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8 mars 2018 : Pas de « plan Marshall » pour sauver la fête

Contrairement au plan Marshall (aide économique et financière proposée par les Etats-Unis à tous les pays européens) qui a permis de sauver le Vieux Continent à la fin de la Seconde Guerre mondiale, les femmes du Faso ne bénéficieront pas de plan de la part de leur ministre de tutelle, Laurence Ilboudo/Marshall, pour sauver « leur 8-Mars ». En effet, elles qui ont pris l’habitude de fêter en grande pompe cet événement annuel ont été appelées par la ministre, le 5 mars dans un communiqué, à rester dans la logique du deuil consécutif à la double attaque qui a touché Ouagadougou en plein cœur. 

 

La double attaque qui a touché Ouagadougou en plein cœur le 2 mars dernier a laissé les hommes intègres dans la tristesse, la désolation, le recueillement et la recherche de solution à cette barbarie. Afin de compatir à la douleur des familles endeuillées des huit victimes, le cœur meurtri, le gouvernement a décidé que la Journée du 8-Mars serait célébrée dans la sobriété en en annulant le caractère festif.

« La commémoration du 8 mars 2018 se tiendra dans un contexte particulièrement difficile suite aux attaques terroristes perpétrées contre notre pays », a d’entrée de jeu rappelé Laurence Ilboudo/Marshall dans son communiqué. De ce fait, elle invite les populations burkinabè à célébrer cette journée dans « la sobriété et le recueillement».

Estimant que le noir pourrait exprimer le mieux le deuil et la compassion, le chef du département de la femme a invité toutes les femmes à porter, en solidarité avec les familles éplorées, un signe distinctif : foulard, écharpe ou bandeau de couleur noire lors des activités commémoratives.

Selon le communiqué, les regroupements festifs et autres manifestations de réjouissance populaire sont à bannir sur toute l'étendue du territoire national. Toutefois, « les journées de réflexion des 7 et 8 mars 2018 sont maintenues aux mêmes lieux et heures», a-t-elle précisé.

Quant aux promoteurs de spectacles et d'évènements de distraction de tout genre relatifs à la célébration du 08 mars, la première responsable du département de la Solidarité nationale les a invités à respecter « scrupuleusement cette consigne ».

En rappel, le ministre de la femme avait, le 26 février dernier, annoncé la suppression de la parade cette édition pour des raisons budgétaires. Il faut donc dire que cette interdiction de fêter vient renforcer la sobriété de cette célébration longtemps faite en grande pompe.

J. Benjamine Kaboré

 

 

Encadré

 

Ils ont dit…

 

« Je n’ai pas la tête à la fête »

 (Zalissa Ilboudo, vendeuse de fruits)

 

Les années antérieures, je me faisais confectionner une tenue dans l’uniforme du 8-Mars. Je me retrouvais ensuite avec mes copines au maquis pour faire le show. Mais la situation est différente cette année avec l’attaque terroriste du 2 mars, qui a fait plusieurs morts côté burkinabè. Je suis dans la tristesse, donc je n’ai pas la tête à la fête. Je trouve que la décision de notre ministre est sage et nous la respecterons.

 

« Je suis d’accord avec la décision du ministre »

(Assèta Sanfo, vendeuse de légumes)

 

Nous sommes dans un deuil national car ce sont nos époux et nos frères qui sont tombés pour ne plus se relever. Nous sommes donc tristes et sommes de ce fait partantes pour la décision du ministre de la Femme de surseoir à toute activité festive. Par conséquent, le jour du 8-Mars nous porterons un foulard noir comme signe de deuil et viendrons vendre nos marchandises tout comme les jours ordinaires.

 

« Les femmes exagèrent avec cette histoire de 8-Mars »

(Bintou Kabré, vendeuse de légumes)

 

Le 8-Mars ne m’a jamais intéressée. Je n’ai jamais acheté le pagne, à plus forte raison cette année avec les attaques du 2 mars dernier. Je sortirai vendre mes légumes et après j’irai faire ma cuisine pour ma famille ; je suis contente de la décision du ministre car les femmes exagèrent avec cette histoire de 8-Mars.

 

« Il n’y a pas d’affluence comme d’habitude »

(Ali Konditamdé, boucher)

 

Vraiment, que le seigneur nous délivre de ces fous de terroristes ; à cause d’eux il n’y a pas le marché. D’habitude à cette heure, j’avais déjà des commandes pour le 8-Mars ; je pouvais même avoir des commandes de 30 000 F CFA par jour à l’approche de la fête de la femme mais cette année avec les attaques, tout tourne au ralenti.

