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Sanctions CEDEAO contre le Mali : Pilule amère à l’efficacité incertaine

 

La brouille, ou tout au moins les incompréhensions, entre la CEDEAO et le Mali persiste à propos du retour de ce pays à une vie constitutionnelle normale. Et plus l’échéance du 28 février 2022 date butoir donnée par la CEDEAO au Mali pour organiser des élections se rapproche, plus la tension monte. Ainsi, après l’expulsion de son ambassadeur accrédité à Bamako le 25 octobre dernier, la CEDEAO, outre les protestations d’usage, avait annoncé des sanctions ciblées contre les autorités de la transition et leurs proches lors de son sommet extraordinaire du 7 novembre 2021 à Accra.

 

 

A ce propos, l’organisation ouest-africaine a tenu parole. 149 personnalités maliennes dont la quasi-totalité des membres du gouvernement et du Parlement de transition sont désormais frappées d’interdiction de voyager et leurs avoirs financiers à l’étranger vont être gelés. La liste de leurs proches qui seront également frappés par ces sanctions sera bientôt publiée. Entre des autorités maliennes qui s’arcboutent sur la souveraineté de leur pays pour gérer leur agenda électoral à l’aune des priorités de la transition et la CEDEAO qui veut un retour rapide à l’Etat de droit, on se demande jusqu’où ira cette brouille. Mais cela se voit comme un bouton sur le nez que cette tension ne grandit ni les premières ni la seconde.

 

A vrai dire, avec leur politique de sortie de la période transitoire à une allure de sénateur, Assimi Goita, Choguel Maïga et autres décideurs maliens donnent à penser qu’ils sont venus balayer la maison pour mieux y installer leurs pénates ; quant à la CEDEAO, en mettant comme en arrière-plan la situation sécuritaire préoccupante du Mali, ses difficultés politiques, économiques et sociales pour se braquer sur l’organisation des élections ici et maintenant, elle manque de réalisme.

 

Au demeurant, comme dit la sagesse populaire, « on n’attrape pas les mouches avec du vinaigre… » Il se pourrait donc que l’application de ces sanctions ciblées de la CEDEAO raidissent davantage les autorités maliennes dans leur attitude de nationalistes effarouchés. L’interdiction de voyage et le gel des avoirs des 149 personnalités ciblées pourraient se révéler improductifs à faire bouger les lignes pour une sortie rapide de la transition.

 

La CEDEAO, en plus donc du bâton des sanctions, devrait tendre la carotte des encouragements aux autorités maliennes. Encouragements pour leurs efforts de sécurisation du territoire national, de promesse de dialogue politique inclusif, de réforme du code électoral et de renouvellement de la structure organisatrice des élections. En effet, mieux vaut des élections tardivement organisées mais bien organisées, dans des conditions de transparence et d’équité acceptées par la majorité des acteurs que des élections hâtivement tenues avec des irrégularités génératrices de crises.

 

Gageons donc que la CEDEAO, malgré ces sanctions ciblées, va continuer la concertation avec les autorités maliennes et que celles-ci mettront un peu d’eau dans leur vin souverainiste. Cette main de la CEDEAO, qui continue d’être diplomatiquement tendue, peut se voir dans la promesse de nommer à Bamako un nouvel ambassadeur mais surtout dans la non-inclusion d’Assimi Goïta et de son ministre des Affaires étrangères, Abdoulaye Diop, parmi les personnalités visées par les sanctions individuelles. Beaucoup d’observateurs voient en effet dans ces exceptions paradoxales une opportunité pour ces 2 personnalités d’aller à la rencontre de leurs pairs pour plaider la cause du Mali et recueillir des avis et des appuis à même de remettre le pays sur l’orbite des Etats démocratiques et, pourquoi pas, débarrassé du spectre déstabilisateur de l’insécurité.

 

On croise les doigts pour cela, car il est à craindre que ces sanctions ciblées de la CEDEAO ne soient une pilule amère à l’efficacité incertaine.

 

 

Zéphirin Kpoda

Dernière modification ledimanche, 21 novembre 2021 20:49

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