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Affaire recrutement CNSS : Chaque admis avait un proche dans la boîte

 

Comme annoncé la semaine écoulée, le défilé des témoins dans le cadre du procès du recrutement litigieux de 85 agents en 2018 pour le compte de la Caisse nationale de sécurité sociale (CNSS) a effectivement commencé. Sur les 28 personnes qui doivent aider à éclairer la lanterne du tribunal dans cette affaire, 12 étaient à la barre le mardi 30 juin 2020. Et il y a un point commun qui ressort de la  déposition des témoins, constitués essentiellement d’agents de la CNSS et de candidats admis. Si le déposant est de la première catégorie, il a un proche admis au test. Vice versa. 

 

 

 

 

Après une sortie de la section CGTB (Confédération générale du travail du Burkina)  de la CNSS en 2018 pour dénoncer des  fraudes dans un recrutement pour leur maison, un autre syndicat de la boîte, en l’occurrence l’Organisation syndicale de la prévoyance sociale (OSPS), est monté au créneau pour contre-attaquer. Ce syndicat, contrairement à la CGTB, avait affirmé sans détour devant les hommes de médias que le processus de recrutement s’était déroulé dans les règles de l’art. Une déculottée qui a amené le premier groupe à renforcer son investigation. Grâce au travail de fourmi abattu par les hommes de la CGTB des preuves saisissantes ont été réunies. Le ministère public ne pouvait donc pas rester indifférent. Il s’est saisi du dossier. Et depuis ce temps, beaucoup d’eau a coulé sous les ponts.

 

Le 30 juin dernier, l’un des conférenciers de l’OSPS, Léopold Toé était à la barre du TGI en qualité de témoin. Chaque fois qu’il y a un test de recrutement à la CNSS, son syndicat est appelé à superviser le tirage à l’ANPE (Agence nationale pour l’emploi). Deux représentants dudit syndicat sont déployés sur le terrain pour les besoins de la surveillance. Quand vient le moment de la délibération, deux personnes sont encore envoyées sur les lieux. L’OSPS, selon son secrétaire général, ne prend pas part au choix du sujet, ni à la correction, ni à la levée des anonymats, encore moins à la saisie des notes. Le parquetier se demande alors sur quelle base le SG et ses camarades ont fait l’affirmation selon laquelle le processus du recrutement s’est déroulé dans les règles de l’art, vu qu’ils n’ont pas pris part aux étapes cruciales citées plus haut. Le SG, qui n’a pas eu le réflexe de déléguer des hommes pour participer aux étapes sensibles, se débine et rejette la faute sur les hommes de médias. « Les journalistes n’ont pas retranscrit fidèlement mes propos », a-t-il lâché face aux multiples questions du ministère public. La défense du syndicaliste ne convainc ni le parquetier ni les parties civiles. Pour Marcelin Ziba, le recoupement des propos du SG dans la presse ne laisse planer aucun doute. Selon lui, le syndicaliste a bel et bien tenu les propos qu’on lui attribue.  « Vous n’allez quand même pas dire que les journalistes se sont accordés pour vous attribuer des mots ! », s’est exclamé l’avocat du cabinet Farama. Qu’à cela ne tienne, le seul avocat des parties civiles dans ce procès, en tout cas le seul à prendre part aux audiences, a continué avec des révélations : par exemple, une candidate du nom de Sali Ilboudo a un lien de parenté avec un agent de l’OSPS. Son cas n’est pas isolé. Il y a au moins quatre autres candidats dans cette situation.

 

Selon Me Timothée Zongo de la défense, le parquet et les parties civiles chargent le témoin comme s’il était un prévenu. Le parquetier, de l’avis de l’avocat, doit souffrir de constater qu’une personne vient tenir des propos qui ne l’arrangent pas. « C’est l’opinion du témoin », a-t-il affirmé. Et d’indiquer au tribunal qu’eux non plus avocats de la défense ne croient pas à la fraude. « Il n’y a pas de fraude. Cela fait des mois que nous cherchons les preuves, mais nous ne les trouvons pas ». Pour le conseil d’un des prévenus, Daniel Sawadogo, c’est dangereux de croire qu’il y a fraude quand un individu réussit à un concours dans une société dans laquelle officie son proche. « A cette allure, Monsieur le Président (NDLR : s’adressant au tribunal), nous risquons de recevoir un jour des convocations parce qu’un proche est admis à un concours », a-t-il dit.

 

Pour son confrère Me Bama, les parties civiles pointent un doigt accusateur sur l’OSPS, or dans les rangs de la CGTB, il y a des brebis galeuses. Le père d’une des candidates, Aminata Diarra, admise au concours, est de la CGTB. « Parlons-en ! », dit-il avant de se raviser. « Nous ne sommes pas ici pour faire le procès de la CGTB. L’objectif dans ce procès c’est de savoir s’il y a eu népotisme ou pas, s’il y a eu favoritisme ou pas ». Le paternel de la candidate, Seydou Diarra, comptable à la CNSS, en qualité de témoin, dit ignorer si un bienfaiteur a œuvré à la réussite de son enfant. « Je croyais aux qualités de ma fille », s’est-t-il contenté de dire.

 

Avec les candidats Marc Zeda, Edith Tougouma, Djénéba Kanao… la correctrice a été appelée à la barre. Une comparaison des notes a été faite comme d’habitude. Et le constat est le même, les notes sont toujours majorées. Elles ne correspondent pas aux relevés de celle qui a été admise à la retraite. Avec les va-et-vient, la fatigue se lisait sur le visage de la dame de lettres, elle qui souffre d’arthroses.

 

Le passage du reste des témoins est prévu pour le 10 juillet 2020 au tribunal de grande instance de Ouagadougou.

 

Akodia Ezékiel Ada

 

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