été rendus publics. Qu’en sera-t-il cette fois-ci ? On est en droit de se poser cette question malgré les assurances données par le procureur du Faso près le tribunal de grande instance de Nouna.
Quoi qu’il en soit, quels que soient ses auteurs, ce drame vient détricoter davantage le tissu social qui part en lambeaux chaque jour un peu plus depuis 7 ans.
Hugues Richard Sama