 

« Ce 8-Mars sera  célébré dans la sobriété, la réflexion, la solidarité, toutes choses qui nous honorent »

(Yvette Bélem, fonctionnaire)

 

D’habitude le 8-Mars, on le fait avec les défilés, le discours… Mais cette année, le ministre en charge de la Femme a demandé que l’on s’abstienne des activités festives et que l’on se consacre à la réflexion et à la rencontre directe avec le président du Faso. Je trouve que c’est une bonne initiative au regard de la situation nationale. Elle a aussi demandé de porter un foulard ou un brassard noir pour accompagner les familles endeuillées. Donc spécialement, ce 8-Mars se fera dans la sobriété, la réflexion, la solidarité, toutes choses qui nous honorent. On va aussi réfléchir ensemble sur comment les femmes peuvent contribuer à la recherche de la paix. Je pense que cela est bien parce que ce n’est pas seulement le fait d’aller danser, faire le djandjoba, se saouler dans les maquis qui fait le 8 mars. D’ailleurs, ces pratiques n’honorent pas la femme.

 

 

« Ce 8-Mars, on ne va pas fêter,  on va prier Dieu pour notre nation »

(Madeleine Méda, fonctionnaire)

 

D’habitude le 8 mars, moi je vais à l’église et avec les autres femmes, on mène un certain nombre d’activités. Et cette année le ministre a demandé qu’on ne fête pas et moi j’apprécie cela. D’ailleurs, c’est normal que l’on respecte la mémoire de ceux qui sont tombés. Donc ce 8-Mars, on ne va pas fêter, on va prier Dieu pour notre nation, le Burkina Faso. Et demander que ce genre d’actes ne se produise plus jamais. Mais s’il arrive que des femmes veuillent à tout prix fêter le 8-Mars, qu’elles le fassent en mémoire de ces soldats tombés pour la patrie.

 

« Nous porterons toutes un foulard noir le 8-Mars »

(Sita Koné, commerçante au marché de Gounghin)

 

La fête du 8-Mars  ne nous intéresse pas  cette année. Notre pays ne peut pas être touché par des attaques et on va s’intéresser à la fête. Les morts ne sont même pas encore inhumés. Les années antérieures, avec les membres de notre association, à l’occasion du 8-Mars, nous nous retrouvions pour discuter de choses relatives aux femmes pour améliorer notre quotidien ainsi que celui de nos familles. Après, nous nous rencontrions dans un maquis pour nous égayer. Mais cette année, nous nous sommes toutes entendues pour ne manifester aucune réjouissance. Et nous sommes d’accord pour nous aligner sur la décision du ministre de la Femme de porter, ce jour-là, le foulard noir en vue d’exprimer notre affliction.

 

« Il n’y a vraiment  pas lieu de faire la fête »

(Biba Koanda, vendeuse de fruits)

 

Le 8-Mars dernier, nous nous sommes beaucoup amusées. Nous avons participé à un défilé. Une semaine avant, nous nous préparions au stade municipal et le jour même, nous avons défilé devant l’Assemblée nationale. C’était vraiment beau. Mais cette année, au regard  de la situation sociopolitique de notre pays, la fête ne nous intéresse pas. Il n’y a vraiment pas lieu de faire la fête ce jour-là. Nous mènerons nos activités comme d’habitude en portant des foulards noirs, comme recommandé par le ministre de la Femme.

 

« Les revenus ratés d’un seul jour ne peuvent rien faire à notre maquis »

(Eric Yao Kouamé, gérant du maquis Somkiéta)

 

Depuis très longtemps, la Journée internationale de la femme est célébrée et les femmes de notre pays sortent des pagnes à cet effet. C’est un moment pour elles de se retrouver entre elles, de  discuter, manger et s’amuser un peu. Et pour l’occasion, réunies en groupe, elles se retrouvent dans notre maquis. Avant les attaques terroristes du 2 mars, le ministre de la Femme s’était prononcé sur la manière de célébrer le 8-Mars. Avec les attentats, il y a encore eu des restrictions. Je respecte la décision du ministre, il y a lieu de respecter la mémoire de ceux qui sont morts. Ils ne savaient pas qu’ils ne regagneraient pas leur famille après le service. Je m’incline donc devant leur mémoire. Cependant, nous ne pourrons pas empêcher quelqu’un de faire la fête en dépit du fait qu’il n’y aura pas de musique. Nous aurions voulu qu’après les attentats, une journée ville morte ou une journée de deuil national soit décrétée afin de permettre aux femmes de  fêter. Cependant, cette célébration timide ne portera pas un coup à notre chiffre d’affaires car des  réservations sont déjà faites. Pas que je suis certain de la fidélité de nos clientes, mais hormis le 8-Mars, nous avons une grande clientèle. Il nous est difficile de chiffrer le nombre de nos clients, néanmoins nous pouvons recevoir entre 250 à 300 personnes en dehors du week-end. Mais en ce qui concerne la Journée internationale de la Femme, nous pouvons recevoir 800 personnes. Et même si c’était le cas, ce ne sont pas  les revenus ratés d’un seul jour  qui vont causer des soucis de fonctionnement à notre maquis.

 

Ebou Mireille Bayala

Félicité Zongo

Assiata Sawadogo

J. Benjamine Kaboré

Commentaires   

+1 #1 Megd 06-03-2018 22:41
C'est forcé de fêter?

On a trop dénaturé et politisé le 8 mars dans ce pays.
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